Le PDG de CMA CGM, Rodolphe Saadé, était l’une des personnalités invitées du dernier Forum des entrepreneurs, organisé par l’UPE 13, qui se déroulait vendredi 9 septembre. Interrogé par la journaliste Raphaëlle Duchemin, sur le plateau dressé sur la pelouse de l’Orange Vélodrome, il est revenu sur quelques sujets au coeur de l’actualité dont la polémique sur les super-profits.
Au détour d’une question sur le fonds énergie et l’engagement de CMA CGM en matière de développement, Rodolphe Saadé affirme qu’il « consacre beaucoup de temps à tout ce qui relève de la durabilité et la protection de l’environnement. Nous avons crée ce fonds énergie (lire par ailleurs) qui va notamment permettre d’investir dans la recherche pour devenir carbone zéro en 2050. C’est l’engagement que j’ai pris. Je ne pense que l’on puisse dire que les transporteurs maritimes sont des pollueurs. Evidemment ce n’est jamais assez, mais on prend toutes les mesures fortes pour arriver à notre objectif de 2050. Le fonds énergie va nous permettre d’établir une feuille de route à cet horizon. »
Des super-profits qui servent surtout à investir
Autre sujet chaud, les super-profits engagés par des grands groupes comme CMA CGM pendant la crise. Rodolphe Saadé commence par s’interroger. « Depuis quand une entreprise est censée perdre de l’argent ? Une entreprise n’est-elle pas là pour faire des résultats, investir, se développer, recruter du personnel, bien traiter ses collaborateurs ? » Et de poursuivre : « C’est vrai que le groupe CMA CGM et l’ensemble du transport maritime bénéficient depuis le début du covid d’une période exceptionnelle avec des tarifs de fret qui sont très hauts parce que la demande a été excessive. Et donc nous avons enregistré en 2021 des résultats qui sont très bons et également en 2022. La tendance est à la baisse depuis quelques semaines où l’on voit moins de volume à transporter et des tarifs qui continuent à se réduire. »
Pour le patron de CMA CGM qui détient avec sa famille environ 70% du groupe (les autres actionnaires sont le groupe turc Yildirim avec 24% des parts et la banque publique Bpifrance (6%). « L’essentiel quand on parle de « super-profits » c’est de savoir qu’est-ce que l’on fait de ces bénéfices ? Et le groupe CMA CGM a toujours décidé depuis sa création de reverser 90% de ses bénéfices dans l’entreprise en investissant. Si le groupe ne réalisait pas ces bénéfices actuels on aurait pas investi dans un fonds énergie, on aurait peut être pas acheté toutes les sociétés que nous avons acheté dernièrement, on aurait reculé. Donc quand on critique les super-profits, il faut essayer de comprendre qu’est-ce que l’on fait de ces super-profits. »
La Bourse ou la vie…
Au passage, Rodolphe Saadé continue de considérer la mise en bourse de son groupe comme une mauvaise idée. Il évoque ainsi les contraintes d’une société cotée avec avec « des conseils d’administration où l’on va vous apprendre à faire votre métier. » Aujourd’hui, il se félicite au contraire d’avoir « des discussions ouvertes qui permettent d’accéder et de se développer plus rapidement ». Il souligne également la spécificité de l’activité de son groupe, mal adapté au « court-termisme » des marchés. « Je ne dis pas que la bourse n’est pas bonne mais je dis que pour un groupe de transports maritime et de logistique dont l’activité est très cyclique, être coté en Bourse peut devenir rapidement un handicap. »
Attractivité : jouer collectif pour attirer des grands groupes
Enfin, comme il le manifeste souvent, le dirigeant se présente comme un fervent défenseur du territoire qu’il invite à être plus ambitieux. « J’ai beaucoup entendu parler lors du dîner d’hier soir de « jeu collectif ». Une fois qu’on l’a dit, ça ne va pas suffire. Il faut qu’on le mette en pratique. Ce qui manque à Marseille, c’est la présence de grands groupes comme nous ou plus petits. Il faut essayer d’attirer des sociétés qui ne pensent pas nécessairement à Marseille pour établir un siège. Elles sont plutôt du côté de Paris. Je pense que maintenant c’est à nous de leur montrer que Marseille peut être attractive. Marseille peut offrir des solutions à des entreprises qui souhaitent venir. Et de conclure : « Il y a déjà pas mal de start-up qui s’installent ici et à Aix. C’est très bien. Mais maintenant il faut essayer d’aller encore plus loin. »
(Avec Rémi Liogier)
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Métroscopie : Rodolphe Saadé, personnalité de l’année 2022