Candidat aux dernières élections régionales en Provence-Alpes-Côte d’Azur, Jean-Laurent Félizia (EELV) s’était qualifié au second tour avec sa liste du rassemblement écologique et social. Désireux, dans un premier temps, de maintenir sa proposition face au président sortant Renaud Muselier (ex-LR) et à Thierry Mariani (RN), le paysagiste varois s’était finalement retiré au nom du front républicain, notamment suite à des pressions de sa propre famille politique. Toujours conseiller municipal d’opposition au Lavandou (83), et co-secrétaire régional d’EELV, Jean-Laurent Félizia coordonne depuis juillet dernier le comité représentatif de la gauche et des écologistes à la Région Sud.
Jean-Laurent Félizia retire sa candidature au second tour des régionales le 21 juin 2021 (crédit : Rémi Liogier)
Comme l’a révélé Marsactu début février, l’élu varois veut candidater dans la cinquième circonscription des Bouches-du-Rhône (Marseille 4e, une partie du 5e et du 6e), actuellement détenue par Cathy Racon-Bouzon. Malgré des accusations de parachutage, notamment internes à son parti, il sollicite l’investiture d’EELV. S’il reconnaît l’aspect stratégique de sa démarche, le chef d’entreprise varois estime dans son plaidoyer ne pas être victime du « syndrome Mélenchon », comme le lui reproche Fabien Perez, l’adjoint au maire de Marseille en charge des fonds européens. Les instances nationales EELV dévoileront à la mi-mars la liste officielle des candidats investis par le parti.
Pourquoi souhaitez-vous être candidat EELV à la députation ?
Jean-Laurent Félizia : J’estime ne pas être une personnalité politique de l’écologie en France, mais j’ai un parcours qui me permet aujourd’hui d’envisager des fonctions externes. Non pas parce que je le mérite, mais parce que j’ai une expérience en matière de stratégies électorales et de dossiers. Une expérience qui me donne, peut-être pas une légitimité, mais au moins une véritable mission de porter ces dossiers à l’Assemblée nationale.
Pourquoi candidater dans la cinquième circonscription des Bouches-du-Rhône, à Marseille, vous l’élu varois ?
Que j’ai des ambitions ? Oui. Elles sont nourries par un travail de militant sur le terrain depuis plus de dix ans
Jean-Laurent Felizia
JL. F : Mon entreprise Mouvement et paysages travaille aussi sur Marseille. C’est elle qui s’occupe des jardins du Mucem ou des jardins des Terrasses du port. Est-ce que pour autant je critiquerais quelqu’un originaire des Bouches-du-Rhône, et qui viendrait dans le Var parce que son activité professionnelle s’y joue aussi ? Cela me fait penser à une forme de sectarisme. « Chacun chez soi et on se retrouve à l’Assemblée nationale ». Bon. Qu’est-ce que je peux rajouter de plus ? Que j’ai des ambitions ? Oui. Elles sont nourries par un travail de militant sur le terrain depuis plus de dix ans, sur des sujets que j’ai défendus. Que ce soit la loi littoral, l’agriculture biologique, l’économie sociale et solidaire, les 32 heures… Ce sont des sujets qui me préoccupent aussi bien sur le plan national que régional ou local.
Est-ce que votre parti n’a pas plus d’intérêts à présenter un candidat qui connaît bien Marseille et ses enjeux ?
JL. F : Est-ce qu’il s’agit de connaître Marseille, ou est-ce qu’il s’agit de défendre les intérêts de l’écologie politique à l’Assemblée nationale ? C’est la question que je me pose aujourd’hui. Après, je ne veux pas anticiper ce que pourront en penser les Marseillaises et les Marseillais. Demain, si je suis député à l’Assemblée nationale, j’aurais évidemment une attache en circonscription, mais je ne vais pas défendre des dossiers marseillais. Je vais défendre la souveraineté alimentaire, l’agriculture biologique, les projets liés à l’énergie, le photovoltaïque, la biomasse, l’éolien offshore etc.
Les élus écolos marseillais pas convaincus
Contacté par la rédaction, les élus marseillais Sébastien Barles (EELV) et Hervé Menchon (EELV) ne saluent pas vraiment la démarche de Jean-Laurent Félizia. « La politique doit tirer parti de la constance plutôt que de tirer parti des circonstances », considère l’adjoint à la mer et au littoral. Hervé Menchon estime par ailleurs que « Marseille (…) ne manque pas de ressources locales et de candidatures de qualité en “circuit-court” ». De son côté, Sébastien Barles a l’impression qu’on « remet de l’huile sur le feu » avec cette affaire. Au sortir d’une campagne régionale riches en tensions internes pour les Verts, l’adjoint marseillais à la transition écologique souhaite avant tout « éviter les remous au sein du mouvement ».
Plusieurs élus locaux, dont certains sont issus de votre propre famille politique, vous accusent de parachutage. Qu’en pensez-vous ?
J-L. F. : Ce n’est pas un parachutage. Certains l’entendent comme cela. Mais dans les grandes villes, la plupart du temps, on ne candidate pas forcément parce qu’on a une attache avec le terrain. Je le fais aussi pour essayer de faire vaincre mon parti politique à l’Assemblée nationale, avec un poste de député en plus. Je rappelle qu’en juin 2021, la liste que je conduisais, notamment dans ce secteur marseillais, à capitaliser un score qui n’étais pas des moindres. Je suis là pour appuyer une politique globale qui se joue aujourd’hui à Marseille, et qui appartient à la gauche et aux écologistes.
On vous reproche également d’utiliser Marseille comme une passerelle vers l’Assemblée nationale.
J-L. F. : D’autres l’on fait. Y compris ceux qui me critiquent aujourd’hui. Je ne citerai pas de nom. Mais en 2012, lorsqu’il y a eu des accords entre le Parti socialiste (PS) et Europe écologie les verts (EELV), certains se sont auto-proclamés candidats et ont été députés dans des circonscriptions pour lesquelles ils n’avaient pas forcément d’attache.
Depuis plus de dix ans à Europe écologie les verts, je suis loyal et je respecte les principes régaliens de ce parti.
Jean-Laurent Félizia
Est-ce à dire que les circonscriptions varoises sont “bouchées” ?
J-L. F : Il y a une volonté de gagner, je ne vais pas le nier. Ce n’est pas un crime de lèse-majesté. Vous savez, j’ai concouru deux fois aux législatives dans le Var, dans la quatrième (ndlr : celle du Lavandou). En 2012, c’était une circonscription réservée et nous avons loupé le coche de 153 voix (…). En 2017, c’était la Bérézina pour la plupart des candidats de l’écologie*. Mon score (11%) a été à la hauteur de ces enjeux au moment où Emmanuel Macron redistribuait les cartes. Je le dis, aujourd’hui, il y a effectivement une capitalisation de ma candidature aux régionales. Elle se poursuit sans être arrogante. Elle est très humble. Portée par cette envie de montrer que ce rassemblement peut avoir lieu au delà du pôle écologiste. Je rappelle que Génération.s et Génération écologie participent aussi à cet échiquier de distribution de clés, et de répartition des candidatures pour juin prochain.
Serez-vous candidat si vous n’obtenez pas l’investiture EELV ?
J-L. F : Pas du tout. Depuis plus de dix ans à Europe écologie les verts, je suis loyal et je respecte les principes régaliens de ce parti. Même quand ceux-là ne me plaisaient pas. Même quand les candidats qu’il fallait soutenir, issus d’un choix démocratique, n’étaient pas forcément ceux que j’avais soutenus, j’étais derrière ces candidats. En tant que co-secrétaire régional, mon ADN politique me fera renoncer à toute candidature si elle n’était pas investie par mon parti. Et ce ne sera pas une défaite pour moi, ce sera le choix.
* Sereine Mauborgne (LREM) élue en 2017 dans la 4e circonscription du Var
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