Iben : « C’est un projet pharaonique ! » le professeur Yehezkel Ben Ari a l’habitude de rencontrer des oppositions dans ses projets puisqu’il préfère toujours comme il l’explicite « les chemins de traverse aux autoroutes ». « C’est pharaonique, c’est normal je suis né en Égypte » objecte-t-il toujours dans un éclat de rire.
Nous avions relaté l’échec de Neurochlore de l’essai de phase 3, essai européen de l’utilisation du neurochlore pour traiter l’autisme.
« Je n’ai pas chômé depuis » affirme-t-il pour les lecteurs de Gomet’. « Cet essai de phase 3 n’est pas un échec, ce qui a échoué, c’est l’idée qu’un seul médicament pourrait traiter tous les enfants autistes. En fait, il faut diviser les enfants, en sous-populations, en fonction de leur aspect clinique précis. » L’objectif est, en utilisant le machine learning, d’identifier à la naissance les enfants autistes. « Je ne désespère pas, nous confie-t-il, que la France soit le premier pays au monde où l’on pronostique l’autisme à la naissance »
Le chercheur poursuit ses activités et ses publications. Avec dorénavant trois sociétés : Neurochlore, B & A Oncomedical et B & A Biomedical. Research.com vient de le classer 3e neuroscientifique français le plus cité et 211e mondial dans l’édition 2025 du classement des meilleurs scientifiques dans le domaine des neurosciences.
En privilégiant les chemins de traverse, il s’attaque aussi aux tumeurs cérébrales. Avec la start-up B & A Oncomedical il a l’ambition de « développer une approche révolutionnaire pour le traitement des tumeurs complexes et résistantes. Convaincus que cibler uniquement la tumeur ne suffit pas, nous intégrons une vision novatrice, prenant en compte l’environnement neuronal et l’hyperexcitabilité qui favorisent la progression tumorale. Nos travaux ouvrent la voie à de nouvelles pistes thérapeutiques, non seulement pour le traitement des tumeurs résistantes, mais aussi pour d’autres maladies où la dérégulation de l’homéostasie du chlorure joue un rôle clé. »
Iben : le dernier terrain constructible de Luminy
Pour l’heure, il se désespère de conduire ses recherches dans un préfabriqué qui prend l’eau les jours d’orage. En prévision d’un succès de la phase 3, il avait fait l’acquisition du dernier terrain constructible de Luminy. Il y aurait alors développé avec le laboratoire Servier (associé à cette étape) l’unité de fabrication.
Naît alors le projet « pharaonique » bien sûr de construire un hôtel d’entreprises totalement inédit dans la région marseillaise. Les jeunes doctorants, les créateurs de start-up n’ont pas de point de chute ni d’espace pour développer leur projet. « Les jeunes scientifiques, dit-il, peinent à trouver des débouchés en dehors de l’académique qui offre de moins en moins de possibilités. Enseignant à l’école doctorale, je me rends bien compte que les jeunes doctorants ne voient pas leur futur comme pour notre génération dans des carrières académiques avec peu de postes dans les grands organismes et un financement de la recherche de plus en plus difficiles à obtenir. »
« In fine les choses se tiennent, plaide-t-il sur son blog, après avoir fondé un superbe Institut de neurosciences, un des plus beaux sur le plan de l’architecture avec un grand architecte norvégien, je vais fonder un institut d’innovation entrepreneuriale, avec un autre grand architecte français, celui-là Rudy Ricciotti, créant ainsi une continuité sur le campus de Luminy. J’espère que cela contribuera à attirer des chercheurs et équipes d’innovation et accroître l’attractivité de la région. »
Iben : 6 600 m2 de labos et bureaux, 20 à 30 entreprises
Avec le concours de Céline Hubert du cabinet Beopus, cabinet de conseil en santé expert du montage, de l’accompagnement et du pilotage de projets innovants, co-fondatrice du projet avorté Giptis du professeur Nicolas Lévy (lire nos archives), il propose un bâti de cinq étages avec 6 600 m2 de laboratoires et de bureaux représentant 85 % des surfaces totales avec des espaces communs et des équipements de machine learning notamment. « Je serai un locataire comme un autre, même si le bâtiment porte mon nom ». Il insiste fortement pour que le prix de location reste accessible 235 € le m2 plus 35 € de charges pour des locaux vides, 380 € meublés. « Ce sont des conditions exceptionnelles ! »
« Nous pourrons accueillir 20 à 30 entreprises, précise Céline Hubert ; deux tiers de laboratoires (L1 et L2) et un tiers de bureaux organisés en modules de recherche de 100 m2 à 360 m2 connectables les uns aux autres avec des plateaux libres de 1 400 m2 à la découpe pour des aménagements sur mesure »
25 millions d’investissement, 10 candidats en discussion
L’investissement s’élève à 25 millions d’euros. Eiffage prend en charge la conception, la construction et revendra le projet à un ou des investisseurs. Tivoli Capital accompagne depuis le début le projet, il en sera le gestionnaire et animateur. La Métropole et ses services sont en appui au projet.
L’heure est aux candidatures pour accueillir « les pépites de demain actives dans les biotechnologies, la medtech, la e-santé, l’intelligence artificielle appliquée à la santé, ou l’analyse des big datas médicales. » Si les candidats sont au rendez-vous (« ils n’ont pas besoin d’immobiliser l’argent maintenant » précise le professeur Ben Ari) la première pierre est prévue pour septembre 2025 et la construction prendra 18 mois après le feu vert. Soit une ouverture planifiable pour le premier semestre 2027.
« Nous sommes en discussion avec une dizaine d’entreprises précise Céline Hubert, il en faut une quinzaine pour démarrer ». Elle reconnaît que le modèle est novateur à Marseille puisque toutes les pépinières ou hôtels d’entreprise bénéficient d’appuis soit publics ou soit privés de grands groupes. Ce serait le premier hôtel d’entreprise sur une base totalement entrepreneuriale qui verrait le jour à Marseille. « Il n’y a pas d’équivalent dans la région reconnaît Céline Hubert, mais des villes comme Montpellier, Lyon, Paris, Strasbourg bénéficient déjà de ce type d’équipements qui connaissent un vrai succès ».
Lien utile :
L’actualité du secteur de la santé à suivre sur Gomet’