A l’occasion du salon Entrepreneurs 13 qui se déroule jeudi 14 décembre au Palais du Pharo, Corinne Innesti, la présidente de la Cpme 13 qui organise l’événement, a répondu aux questions de Gomet’. Tour d’horizon de l’événement et de son mandat.
Quelles sont vos priorités aujourd’hui à la tête de la Cpme 13 ?
C. I. : Nous avons envie de donner encore plus de poids à la Cpme 13. Dans le Sud, il n’y a que deux CPME indépendantes, dans les Bouches-du-Rhône et le Vaucluse. Les autres sont en union patronale. Ici, nous gagnons de l’espace et des adhérents chaque année. Notre but est d’accroître encore notre présence dans les différentes instances comme on vient de le faire dans Sud Place financière par exemple. On va continuer à instaurer la légitimité de la représentativité des TPE PME qui représentent 98% du tissu des entreprises. On va donc poursuivre notre travail de défense de ces TPE PME et aussi de les accompagner. Ces entreprises ont besoin de services, elles ont besoin de se sentir soutenues quand elles ont des difficultés. Nous avons gagné en visibilité et en reconnaissance. Nous sommes relativement confiants pour la suite de notre développement.
Cette volonté n’entraîne-t-elle pas un éparpillement de la voix des acteurs économiques ?
C. I. : Je ne sais pas si on parvient mieux à l’entente dans les départements où l’union est de mise. Est-ce que finalement on ne va pas faire pencher la balance du côté des grosses entreprises et du Medef qui sont peut-être prépondérants ? Moi je pense que lorsque l’on distingue bien les choses et la nature des difficultés et des besoins, car la situation est différente entre les grandes entreprises et les petites, on se fait mieux entendre. C’est mon point de vue. Je pense que l’on peut travailler ensemble même si l’on représente des particularités des entreprises du territoire, surtout sur des sujets qui sont communs. Je suis très ouverte et je ne demande que ça. On a travaillé ensemble lorsqu’il a fallu partir pour les élections à la chambre. Nous avons trouvé des synergies que nous continuons à produire.
Vous pensez à un nouveau mandat ?
C. I. : J’ai été élue en 2021 pour un mandat de trois ans. Normalement il y a de nouvelles élections en 2024. Pour l’instant j’ai envie de continuer. Ce n’est pas un scoop !
Vous avez aussi abordé de nouveaux thèmes de travail
C. I. : Oui nous avons créé six nouvelles commissions de travail dont nous sommes particulièrement fiers à commencer par celle consacrée à la santé du dirigeant. Nous sommes la première organisation patronale à avoir pensé à cette thématique que nous aborderons lors du salon Entrepreneurs 13 du 14 décembre mais que nous traitons aussi tout au long de l’année avec des ateliers. Nous avions déjà une commission juridique et une commission jeunes. Nous venons de nous lancer sur la transmission d’entreprises et nous avons également lancé cette année une commission digitale en partenariat avec Medinsoft avec qui nous mettons nos forces en commun. Tout cela étoffe nos services.
Combien la Cpme 13 regroupe d’adhérents ?
C. I. : Nous arrivons à 10 000 lorsque l’on intègre notamment les fédérations comme celle de la propreté, de l’ameublement ou encore de l’habillement et l’Umih (Union des métiers et des industries de l’hôtellerie).
Concernant les besoins des PME, quels sont les sujets de préoccupations aujourd’hui ?
C. I. : Le problème récurrent sur lequel nous sommes régulièrement alertés demeure les problèmes de trésorerie, accentué par les retards de paiement des clients. Environ 30% des entreprises constatent un énorme retard dans l’encaissement des encours, que ce soit avec des secteurs privés comme avec les collectivités. Tout récemment, et c’est de pair, on ressent le contre-coup de la crise, avec une baisse de fréquentation. A l’approche des fêtes, après une période d’accalmie, les commerces du centre-ville de Marseille accusent une baisse de 15% à 20% de leur activité, nous dit-on. Le centre-ville de Marseille a perdu de son attractivité. Il y a aussi les problèmes, récurrents depuis au moins deux ans, de recrutements. C’est de plus en plus difficile de trouver les bons profils et de les fidéliser. Certains sujets font peur comme la menace de paiement des congès payés lors des arrêts maladie. C’est un combat national et local. Car une très petite entreprise ne peut pas supporter le risque d’un coût de paiements de congès payés pour une personne en arrêt maladie. On a parlé d’un historique de trois ans, voire de neuf ans ! Enfin, nous avons toujours des préoccupations concernant les procédures administratives qui se sont alourdies d’année en année. Nous sommes mobilisés pour demander de la simplification. D’ailleurs nous avons été un peu entendus et nous sommes contents. La Première ministre a répondu à notre demande de faire d’abord un test “comptabilité TPE PME” lorsque l’on met en application des projets de loi afin de bien mesurer si ce n’est pas trop lourd.
Vous avez des exemples de complexification ?
C. I. : Il y a toutes les démarches et formalités auprès de l’INPI. Cela génère des retards pour les clients et nous avons bug sur bug. Il y a des difficultés aussi liés aux permis dans le du bâtiment. Ce sont des éléments qui se cumulent et qui éloignent le dirigeant de la production. On passe beaucoup trop de temps dans l’administratif.
Parlez-nous un peu du salon Entrepreneur 13 qui se déroule jeudi 14 décembre au Pharo ?
C. I. : C’est un événement incontournable. Il se déroule à un moment opportun en fin d’année où l’on prend le temps de souffler un peu et de se rencontrer. On va tous se retrouver avec une multitude de propositions : des ateliers qui vont permettre de se former, de disposer d’informations, de créer du lien. Le thème général est bien aligné : “Ensemble manageons l’avenir“. Nous sommes partis du constat que les chefs d’entreprise avaient non seulement des collaborateurs mais aussi tout autour un ensemble d’acteurs comme les institutions et les collectivités mais aussi les étudiants, les écoles.
Entrepreneur 13 : un espace dédié aux acteurs de l’accompagnement à l’entrepreneuriat
Quel est le programme ?
C. I. : Il y aura une plénière avec l’économiste Nicolas Bouzou qui va nous parler du bilan de l’année et surtout de prospective. Nos vice-présidents commerce, artisanat, services, industrie prendront la parole pour donner un regard précis. Après, nous avons voulu montrer le savoir-faire des TPE-PME que nous présenterons dans des carrés thématiques sur la santé, l’artisanat, les nouvelles technologies, la transition écologique et l’environnement avec la Région Sud qui est un partenaire important de notre événement. Nouveauté cette année : un espace dédié aux acteurs de l’accompagnement à l’entrepreneuriat avec un parcours pour les créateurs animé par la Bpifrance qui a initié ce programme avec la CPME. Nous sommes très fiers de ce parcours car c’est bien d’avoir des idées mais il faut être conscient que le chemin pour créer son entreprise peut être semé d’embûches. Il faut savoir comment éviter certains pièges si l’on veut rendre pérenne une entreprise. Par la suite, on sera régulièrement en présentation et en force de propositions sur ce sujet. Nous avons 150 stands environ et nous attendons plus de 2000 visiteurs. Le déjeunerest déjà complet avec 400 personnes.
Le projet de transfert de la cité judiciaire du centre-ville de Marseille vers le périmètre d’Euroméditerranée a été acté par le ministre de la Justice. Que comptez-vous faire ?
C. I. : On se dit que soit c’est définitif, ce que l’on ne croit pas, soit il faut se mobiliser fortement. On se demande si les études ont bien été faites en rapport de coûts entre ce que cela coûterait réellement si l’on aménageait les espaces en centre-ville; et si l’on compare bien avec la perte qu’un transfert va générer dans le centre-ville. On ne croit pas trop à la compensation évoquée. Aujourd’hui, j’ai compris que le dossier pouvait encore évolué même si je n’ai pas de preuves. Jean-Luc Chauvin, le président de la CCI Aix-Marseille Provence est très mobilisé. On voudrait réaliser des études qui pourraient être faire changer d’avis le ministère. Mais au-delà de la décision finale, qui ne dépend pas de nous, on va demander comment on peut tolérer qu’un centre-ville soit vidé de ses avocats et de toutes les personnes qui gravitent au sein et autour de la cité judiciaire. Comment va-t-on le compenser ? On nous a parle de trois écoles mais est-ce que cela peut vraiment remplacer tout ce qu’il y a comme activité aujourd’hui. Cela ne nous paraît pas significatif, sans parler que beaucoup de professionnels de la justice ne veulent pas partir.
Centre-ville : « On ne va pas tolérer le laxisme de la non décision »
Vous allez prendre des initiatives ?
C. I. : Oui nous travaillons avec Jean-Luc Chauvin pour de nouvelles études pour montrer que le transfert va coûter plus cher. On va l’accompagner. Ensuite, nous sommes mobilisés sur la sécurité et la paupérisation du centre-ville, l’attractivité. Nous avons des idées. Ce sera un sujet si malheureusement aucune action n’est prise. On ne va pas tolérer le laxisme de la non décision.
En dehors de Marseille, est-ce qu’il y a des sujets de préoccupations dans les autres villes ?
C. I. : Ce sont un peu tous les mêmes : les problèmes de transports, de logements. je peux vous dire que le numéro d’appel que nous avons créé Allo Cpme 13 regorge d’appels avec des questions très diverses. Je veux être dans la proximité. Je veux que les chefs d’entreprises comprennent qu’avec la CPME, s’ils ont une difficulté, que ce soit, avec l’Urssaf, les impôts, les banques… on va les aider. Plus on va être proches des entreprises, plus on va leur apporter des solutions et nous remplirons notre rôle de défense, d’accompagnement et de représentation.
Concernant le remboursement du PGE, tout se passe bien ?
C. I. : Beaucoup d’entreprises ont réussi à les honorer. Tant mieux. Beaucoup d’autres font encore l’effort. Celles qui n’y arrivaient pas ont eu la possibilité de reporter sur la durée. Mais nous regrettons que cela soit au prix d’une mention sur le kbis avec une inscription au greffe. C’est un peu dommage. C’est un frein. Quand le PGE a été mis en place, c’est à cause de la crise sanitaire, il ne faut pas l’oublier, afin que personne ne soit laissé au bord de la route. Sauf que la CPME l’avait dit dès le premier jour, et la Cpme 13 a été très active pour faire remonter le message à Paris : le délai de remboursement de six ans était, selon les montants, trop court. Nous sommes en train d’approcher, voire de dépasser le niveau 2019 de faillite. Une partie est due à ces entreprises qui n’auraient pas pu durer s’il n’y avait pas eu ces aides. C’est évident. Et d’autres, au lieu de demander un redressement judiciaire qui permettait de demander un étalement de la dette globale sur huit ans, ont préféré par lassitude déposer le bilan. Il y a eu quelques liquidations directes de ce type.
Pour finir, sur les enjeux de transition écologique, comment traitez-vous le sujet à la CPME ?
C.I. : Cette thématique de la RSE et de la transition écologique sera traitée au sein de l’un des “carrés” d’Entrepreneur 13. Mais la problématique est compliquée dans les entreprises. Elles ont conscience qu’il y a la nécessité de franchir ce cap. Mais cela va entraîner obligatoirement des coûts avant que cela soit rentabilisé. Il faut du temps. Or la plupart des chefs d’entreprises sont la tête dans le guidon. et beaucoup cherche uniquement à survivre. Je pense que dans les toutes petites entreprises, malheureusement, le changement ne sera pas rapide. Il y a des convaincus. Mais pour autant la majorité sait qu’elle ne pourra pas opérer le virage tout de suite.