Et si la lumière nous apportait la connaissance ? C’est en tout cas le pari inédit du musée Granet d’Aix-en-Provence qui a choisi d’intégrer la Lifi à son arsenal muséographique. Cela permettra notamment à son public en situation de handicap d’accéder à des contenus inédits, simplement en se déplaçant le long des oeuvres éclairées par des lumières équipées de la technologie Lifi. « Avoir des points lumineux vers lesquels on doit converger pour obtenir des informations me parait être symbolique» explique le conservateur du musée Bruno Ely. Les premiers essais, prévus fin octobre, ont dû être reportés en raison du confinement national décrété par le gouvernement.
Vous avez dit Lifi ? Petit éclairage :
La Lifi, de son nom complet Light Fidelity, est une technologie qui permet de transmettre des données à travers des rayons lumineux. Des diode électro-lumineuses (LED) changent d’intensité lumineuse et envoient ainsi un signal à des capteurs qui peuvent recevoir des données ou même accéder à internet. Une sorte de code morse invisible à l’œil nu, mais que des capteurs spécifiques parviennent à percevoir.
Pour un premier test, une dizaine de tablettes seront mises à la disposition du public du musée à sa réouverture. Il suffira alors au visiteur équipé de pointer l’appareil photo de la tablette sur une source lumineuse pour capter les contenus adaptés mis à sa disposition. L’expérimentation permettra d’optimiser le fonctionnement sur ces tablettes, avant d’ouvrir à l’utilisation sur smartphones. « On est sur une technologie qui permet d’utiliser 70% des téléphones personnels, car le déclenchement passe par l’appareil photo » explique Bastien Portelli, chargé de projets numériques au musée Granet. Les documents audiovisuels sont accessibles depuis une application développée pour l’occasion.
Une technologie à haut potentiel
Pour l’instant, les contenus hébergés par l’application sont des contenus audiovisuels “classiques” : vidéos, textes, audios, mais les possibilités sont nombreuses. « Le prestataire est en train de travailler sur de la réalité augmentée». Peut-être l’occasion de voir les peintures s’animer, les informations s’afficher en superposition aux oeuvres, à travers l’écran de son téléphone. Cela reste toutefois de l’ordre de l’hypothétique pour le moment. La priorité reste l’accessibilité aux publics handicapés.
Les nouveaux contenus ont été créés en collaboration avec l’IMFP (Institut musical de formation professionnelle). Ils visent à apporter des informations spécifiques au public en situation de handicap, comme des vidéos, traduites en langue des signes. L’objectif est de donner un maximum d’autonomie au visiteur. «Il y a une demande forte qui émane des personnes touchées par le handicap : ils veulent juste pouvoir être accueillis comme les autres dans le musée » rappelle Bastien Portelli. «C’était déjà le cas des malentendants, avec des dispositifs adaptés aux appareils auditifs. » Une ambition partagée par Marc Devouge, administrateur national chargé de la région Provence Alpes Côte d’Azur-Corse de la Mutuelle Générale de l’Education Nationale : « C’est l’occasion pour le musée de varier ses publics. Habituellement on est plutôt sur un public traditionnel, plutôt âgé. » Il a signé au nom de la MGEN une convention de mécénat le 14 octobre avec la mairie d’Aix-en-Provence, pour soutenir le développement de cette nouvelle technologie. Pour l’ambitieuse équipe du musée, c’était l’occasion d’aller «plus vite et plus loin, offrir plus de propositions.»
Derniers réglages avant d’entrer en scène
L’équipe du musée Granet et ses fournisseurs doivent encore adapter l’intensité de la lumière pour qu’elle puisse transmettre des données sans perdre ses qualités esthétiques. «On aimerait que ça devienne presque un élément de muséographie, tout en étant fiable et capable de répondre à des problématiques liées au handicap.». Contrairement au panneau explicatif qui vient briser l’immersion dans l’oeuvre, l’information acheminée par la lumière n’est pas intrusive. Son caractère diffus limite aussi les problèmes liés à l’utilisation des QR Codes : «Pas besoin de gros déplacements, de gestes malheureux qui risqueraient de mettre en péril les oeuvres.» Des oeuvres qui souffrent déjà bien assez de la fermeture des musées qui les accueillent. «Notre société est en péril. La culture c’est son fondement même. A notre petit niveau, on essaie au maximum de s’armer à proposer des projets. Dans les période de crise, il faut que la culture soit présente, encore plus que d’habitude » souligne Bruno Ely.
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