Le sénateur EELV des Bouches-du-Rhône est à l’initiative d’une mission d’étude sur les métropoles à statut spécial, qui porte sur les métropoles du Grand Lyon et d’Aix-Marseille Provence. Dans le cadre de cette mission, mise en place en parallèle de la loi 3DS (Différenciation, Décentralisation, Déconcentration et Simplification) plusieurs élus et décideurs métropolitains doivent être auditionnés ces jeudi et vendredi. Parmi eux, le maire de Marseille Benoît Payan, la maire d’Aix-en-Provence Sophie Joissains, mais aussi la présidente de la Métropole Aix-Marseille Provence Martine Vassal. Dans un entretien à Gomet’, Guy Benarroche détaille les objectifs de cette mission sénatoriale et fait un point d’étape sur la réforme métropolitaine depuis l’adoption de l’article 181 de la loi 3DS (ex-article 56) en février dernier.
Pouvez-vous expliquer les objectifs de cette mission sénatoriale sur les métropoles à statut spécial ?
Guy Benarroche : Le Sénat a décidé d’une mission spéciale sur les métropoles à statut spécial que sont celles de Lyon et d’Aix-Marseille Provence. C’était une demande émise par moi-même après celle déjà menée pour le Grand Paris. Des auditions ont donc eu lieu dans un premier temps à Lyon pour faire un point deux ans après la réforme métropolitaine et du mode de scrutin (les conseillers métropolitains y sont désormais élus au suffrage universel direct.
Nous nous penchons cette semaine sur la métropole Aix-Marseille Provence avec des premiers auditions organisées jeudi 28 avril et vendredi 29. Nous entendrons ainsi le maire de Marseille Benoît Payan et la maire d’Aix-en-Provence Sophie Joissains. Nous procèderons ensuite à l’audition de la présidente de la Métropole Martine Vassal. Enfin, seront également auditionnés le président de la chambre régionale des comptes, celui de la direction régionale des finances publiques, ainsi que les quatre présidents de commission choisis par Martine Vassal pour travailler à la mise en oeuvre de la loi 3DS : le maire de Saint-Chamas Didier Khelfa (commission finances), le maire de Carnoux Jean-Pierre Giorgi (Commission locale d’évaluation des charges transférées), le maire Mimet et également président de l’Union des maires des Bouches-du-Rhône, Georges Cristiani (commission compétences) et le maire de Pélissane Pascal Montécot (commission ambition métropolitaine).
A l’issue de ces auditions, un rapport propre à la Métropole Aix-Marseille Provence sera émis par le Sénat courant juin 2022. L’objectif est d’obtenir un certain nombre de préconisations afin de mettre sur pieds une nouvelle loi sur les métropoles à statut spécial fin 2025, pour une mise en application en 2026.
L’article 56 de la loi 3DS vise à parer au plus pressé pour avancer sur une réforme plus en profondeur
Guy Benarroche
Que changerait cette loi par rapport à la loi 3DS, adoptée en février dernier ?
G.B : L’article 56 de la loi 3DS, qui acte notamment la répartition des compétences et la fin des conseils de territoire, n’était qu’une mise en bouche : il vise à parer au plus pressé pour avancer sur une réforme plus en profondeur, à dégrossir pour ne pas se retrouver dans une impasse. Le but de cette future loi sera de redéfinir clairement le périmètre de la Métropole, sa gouvernance, la relation et la gestion des flux financiers avec les différentes communes … Il faut garder à l’esprit que les métropoles à statut spécial ne sont pas des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) : ils n’ont pas vocation à être un conglomérat de communes, mais à agir en tant qu’institution à côté des communes.
L’idée de cette mission est de rendre compte du fonctionnement des métropoles et pointer ce qui ne fonctionne pas, en dehors du champ de l’application de l’article 56 de la loi 3DS. L’administration territoriale est complexe : il nous faut la simplifier, et c’est tout l’esprit de la loi.
Dans l’attente de cette loi, que va-t-il advenir de l’organisation de la Métropole, avec la disparition des conseils de territoire, les attributions de compensation et les compétences ?
« La Métropole ne peut pas recréer des intercommunalités en son sein. Elle est une institution à part des communes »
Guy Benarroche
G.B : Les cartes sont désormais dans les mains de la Métropole Aix-Marseille Provence, qui doit voter la réorganisation de son administration avant le 1er juillet prochain. Elle pourra décider, par exemple, d’appliquer les dispositions de la précédente loi sur les métropole à statut spécial (2014) qui prévoyait l’instauration de conseils de territoires métropolitains (CTM), uniquement à vocation consultative, mais qui n’ont jamais été mis en place ! En effet, les conseils de territoires tels que ceux d’Aix-Marseille Provence, c’est-à-dire hérités des anciens EPCI et dotés d’un pouvoir exécutif, auraient dû cesser d’exister depuis 2020, mais il avait été décidé de les conserver malgré tout. La Métropole pourrait donc enfin créer de nouveaux CTM à vocation consultative, pas forcément calqués sur les territoires actuels, ainsi qu’une Communauté des maires de la métropole (CMM) qu’elle pourrait réunir lorsque le besoin s’en fait sentir. Mais en aucun cas la Métropole ne peut recréer des intercommunalités en son sein.
Le calendrier de la réforme métropolitaine :
1er juillet 2022 : disparition des conseils de territoire / vote par la Métropole Aix-Marseille Provence d’une nouvelle organisation
1er septembre 2022 : remise d’un premier rapport de la Chambre régionale des comptes
Décembre 2022 : vote des transferts de compétences de la Métropole vers les communes
Mai-juin 2023 : nouveau rapport de la CRC et détermination par la Clect d’un nouveau mode de calcul pour les attributions de compensation
Enfin, sur la répartition des compétences, la Métropole a jusqu’à décembre 2023 pour se prononcer sur ce qu’elle délègue, et ce qu’elle conserve dans son giron en vertu d’un « intérêt métropolitain ». Les communes auront leur mot à dire : par exemple, si la Ville de Marseille récupère notamment la compétence de la voirie, elle devra approuver et voter de son côté les propositions de la Métropole. La récupération de cette compétence n’est pas anodine : elle implique le déplacement de nombreux fonctionnaires œuvrant depuis des années dans ce domaine de la Métropole vers la Ville, ainsi qu’un accompagnement financier important, car la Ville n’a pas les moyens d’assumer cette compétence.
Enfin, concernant les attributions de compensation, elles seront calculées sur la base de deux rapports de la Chambre régionale des comptes : un à paraître en septembre 2022 qui établira un premier état des lieux sur ces AC ; un deuxième, d’ici décembre 2022, qui préconisera un nouveau mode de calcul. Ces préconisations seront prises en compte par la Commission locale d’évaluation des charges transférées (Clect) pour recalculer les AC d’ici mi-2023, car il faut attendre pour cela de connaître la future répartition des compétences.
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