Gomet’ apporte sa contribution en prélude au Congrès mondial de la nature avec la publication de dix avis d’experts de notre région qui éclairent à partir de leur expérience et de leurs analyses les problématiques territoriales. Ces textes ont été publiés dans notre Guide de l’élu éco-responsable qui a été adressé cet été à 752 décideurs de notre territoire. Pour ce quatrième épisode, Annick Mièvre, directrice régionale de la délégation Provence-Alpes-Côte d’Azur de l’agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse, établit un diagnostic de l’eau dans la collectivité.
Annick Mièvre, directrice régionale de la délégation Provence-Alpes-Côte d’Azur de l’agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse
Annick Mièvre est ingénieur des ponts, titulaire d’un master 2 en action publique, d’un DEA villes et sociétés, ingénieure de l’École nationale des travaux publics de l’État. Elle a commencé sa carrière dans le service public au sein de la direction de l’équipement en départemental et régional jusqu’en 2008. En 2009, elle opte pour la Dreal, direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement, où elle assume des responsabilités au service en charge de l’énergie, de la construction, de l’air et des barrages. Depuis 2019, elle a rejoint l’Agence de l’eau, où elle est directrice régionale de la délégation Provence Alpes Côte d’Azur.
Les agences de l’eau, nées du gaullisme, (c’étaient les agences de bassin), puis de la loi Lalonde en 1992, sont des modèles internationaux de gestion des bassins hydrauliques, tant par leurs capacités à analyser, protéger et restaurer les milieux aquatiques que par leurs modes d’intervention. Les agences, des établissements publics à caractère administratif, donc autonomes, bénéficient de la première fiscalité écologique, une fiscalité propre, un prélèvement discret et « indolore », qui leur fournit des moyens conséquents pour intervenir sur le territoire. La directrice de notre région, Annick Mièvre dévoile les capacités d’intervention de l’agence avec les 119 communes du département
Gomet’ : Quelles sont les problématiques les plus importantes que vous diagnostiquez sur le territoire des Bouches du Rhône en matière de risques liés à l’eau ?
Annick Mièvre : L’agence de l’eau est compétente en matière de qualité des eaux et des milieux aquatiques et littoraux, mais elle n’est pas compétente en matière de risques naturels (DDTM). Dans notre domaine de compétence, nous distinguons deux grandes thématiques :
- Le « petit cycle de l’eau », qui recouvre les services d’eau potable et d’assainissement,
- et le « grand cycle de l’eau », qui concerne la préservation et la restauration des milieux aquatiques et littoraux, dont les zones humides et la biodiversité associée.
En matière d’organisation des collectivités, le département des Bouches-du-Rhône est très particulier puisqu’il n’est couvert que par quatre EPCI, les établissements publics de coopération intercommunale : la Métropole Aix Marseille Provence, qui regroupe 90 des 119 communes des Bouches-du-Rhône, deux communautés d’agglomération (Arles Crau Camargue Montagnette & Terre de Provence) et une communauté de communes : Vallée des Baux Alpilles (CCBVA).
Dans le département, l’ensemble de ces EPCI dispose des compétences liées au petit et au grand cycle de l’eau, mais certaines peuvent être exercées pour leur compte par des syndicats (d’eau, d’assainissement ou de bassin-versant).
Les enjeux en matière d’état des eaux dans les Bouches-du-Rhône concernent principalement les pollutions dues à l’urbanisation et aux activités agricoles et les atteintes portées à la morphologie des cours d’eau.
Les pollutions proviennent principalement, d’une part, des rejets d’eaux usées qui ne sont pas suffisamment traitées à cause de fuites dans les réseaux ou de déversements des stations d’épuration (STEP) par temps de pluie et, d’autre part, des activités agricoles, notamment autour de l’étang de Berre ou dans le secteur de la Camargue. Ces pollutions dues aux activités humaines impactent aussi les milieux littoraux. Par ailleurs, les cours d’eau du département ont été fortement modifiés par l’urbanisation. En effet, cette urbanisation empiète sur le lit des cours d’eau, ce qui perturbe leur fonctionnement naturel (déconnexion des nappes, problèmes de transit des sédiments, amplification des effets des crues), la vie aquatique (circulation des espèces) et amplifie les phénomènes de ruissellement et les impacts des inondations. Redonner de la place aux cours d’eau et désimperméabiliser les espaces artificialisés sont donc deux objectifs prioritaires pour le département.
Quelles sont les initiatives, les actions, les projets que peut penser une collectivité locale en coopération avec l’Agence de l’eau ?
A.M : Pour les collectivités, l’Agence de l’eau accompagne les actions qui visent à lutter contre les pollutions des systèmes d’assainissement par temps de pluie, et notamment la désimperméabilisation, permettant d’infiltrer les eaux de pluie directement dans le sol et de les déconnecter des réseaux d’eau pluviale. Elle accompagne les économies d’eau pour les systèmes qui prélèvent dans des cours d’eau en tension, comme la Durance par exemple. Elle soutient des actions de restauration du bon fonctionnement des cours d’eau, des petits fonds côtiers littoraux ou des zones humides.