« Nous suffoquons. » Dans un contexte d’alerte canicule, la mairie de Marseille appelle les citoyens à se mobiliser contre la pollution maritime : ce mardi 19 juillet, le maire de Marseille Benoît Payan a relayé sur Twitter une pétition lancée sur le site de la Ville.
« La Méditerranée est une des mers les plus polluées au monde. C’est une zone de non-droit », argumente ainsi la pétition. Elle exige ainsi un changement des règles internationales afin que celles-ci soient « plus protectrices de nos mers et de nos villes. » Dans une interview accordée à La Provence, l’édile marseillais précise sa pensée : « La mer Méditerranée est probablement la plus grande mer sur la planète qui n’est quasiment pas règlementée en termes d’émissions atmosphériques […] À lui seul, un bateau de croisière pollue autant qu’un million de voitures. On ne peut pas continuer comme cela. Tout ça doit s’arrêter… » Un point de vue que de nombreux Marseillais semblent partager : en seulement deux jours, la pétition a déjà recueilli plus de 21 000 signataires.
Interdire l’accès des navires polluants au port en cas de pic de polltuion
La mesure phare réclamée par la pétition est l’interdiction des escales pour les navires les plus polluants dans le port de Marseille lors des pics de pollution, comme celui que nous connaissons actuellement. « Nous, Marseillaises et Marseillais, exigeons des pouvoirs publics la mise en œuvre d’une interdiction des escales pour les navires les plus polluants durant les pics de pollution », est-il écrit dans le texte.
Contacté par Gomet’, l’adjoint au tourisme de la mairie Laurent Lhardit tempère les ambitions de la pétition : « L’objet de cette pétition est davantage d’appuyer démocratiquement notre combat contre la pollution maritime. Avant l’interdiction des navires, nous demandons surtout des outils pour permettre d’évaluer le degré de pollution des navires, ainsi que des contrôles accrus. Pour l’heure, nous n’avons d’indicateurs permettant clairement d’évaluer la pollution des navires. » Une fois munie de ses outils, la Ville entend ainsi demander l’action du préfet pour interdire, s’il y a lieu, l’accès de certains navires en période de pollution, la municipalité n’ayant pas elle-même la compétence directe pour le faire.
« Comment voulez-vous convaincre les Marseillais d’abandonner leur voiture quand des volutes noires de fumées s’échappent des cheminées des navires ? »
Laurent Lhardit
Pour Laurent Lhardit, l’encadrement du trafic maritime est d’autant plus urgente alors que la zone à faibles émissions sera instaurée pour le trafic routier à la rentrée : « La zone portuaire est exclue de la future ZFE. Comment voulez-vous que les Marseillais acceptent d’abandonner leur véhicule s’ils aperçoivent au loin des volutes noires qui s’échappent des cheminées des ferrys ? », souligne-t-il.
La pétition fait réagir les acteurs du secteur
Cette pétition de la mairie a suscité la réaction des professionnels du secteur maritime : « Le monde maritime, armateurs et organisation maritime internationale OMI, a anticipé bien avant la mairie et autres associations sur la question de la pollution de l’air ! », s’agace ainsi le président de l’Union maritime et fluviale Alain Mistre sur Linkedin, qui cite entre autres améliorations « le passage à un combustible à 0,5% de soufre en 2020 » ou encore le travail pour l’instauration d’une zone « Seca » (zone de contrôle des émissions atmosphériques) en Méditerranée d’ici 2025.
Le président de la Région Sud Renaud Muselier, proche de Renaissance, a également réagi hier sur le plateau de BFM TV : « Le rôle d’un maire n’est pas de faire une pétition mais d’agir. La Région a mis en place les escales zéro fumée avec l’électrification à quai. Si la mairie veut mettre un peu d’argent dedans pour gagner un ou deux ans sur ce processus, plutôt que de faire des pétitions, c’est avec plaisir », tacle-t-il.
Le Maire de Marseille se soucie de la santé de ses habitants @RenaudMuselier. Comme le font aujourd’hui ceux de Nice ou de Cannes face aux pollutions maritimes.
— Laurent Lhardit 🇺🇦 (@LaurentLhardit) July 21, 2022
Et pourquoi ne signeriez vous pas cette pétition ? https://t.co/YpgtIh9nrX
Interrogé par Gomet’ sur ces propos, Laurent Lhardit défend : « La mairie a déjà provisionné trois millions d’euros sur le dossier de l’électrification à quai, mais nous déplorons qu’elle concerne les grosses compagnies de croisière et pas davantage les petits armateurs, qui n’ont pas les moyens d’accélérer leur transition énergétique. » « Certes, il y a des avancées sur la transition du secteur maritime, mais la pétition est là pour impulser une accélération. Au delà d’une zone Seca, nous travaillons sur l’instauration d’une zone Eca (avec des contrôles plus accrus de l’Organisation maritime internationale pour réduire tout type d’émission atmosphérique, ndlr), c’est pourquoi nous devons aller plus vite pour être dans les temps », poursuit-il en réponse aux propos tenus par Alain Mistre. La mairie entend maintenir un dialogue avec une partie des acteurs du secteur pour arriver à un consensus, sauf avec le club de la croisière, dont elle a claqué la porte en mai 2021 et avec lequel les relations « sont inexistantes », admet l’adjoint au tourisme.
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