Déjà bien achalandé avec Valentine Grand Centre, Grand V et Centre Valentine, le 11e arrondissement de Marseille devrait bientôt accueillir un nouveau centre commercial. D’abord retoqué par le Conseil d’État puis par la commission d’aménagement commercial, le projet My Valentine porté par le groupe Frey a finalement obtenu gain de cause. Sur son site, il annonce l’arrivée d’un nouveau centre de 30 000 mètres carrés et 64 enseignes pour 2022. Un projet qui fait bondir les candidats de l’opposition à quelques jours des municipales.
Une concurrence déloyale pour les petits commerçants
« Les petits commerçants sont très inquiets. On entend parler avec insistance de l’arrivée de ce nouveau projet gigantesque alors qu’ils ont déjà du mal à faire face aux grandes surfaces existantes », affirme Yannick Ohanessian.
Tête de liste du Printemps Marseillais pour le secteur des 11e et 12e arrondissements, il s’oppose fermement au développement de la zone : « On s’est engagé sur un moratoire du développement commercial de la Valentine », annonce-t-il. Selon lui, l’ouverture du projet My Valentine fait peser une lourde menace sur les emplois existants : « La vérité, c’est qu’il y a déjà des emplois supprimés et des boutiques qui ferment. Ce serait catastrophique de continuer à ouvrir des centres commerciaux », alerte-t-il. Un autre candidat sur ce secteur est sur la même ligne. Robert Assante, candidat à la mairie de secteur pour Bruno Gilles, le dissident de la majorité actuelle de Jean-Claude Gaudin. « Printemps, Grand V, Géant Casino, Ikea… Il me semble qu’il y a déjà tout ce qu’il faut sur le secteur. Pourquoi la mairie actuelle s’entête-t-elle à vouloir imposer un centre commercial sur ce terrain ? Y’aurait-il des intérêts particuliers ? », se demande-t-il. Selon lui, la Ville serait sur le point de signer le permis de construire du projet : « Si il le délivre avant les élections du 28 juin, ce serait indigne », prévient-il.
Contacté par Gomet’, Julien Ravier, le candidat de Martine Vassal et maire de secteur actuel sur les 11e et 12e arrondissements, n’a pas répondu à nos sollicitations. Par contre, Laure-Agnès Caradec, l’adjointe à l’urbanisme de la mairie, nous assure « qu’aucun permis n’est à l’étude actuellement » pour le projet du groupe Frey. Elle ne nie pas cependant qu’il soit toujours en cours malgré les multiples oppositions contre la construction d’un nouveau centre commercial sur ce terrain.
Un projet plusieurs fois retoqué mais jamais abandonné
Le terrain de l’ancienne usine Procida attire les convoitises depuis bientôt dix ans. En 2011, un projet de village de marques de 125 boutiques est annoncé sur l’emplacement idéalement situé entre le cinéma les 3 Palmes et l’usine Panzani. Mais finalement, le dossier est retoqué pour cause de fort risque d’inondabilité. Une fois enterré, le groupe champenois Frey jette son dévolu sur cette friche industrielle. Plus petit que le village des marques, My Valentine propose tout de même près de 70 nouvelles enseignes sur une zone déjà bien occupée. Il essuie alors de nombreux recours de propriétaires de commerces voisins craignant cette nouvelle concurrence féroce. Le Conseil d’État lui-même s’y oppose en 2014. Mais Frey n’abandonne pas et suite à de multiples batailles juridiques, il obtient finalement gain de cause auprès de la cour administrative d’appel en 2017. « Je ne comprends pas d’ailleurs cette décision car outre la saturation commerciale du quartier, le sujet d’inondabilité du terrain est toujours d’actualité me semble-t-il », s’étonne Robert Assante. L’impact environnemental d’un nouveau centre sur la zone est l’un des principaux arguments de ses opposants. « Les habitants du quartier étouffent, raconte Yannick Ohanessian. Les axes routiers sont déjà complètement saturés et les riverains réclament de l’air », affirme-t-il.
My Valentine avec 70 boutiques
Avec My Valentine et ses 70 boutiques, ce sont des milliers de nouveaux clients qui viendraient sur la zone commerciale de la Valentine. Pourtant, le quartier est déjà largement embouteillé et reste assez mal desservi en transports en commun. « Il faut complètement revoir le plan de mobilité du quartier, estime Yannick Ohanessian. A commencer par les bus dont la fréquence doit considérablement augmenter », précise-t-il. Il va même plus loin en proposant de prolonger le projet de Valtram attendu entre Aubagne et La Bouilladisse jusqu’au quartier Saint-Loup à Marseille. Son adversaire Robert Assante avance l’idée d’étendre la ligne 1 du tramway des Caillols jusqu’à la Valentine. « Il faudrait aussi une station de vélo à la gare de la Barasse », ajoute Yannick Ohanessian. Le candidat du Printemps Marseillais revient aussi sur l’aménagement des berges de l’Huveaune qu’il veut « rendre aux Marseillais avec la possibilité de se balader tout au long de ce cours d’eau jusqu’à la plage Borély ». Cette coulée verte doit permettre d’attirer des promeneurs et « redynamiser les commerces des noyaux villageois alentours qui se sentent totalement abandonnés », affirme-t-il.
11-12 : un secteur victime du bétonnage
Non loin de la Valentine, d’autres projets menacent d’engorger un peu plus les routes et de réduire encore les espaces verts. Sur la Zac des Caillols, un programme de 1 500 logements est programmé « sans même avoir modifier les plans d’accès routiers, les transports en commun. Ce n’est pas sérieux », s’agace Robert Assante. Et Yannick Ohanessian d’ajouter « qu’il n’ya ni nouvelles places de crèche, ni école prévu pour un projet de cette taille. Encore une fois, rien n’est pensé en amont par cette équipe municipale », regrette-t-il. Un peu plus loin, dans le même secteur, le fameux projet d’hôpital privé de Saint-Barnabé fait aussi grincé des dents une bonne partie des habitants. L’une des principales opposantes à l’installation de l’établissement du groupe Sainte-Marguerite sur l’ancien terrain du collège Louis Armand, Cécile Vignes, a d’ailleurs rejoint les rangs de Bruno Gilles pour être numéro deux derrière Robert Assante sur ce secteur. Ce dernier a repris le combat à son compte et propose de faire un commissariat de proximité ou des maisons de soutiens aux familles aidantes. Et pour faire le lien avec le projet de centre commercial à la Valentine, il lance l’idée « d’installer l’hôpital privé regroupant les cliniques Beauregard et Vert Coteau sur le terrain Procida ou même à la Zac des Caillols, ce serait plus adapté », estime-t-il.
Quel avenir pour les Moulins Maurel ?
Fermée depuis 2013, l’usine des Moulins Maurel a longtemps attendu l’arrivée d’un repreneur avec une possible reconversion industrielle espérée par les 60 salariés employés par Nutrixo. Finalement, le propriétaire des moulins a conclu en début d’année la vente du site avec à un promoteur immobilier : la société Sportimmo, dirigée par Thierry Sportich, le compagnon de Caroline Pozmentier, adjointe au maire en charge de la sécurité mais qui a rejoint les rangs du candidat LREM Yvon Berland pour la campagne municipale. Contacté, Thierry Sportich explique qu’il souhaiterait faire un mix entre logements et commerces mais que pour l’instant, le classement de la zone interdit de réaliser des habitations : « Il faudra discuter pour modifier cela. Je pense que ce serait intelligent de faire un mélange des deux », avance-t-il. Par contre, il s’impatiente un peu sur l’obtention du permis de construire. La mairie de secteur étant actuellement difficilement joignable. « Pourtant, en face, sur le terrain des sœurs à côte de Marius Ferrat, les travaux ont pu commencer », s’étonne Thierry Sportich. Si le maire de secteur actuel, Julien Ravier, ne répond pas au promoteur, les autres candidats s’inquiète d’y voir s’installer de nouveaux commerces : « Ce serait une hérésie », prévient Yannick Ohanessian pour le Printemps Marseillais. De son côté, Robert Assante veut « discuter avec les habitants pour voir ce qu’ils veulent en faire. Il est urgent d’attendre et de se concerter sur cette zone qui étouffe sous le béton », s’alarme-t-il.
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