Début 2019, la Métropole Aix-Marseille a lancé une étude sur la création d’un service public de fret ferroviaire. Les résultats de ces travaux viennent d’être dévoilés et chiffrent à 105 millions d’euros les investissements nécessaires à son lancement. L’institution compte notamment sur le plan de relance pour le financer.
Chaque jour, plus de 10 000 poids lourds sillonnent les routes du département pour livrer des marchandises. Ce trafic génère des encombrements sur un réseau déjà saturé et une pollution importante sur la qualité de l’air. Pour réduire cet impact, la puissance publique réfléchit à développer le fret ferroviaire aujourd’hui sous-exploité. En France, il ne représente que 10% de parts de marché contre 18% en Allemagne ou encore 30% en Autriche. Les marges de progression sont donc fortes et la Métropole Aix-Marseille a lancé une étude de faisabilité pour la création d’un service public du fret ferroviaire dont les résultats ont été présentés lors du dernier conseil communautaire.
Un service centré sur la logistique urbaine
La loi permet depuis 2016 à la Métropole, en tant qu’autorité organisatrice des transports, de créer un service public de transport des marchandises si l’offre privée est insuffisante et si elle permet de réduire la congestion et la pollution. Sur le premier point, l’étude de faisabilité présentée en conseil métropolitain estime « l’offre relativement faible et le marché peu adaptée ». Sur les lignes intérieures, il n’existe que deux offres opérées par des entreprises ferroviaires : le transport de bauxite entre Fos et l’usine Alteo de Gardanne et le transport de brouettage de wagons sur la zone industrialo-portuaire de Fos. Et deux autres liaisons partent des gares de Miramas et Graveleau pour relier des sites en dehors du territoire. « Le service public envisagé ne proposera pas de lignes là où le marché assure déjà des services. Il se positionnera sur des champs spécifiques comme la logistique urbaine », précise l’étude.
Le conseiller métropolitain et adjoint communiste au maire de Martigues, Gérard Frau, craint d’ailleurs « qu’il ne soit au final qu’un concurrent à la SNCF ». Le fret ferroviaire apparaît comme une solution intéressante pour desservir les cœurs de ville, comme Marseille qui doit dans l’année 2021 mettre en place sa zone à faible émissions mettant hors-jeu une bonne partie des poids lourds de marchandises. « Ce projet porte beaucoup d’espoir et arrive à point nommé avec cette nouvelle expérimentation », commente la présidente de la Métropole Martine Vassal au conseil.
Sur la partie environnementale, l’étude de faisabilité estime que ce service public de fret ferroviaire permettra d’éviter jusqu’à 330 poids lourds quotidiens principalement sur l’ouest du territoire et sur l’accès Nord de Marseille, soit un gain de 4 200 tonnes de CO2 par an. « Sur toute la durée de vie du projet, c’est plus de 100 millions d’euros d’externalités négatives qui seront économisés », indique le document. Cet argument tend à justifier les investissements nécessaires pour la création de ce nouveau service public évalués à 105 millions d’euros.
Un nouvel espoir pour la gare de Miramas
Pour mettre en place ce nouveau service, la Métropole évoque un coût de 23 millions d’euros pour l’aménagement des sites clés que sont Mourepiane et Miramas. « Ce nouveau service public de fert ferroviaire pourra pleinement contribuer à la relance de l’activité sur la gare de triage de Miramas », affirme Henri Pons, le vice-président à la mobilité de la Métropole. Le maire d’Eyguières annonce d’ailleurs qu’il a récemment rencontré Frédéric Delorme, le président de SNCF Fret qui lui aurait assurer de « l’importance de cette gare, point d’entrée de tout le Sud-Est de la France » : « L’Etat travaille sur un projet de boucle de fret ferroviaire qui partirait de Miramas pour desservir l’Est, puis Paris, la Bretagne, le Pays Basque et revenir à Miramas », explique-t-il. Cette bonne nouvelle est confirmée par le maire de Miramas, Frédéric Vigouroux, qui se bat depuis plus de dix ans pour éviter la fermeture de cette gare qui emploie 200 personnes : « La SNCF a longtemps pensé arrêter le tri à la gravité réalisé à Miramas mais elle a bougé. Le groupe doit annoncer au plus tard tout début janvier un nouveau projet sur Miramas », confie-t-il à Gomet’. Suite à cette annonce, une table-ronde entre la Dreal, la SNCF, le Grand port maritime, la région, la métropole et les syndicats de salariés devrait être organisée à la préfecture. La SNCF a sur la table un projet de rénovation de la gare de triage à 16 millions d’euros. « C’est l’un des dossiers que l’on compte présenter à l’Etat dans le cadre des appels à projets du plan de relance », a annoncé Martine Vassal lors du conseil métropolitain. Mais « la gare de triage Miramas est un projet parallèle au lancement du service public de fret ferroviaire », prévient Frédéric Vigouroux.
La RDT 13 opérateur tout désigné
Pour le service public de fret ferroviaire, le coût le plus important sera à imputer à l’achat de nouveaux matériels, environ 82 millions d’euros. L’étude de faisabilité pointe plusieurs sources de financements possibles : Le pacte vert de l’Europe, le plan de relance du fret ferroviaire de 120 millions d’euros de l’Etat, la Région ou encore le Département. « Nous participerons évidemment à ce projet qui permettra de réduire l’impact du transport routier », annonce Martine Vassal qui préside également le Département. Les services de la Métropole travaillent désormais avec la Caisse des dépôts pour identifier le meilleur outil juridique pour porter ce projet. Pour Frédéric Vigouroux, l’opérateur est tout trouvé : « C’est la régie métropolitaine des transports, ex-RDT 13. Elle est en bonne santé financière et réalise déjà du transport ferroviaire. C’est la meilleure solution », assure-t-il. La Métropole Aix-Marseille Provence est la seule de France à disposer d’une régie de fret ferroviaire, « il faut s’appuyer sur cet atout », insiste le maire de Miramas. « Le plan de financement de la RDT 13 est prêt. Ne manque plus que la position de l’Etat et la SNCF », affirme-t-il. Il soutient donc pleinement ce projet qui « est complémentaire avec la réalisation de la plateforme Clésud 2 pour mettre les camions sur les trains ». Il compte beaucoup sur le développement de cette activité pour redynamiser l’économie de sa ville. « La Métropole a racheté les terrains d’Areva, qui sont collés à la gare. Ils pourront accueillir la création d’un réseau pour la maintenance et le stationnement des trains », explique-t-il. Cette surface lui laisse entrevoir de multiples possibilités. Ainsi, il lance l’idée de la création d’une école de formation sur les métiers du fret sur le site. « On en est au tout début mais c’est en discussion ».
Liens utiles :
> [Transports] Coppola (PCF) : « Il y a une volonté de saboter le fret ferroviaire»
> L’actualité des transports dans notre rubrique dédiée.