La fusion nucléaire avance… Le tokamak West installé à Cadarache vient de battre le record mondial de durée de plasma. Il est parvenu à maintenir un plasma pendant plus de 22 minutes le 12 février 2025. Il bat ainsi le record précédent de 25% obtenu par le tokamak chinois East il y a quelques semaines.
Le défi scientifique et technologique nécessite notamment de maintenir le mélange de deutérium et de tritium à une température de 100 millions de degrés dans un réacteur, le tokamak (une « invention » russe des années cinquante). « West a franchi une étape technologique importante en maintenant un plasma d’hydrogène pendant plus de vingt minutes grâce à l’injection de 2 MW de puissance de chauffage. Les expériences vont se poursuivre en augmentant cette puissance. Cet excellent résultat permet à West et à la communauté française de se positionner au premier plan pour préparer l’exploitation d’Iter », commente Anne-Isabelle Etienvre, directrice de la recherche fondamentale au CEA (Centre de l’énergie atomique) dans un communiqué (voir la vidéo plus bas).
Fusion nucléaire : un banc d’essai pour Iter
West est une évolution du tokamak Tore Supra, au CEA Cadarache. West signifie Tungsten (W) Environment in Steady-state Tokamak. Cette installation réunit l’ensemble des moyens techniques permettant de réaliser des plasmas de longue durée et devient ainsi un véritable banc d’essai pour Iter.
Dans les prochains mois, l’équipe de West compte prolonger ses efforts, en atteignant de très longue durée de plasma, de l’ordre de plusieurs heures cumulées, mais aussi en chauffant ce plasma à encore plus haute température pour se rapprocher au mieux des conditions attendues dans les plasmas de fusion.
West est une installation du CEA, qui bénéficie de longues années d’expérience. C’est fin 2017 que West a rejoint la famille des tokamaks en réalisant son premier plasma. L’installation, qui accueille des chercheurs du monde entier, fait partie d’un effort international aux côtés d’autres d’expériences majeures auxquelles les chercheurs du CEA participent comme Jet, le tokamak européen basé au Royaume-Uni (arrêté fin 2023) qui détient le record d’énergie de fusion, JT-60SA au Japon, East en Chine et KSTAR en Corée du Sud, sans compter la machine phare qu’est Iter dans ce domaine de la fusion nucléaire.
A quand un bilan énergétique positif ?
La durée et la stabilisation du plasma sont des enjeux clefs pour vérifier l’hypothèse Iter de reproduire l’énergie du soleil. Le deuxième enjeu est celui de la production positive d’énergie : pour l’instant, lors de ces expériences, l’énergie produite par les réactions de fusion reste supérieure à l’énergie consommée pour maintenir le plasma en conditions. Les chercheurs scrutent le bilan énergétique mesuré par le facteur « Q », qui correspond au quotient de l’énergie libérée par la fusion, divisée par l’énergie consommée.
Pour l’heure, l’équipe de Cadarache est passée en tête pour la durée de maintien du plasma. Nul doute que les équipes chinoises travaillent à relever ce défi. Cette saine compétition scientifique Est contre West, enrichira comme c’est prévu les expériences Iter qui se fédèrent dans un consortium international réunissant la Chine, la Russie et l’Europe, mais aussi l’Inde comme on l’a vu avec la visite du premier ministre Indien Narendra Modi à Saint-Paul-lez-Durance.
En savoir plus :
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