A un mois de la présentation du plan acier promis par la Commission européenne, le président d’ArcelorMittal en France, Alain Le Grix de la Salle, fait monter la pression.
Auditionné ce mercredi 22 janvier par la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, il a pointé la « situation extrêmement critique » de la sidérurgie en France et en Europe. « Je ne peux pas prendre le moindre engagement. Tous les sites, quels qu’ils soient et où qu’ils soient, sont à risque. La sidérurgie européenne est en crise et il faut l’intégrer », a-t-il mis en garde, en réponse à une question sur l’avenir des sites du groupe en France, dont celui de Fos-sur-Mer, et alors que le groupe ArcelorMittal a confirmé, fin novembre 2024, la fermeture de ses sites de Reims et de Denain et la suppression de 135 emplois.
Outre « l’explosion » des coûts de l’energie et la chute continue de la demande d’acier en Europe et notamment en France, de l’ordre de 4% par an en moyenne, « les surcapacités mondiales sont un phénomène structurel qui va durer, a surtout mis en garde Alain Le Grix de la Salle devant les représentants des groupes parlementaires et les députés. La Chine a exporté l’année dernière près de 120 MT, l’équivalent de toute la consommation européenne ! Nombreux pays se protègent et ferment leurs frontières avec des tarifs douaniers. Aux Etats-Unis, la part des importations dans la consommation des aciers plats a ainsi baissé de 25% en 10 ans, quand en Europe, sur la même période, elle a augmenté de 65%. Nous ne sommes pas contre les importations mais nous demandons qu’elles soient limitées pour qu’elles n’aient pas un effet dévastateur sur nos industries comme actuellement. Si l’Europe ne décide pas de protéger son marché de la concurrence déloyale, alors ce sont des pans entiers de notre industrie qui vont disparaître à brève échéance. »
Autre sujet d’inquiétude par le deuxième groupe sidérurgique mondial, les incertitudes réglementaires qui pèsent sur les investissements, et notamment les investissement en matière de décarbonation. « Sur ces cinq dernières années, nous avons investi en France environ 1,7 milliard d’euros, pour la sécurité, la maintenance de nos installations, la qualité de la productivité, le renouvellement de nos capacités ou pour notre développement, a d’abord rappelé Alain Le Grix de la Salle. A Fos, par exemple, nous avons investi 190 millions d’euros pour reconstruire notre centrale énergie ». Mais, a-t-il averti, « les investissements majeurs qui sont devant nous sont ceux de la décarbonation ».
« A l’heure actuelle, nous n’avons aucune garantie »
Des investissements prévus, mais dont Arcelor-Metal a annoncé récemment le « décalage ». « Nous restons engagés pour la décarbonation avec pour objectif d’atteindre la neutralité d’ici 2050, indique encore le président France d’ArcelorMittal. Mais pour que nous puissions confirmer nos investissements dans nos projets de décarbonation, nous avons besoin d’avoir une visibilité sur notre environnement réglementaire. A l’heure actuelle, nous n’avons aucune garantie, notamment sur le coût du carbone avec un Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) pas assez efficace et qui ne protège pas suffisamment les industriels en Europe. Aujourd’hui, le coût du CO2 pour un producteur basé en Europe, c’est 10% du prix de vente de son acier, et 25% en 2030. Alors que l’acier chinois, qui ne porte pas ce coût du CO2, arrive en Europe avec des niveaux de prix inférieurs à nos prix de revient ! Là encore, nous avons besoin d’un cadre et de règles qui nous permettent d’opérer dans des conditions de concurrence loyale. C’est un élément clé sur lequel nous attendons des réponses de la Commission européenne. »
A un mois de la présentation du plan acier, le président d’ArcelorMittal en France, qui se défend de tout « catastrophisme », évoquant « seulement la réalité pure et simple », met clairement la pression.
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En vidéo, l’audition d’Alain Le Grix de la Salle à l’Assemblée nationale mercredi 22 janvier 2025
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