Lors d’une réunion avec les élus du comité social et économique central lundi 8 juillet, le sidérurgiste ArcelorMittal a annoncé « qu’en raison de la baisse de la consommation européenne, de l’augmentation des importations d’acier et des coûts de production élevés liés aux droits CO2, le site de Fos-sur-Mer continuera à fonctionner avec un seul haut-fourneau de manière durable ».
Pour le moment, le groupe n’envisage pas de modifier ses effectifs. Depuis début 2024, « le site a recours à de l’activité partielle à hauteur de deux jours par mois pour toutes les catégories de personnel. Nous en avons encore besoin ! Une étude plus précise va être engagée afin de définir les adaptations nécessaires d’un point de vue de l’organisation. Ce point fera l’objet d’une consultation avec les instances représentatives du personnel », relate un porte-parole d’ArcelorMittal Méditerranée.
[Industrie] ArcelorMittal met temporairement à l’arrêt un de ses hauts fourneaux à Fos-sur-Mer
Fos-sur-Mer est l’une des deux usines du groupe en France équipées de hauts-fourneaux, l’autre étant située à Dunkerque (Nord). Le site de Fos-sur-Mer emploie 2 500 salariés et 1 500 sous-traitants sur une zone de 1 600 hectares. Elle possède deux hauts-fourneaux, chacun capable de produire deux millions de tonnes de fonte par an. ArcelorMittal envisage à l’avenir de produire 2,5 millions de tonnes de fonte par an avec un seul haut-fourneau. Ainsi, « en 2026, le haut-fourneau 1 remplacera le haut-fourneau 2 après sa réfection et tous les outils de production s’adapteront à ce nouveau fonctionnement. »
L’industriel avait déjà procédé à l’arrêt temporaire de l’un des deux hauts-fourneaux en raison de la baisse de la demande d’acier et de la hausse des coûts de l’énergie en novembre 2022. Cette fermeture avait été accompagnée de mesures de chômage partiel pour adapter le temps de travail d’une partie du personnel, avec une réduction maximale d’un jour par semaine.
Les distorsions de concurrence pointées du doigt
Le haut-fourneau concerné avait été ensuite remis en service en avril 2023. Cependant, en octobre 2023, le haut-fourneau 1 a été mis temporairement à l’arrêt pour des raisons techniques et l’opération de maintenance a été prolongée « jusqu’à ce que la situation de marché permette un fonctionnement du site avec deux hauts-fourneaux ».
Le second sidérurgiste mondial justifie la décision de prolonger durablement l’arrêt du haut-fourneau 1 par une situation dans laquelle « l’Europe, qui était autrefois un exportateur net d’acier est désormais un importateur net, avec des importations représentant 25% à 40% du marché ». Il assure que les politiques de soutien massives des États-Unis et de la Chine créent une distorsion de concurrence, rendant difficile l’exportation depuis le site de Fos-sur-Mer. Selon le groupe, « majorés par le prix du carbone, les coûts de production restent trop élevés pour être concurrentiels face aux importations sur les marchés de l’Europe du sud ». De plus, en raison de ces mêmes facteurs, « il est devenu impossible pour le site d’exporter en dehors de l’Union européenne ».
Décarbonation de l’usine de Fos-sur-Mer
ArcelorMittal affirme que cette décision permettra de « protéger l’entreprise et préparer la décarbonation du site de Fos-sur-Mer, qui fonctionnera avec un seul haut-fourneau durant la transition ». En effet, le secteur industriel français a émis 17,5% des émissions nationales de gaz à effet de serre cette année, ce qui en fait un secteur clé pour l’atteinte des objectifs climat de la France, selon l’association Réseau action climat. En 2023, « 2,8% des émissions nationales de gaz à effet de serre proviennent des sites ArcelorMittal de Fos-sur-Mer, Dunkerque et Florange », dénonce l’association.
Une action militante symbolique pour dénoncer l’inaction environnementale d’ArcelorMittal à Fos-sur-Mer
France nature environnement et ses fédérations des Hauts-de-France et de Provence-Alpes-Côte d’Azur ont annoncé le 16 juillet dans un communiqué commun qu’elles répondent à l’appel de l’association internationale SteelWatch, qui organise le 23 juillet à 10h, sur la plage du Cavaou à Fos-sur-Mer, une action symbolique dénonçant « l’hypocrisie de la campagne de greenwashing d’Arcelor Mittal à l’occasion de Paris 2024 ». Les militants participeront ainsi à la campagne « Shiny claims, Dirty flames (flamme qui brille, promesses qui brulent) » devant un site emblématique d’Arcelor Mittal pour condamner « le mépris environnemental de ce sponsor officiel de Paris 2024, reconnu pour ses émissions élevées de CO2.»
À ce sujet, le mouvement France nature environnement rappelle que depuis 2009, « l’usine d’acier continue de libérer des substances cancérigènes telles que le benzène, les oxydes d’azote et de soufre. Malgré trois condamnations et deux amendes administratives, l’industriel peine à se conformer aux normes légales d’émission. » L’association a également porté plainte en mars 2023 et affirme que les mesures réalisées dans l’usine ont révélé « que les concentrations de poussières étaient supérieures de 10% à la limite autorisée pour la concentration moyenne journalière, tandis que les niveaux d’oxyde d’azote dépassaient de 110% les valeurs limites d’émission. »
Fos : ArcelorMittal étudie des recours contre son arrêt forcé
Le sidérurgiste précise quant à lui qu’il mène la première phase de son un projet de décarbonation du site de Fos-sur-Mer, « avec des résultats attendus dès 2025 grâce au démarrage du four à poches à l’aciérie (qui permet d’utiliser plus d’acier recyclé) ». Des études sont également en cours « pour un four à arc électrique d’ici 2030.»
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