En un semestre, le groupe Ortec a fait des acquisitions et lancements, des USA à l’Afrique, du Béarn à Chassieu qui devraient lui permettre de dépasser les deux milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2025 en intégrant 1 500 collaborateurs nouveaux. Aux manettes, André Einaudi, P.-D.G. fondateur et son fils Julien, directeur général, avancent à grands pas, forts de résultats positifs d’années en années et d’une croissance maîtrisée. Gomet’ a retracé ce feuilleton en quatre épisodes qui se concluent par un entretien au siège du groupe aux Milles avec André Einaudi.
Ortec a connu ce semestre une croissance externe très forte avec des acquisitions dans des métiers très différents et dans des directions géographiques nouvelles. À quelle stratégie obéit cette croissance externe ?
André Einaudi : Le modèle Ortec depuis le début n’a pas changé : diversité d’activités, diversité de métiers, diversité de marchés, diversité géographique. Regardons les crises impactantes pour notre activité depuis 2008 : crise financière, crise du baril de pétrole, accident de Fukushima ou la dernière, le Covid. Chaque fois, nous sommes passés à travers les gouttes, parce que nous avons des amortisseurs, qui font que chaque activité n’a pas la même saisonnalité ou ne subit pas les mêmes aléas. Chacune des acquisitions a rejoint donc une activité différente d’Ortec, nos cinq pôles ont fait cette année des acquisitions en France et à l’international. Ce qui en volume représente plus de 350 millions d’euros de chiffre d’affaires.
Quels sont ces cinq pôles ?
A.E. : Le premier, c’est l’ingénierie, le 2e, c’est le contracting France, le 3e, c’est le contracting international. Le 4e, le global service (les activités liées à l’environnement) et le 5e, le pôle Énergie. Le métier principal est la métallurgie talonnée par l’électricité. Nous restons orientés sur cette diversité d’activités, de géographie, de marché. C’est une équation importante avec les problèmes en France de l’énergie, de la chimie, de la pétrochimie.
Ortec affichait depuis longtemps une volonté de croissance externe comme ce qui avait été fait avec Friedlander. Pourquoi préférer des acquisitions plus modestes ?
A.E. : Il faut savoir tirer des bords : nous parviendrons en 2025 à près de deux milliards d’activités. Nous n’avons pas atteint cet objectif par une grande opération de croissance externe, mais avec de multiples acquisitions et de la croissance organique, mais nous arrivons à bon port.
Combien pèse le continent africain dans ce chiffre d’affaires ?
A.E. : L’Afrique représentera en 2025, 450 millions d’euros sur deux milliards. À un moment donné, l’Afrique était devenue omniprésente dans notre chiffre et surtout notre résultat. Mais nous avons toujours la même envie de diversifier le risque, de multiplier les zones géographiques. Nous nous sommes développés en Europe : en Roumanie, en Allemagne, en Angleterre, en Espagne. Le Canada, est devenu en dehors de la France le 2e pays de développement d’Ortec en termes de volumes.
Nous nous sommes implantés en Inde où nous avons plus de 500 personnes, en Malaisie, nous souhaitons nous installer au Sri Lanka. Le Canada, est devenu le 2e pays, en dehors de la France, en termes de volume. Et nous venons de nous implanter depuis deux mois à Houston aux États-Unis.
Pourquoi l’Inde ?
A.E. : Pour l’aéronautique, l’informatique pour les parties techniques de l’équipement aéronautique avec des ingénieurs à Bangalore. En Inde, nous travaillons pour l’Europe : pour les grands avionneurs qui ont poussé l’ensemble de leurs fournisseurs à faire appel à des plateaux d’ingénieurs en nombre et à prix plus avantageux.
Revenons en France où nous voyons Ortec devenir fournisseur d’énergie pour les véhicules…
A.E. : Nous sommes vendeurs d’énergie. Nous construisons, nous achetons ou louons les terrains. Nous avons fait du détachement de parcelles d’agences Ortec pour aller vite et nous avons mandaté des négociateurs de terrain qui parcourent la France pour nous trouver des mètres carrés à proximité des sorties d’autoroute, des grands axes routiers. Nous examinons tous les flux de véhicules et notamment les véhicules lourds pour capter dans les années qui viennent un maximum de transit.
Nous construisons l’infrastructure, les charpentes. Avec une station d’accueil, un endroit toilettes et repos, pour que les chauffeurs puissent aller boire un coup. Nous installons des bornes ultrarapides de chargement pour recevoir des poids-lourds ou des fourgons. Nous pouvons aussi recevoir des voitures, mais notre objectif ce sont les véhicules lourds. Nous essayons d’avoir des partenariats nationaux avec des grandes flottes pour qu’ils nous cèdent des terrains. Ça nous évite d’investir et en même temps, ça nous donne un accès direct à une clientèle.
Quelle est la place d’Ortec dans la filière nucléaire ?
A.E. : En ingénierie, sur la base installée, dans les centrales EDF existantes, nous faisons partie des deux premières entreprises. Pour la partie maintenance, nous sommes aussi présents pour le changement des générateurs de vapeur, sur toute la mécanique et la robinetterie, sur les arrêts de tranche et sur les travaux de tuyauterie et de modification.
Et pour la construction de nouvelles centrales ?
A.E. : Il y a un peu plus d’un an, EDF avait sollicité les entreprises de tuyauterie en France, dont la nôtre, avec notre filiale Orys, pour participer à la construction des nouveaux EPR 2. Depuis, nous ne sommes plus associés à ce projet. Alors que c’est un projet national, vital pour la France, pour des générations, avec une possibilité de reproductivité à l’international. Nous avons besoin d’un véritable élan national de la filière et pas simplement de se gargariser de mots ou de bonnes intentions. C’est une opportunité phénoménale pour le pays, c’est l’équivalent des projets des années soixante-dix, mais, en ce moment, on patine.
Je pense qu’il faut apprendre à faire confiance aux gens, à faire confiance aux entreprises. Il faut se mettre autour d’une table, bâtir ensemble un projet ficelé, avec des engagements partagés, avec une vision budgétaire, une vision ressources humaines et une vision d’organisation.