Provence Studios commence à se faire une solide réputation dans le cinéma avec plusieurs belles productions. Portée par le plan d’investissement de l’Etat, l’entreprise multiplie les projets d’implantations sur le territoire, de l’Etang de Berre à Marseille pour assouvir ses ambitions.
Sous le soleil de Martigues, les studios de cinéma fondé par Olivier Marchetti accueille aujourd’hui les tournages de grosses productions américaines, de TF1 et des plateformes comme Netflix. « Nous étions au maximum de notre capacité l’an dernier », explique à Gomet’ Olivier Marchetti. Il prépare donc la suite avec des projets d’extension sur Marseille et autour de l’Etang de Berre.
Dans le triangle d’or du cinéma français
En septembre dernier, Emmanuel Macron met le cinéma au coeur de son plan Marseille en Grand : « C’est le moment d’investir dans les industries culturelles et créatives, dans le cinéma et dans l’audiovisuel. Et à Marseille, il y a la capacité de le faire, il y a les talents, il y a les studios, il y a l’envie et il y a des opportunités pour les jeunes », lance-t-il au Pharo. Au final, le gouvernement met sur la table 400 millions d’euros pour booster le cinéma dans France 2030, la suite du Plan de relance. Et Marseille tient une place prépondérante dans les ambitions présidentielles : « Aujourd’hui, on est suivi directement par l’Elysée », avance Olivier Marchetti. « Il y a un triangle d’or identifié par Paris qui va de Montpellier, Avignon à Marseille ». Provence Studios, à Martigues, se retrouve en plein centre et compte bien profiter de l’engouement de l’Etat.
A partir des bâtiments de logistique industrielle de son père, Olivier Marchetti a crée en 2014 le plus grand studio de cinéma français en terme d’espace avec 22 hectares de terrains, 26 000 mètres carrés de bâtiments et huit studios. Rapidement, il attire l’attention des sociétés de production. Provence Studios a accueilli les tournages de Taxi 5, Gaston Lagaffe, Overdrive et plus récemment Bac Nord, ou Titane (Palme d’Or à Cannes 2021). Mais surtout, il a convaincu des séries récurrentes de localiser la réalisation dans ses locaux ; des françaises comme La stagiaire ou dernièrement la série Netflix Serpent Queen qui devrait revenir pour une saison 2. Sa réputation grandit et son besoin d’espaces aussi. Olivier Marchetti tourne donc son regard un peu plus loin que Martigues.
Des studios dans l’usine Saint-Louis Sucre à Marseille
A Marseille, la mairie ne cache pas son envie de développer la filière cinéma. « C’est un pourvoyeur d’emploi important et un outil d’attractivité indéniable. On aurait tort de s’en priver », explique l’adjoint à l’économie Laurent Lhardit. Aussi, la Ville porte divers projets comme une rénovation du pôle média de la Belle de Mai, le siège historique de tournage de Plus Belle la Vie, une base logistique au Technopôle de Château-Gombert ou encore l’accueil d’une antenne de l’école Cinéfabrique. Un site semble également voué à la filière audiovisuelle : l’usine Saint-Louis Sucre, dans le quartier de la Cabucelle. Réduite à une poignée de salariés assurant la production de sucre liquide, la fabrique de l’allemand Südzucker n’utilise désormais que 6 000 mètres carrés sur les 11 hectares de terrain au total.
« Nous sommes déjà en relation avec plusieurs investisseurs pour ce projet qui couterait un peu plus de 100 millions d’euros »
Olivier Marchetti
Situé à la lisière d’Euroméditerranée et de la future zone à faible émission, le site attise les convoitises dont celle de Provence Studios. Olivier Marchetti a déjà présenté un projet complet à la mairie avec plusieurs studios, des ateliers de fabrications mais aussi des activités connexes comme une école de formation et des services pour accueillir les salariés des sociétés de production. Au total, le patron estime que cela peut créer 500 emplois. « Nous sommes déjà en relation avec plusieurs investisseurs pour ce projet qui couterait un peu plus de 100 millions d’euros », précise-t-il.
Mais avant de s’installer, le site industriel va devoir être dépolluer. La société Brownfields, dont les actionnaires sont la Caisse des dépôts et la Banque européenne d’investissement, devrait s’en charger. Ce fonds d’investissement écologique, qui affiche la volonté dans sa signature« de régénerer la ville durablement » est en passe de racheter le terrain pour le débarrasser de ses impuretés et le revendre ensuite à bon prix. Si l’acquisition n’est pas signée, Provence Studios est « déjà en contact avec eux » confie Olivier Marchetti. Il est en concurrence avec d’autres projets comme une plateforme logistique de La Poste mais la mairie de Marseille semble privilégier les studios de cinéma : « Nous ne souhaitons pas intervenir entre les porteurs de projets privés. Tout est possible mais Provence Studios souhaite occuper tout le terrain avec une belle promesse d’emplois sur une filière que nous soutenons. Alors, si ils y arrivent, tant mieux », répond Laurent Lhardit. Le projet a également été présenté à la maire adjointe Samia Ghali, déléguée aux grands équipements. L’élue a même fait le déplacement à Provence studios pour échanger avec les équipes d’Olivier Marchetti en décembre dernier.« Elle était accompagnée des adjoints Jean-Marc Coppola, Éric Sémerdjian et Laurent Lhardit ainsi que de Laure-Agnès Caradec pour la Métropole et du préfet en charge du plan Marseille en Grand, Laurent Carrié», précise Mike Ristorcelli, le directeur du développement de Provence Studios.
Une fois l’acquisition par Brownfields officialisée, les travaux de dépollution pourraient prendre un peu plus d’un an et Olivier Marchetti estime « qu’une fois les autorisations obtenues, il nous faudra 18 mois pour faire sortir le projet de terre ». Il faudra donc être patient avant de voir des films tournés en studio à La Cabucelle.
« La mairie rêve d’avoir un petit train qui ferait visiter les studios comme à Los Angeles. Pourquoi pas ? »
Olivier Marchetti
Provence Studios n’oublie pas pour autant ses origines martégales et espère bien continuer de faire grandir son site historique. Il peut compter sur le soutien de la Ville de Martigues et du maire communiste Gaby Charroux. Ce dernier a racheté 17 hectares de terrains au nord de Provence Studios pour y créer un nouveau quartier autour de la gare de Croix-Sainte. La halte a vocation à devenir un véritable pôle d’échange multimodal avec des trains reliant Marseille en une demie-heure. Une aubaine pour Olivier Marchetti et ses studios : « La plupart des équipes de production veulent se loger sur Marseille, cette liaison sera un point fort supplémentaire pour nous », se réjouit-il. Mais plus encore, il espère installer sur une partie de ces terrains des « backlot », ces décors extérieurs reproduisant des rues de grandes capitales : « Aujourd’hui, on nous demande de faire des rues parisiennes parce que c’est devenu trop cher et trop compliqué de tourner directement là-bas », explique Olivier Marchetti. En plus, il s’est rapproché d’investisseurs pour installer des hôtels et des loisirs sur le site toujours à destination des équipes de tournage, voir de touristes attirés par ce petit Hollywood : « La mairie rêve d’avoir un petit train qui ferait visiter les studios comme à Los Angeles. Pourquoi pas ? », avance le patron.
Un projet pour les grandes plateformes à Port-de-Bouc
« On pourrait y accueillir un petit Pinewood, les studios londoniens où investissent les grosses majors comme Disney et Amazon »
Olivier Marchetti
Bien implanté au pays de Martigues, Provence Studios regarde également de côté de la ville voisine, Port-de-Bouc. La commune au passé industriel lourd cherche aussi à se reconvertir, notamment sur les bords du chenal de Caronte juste au pied des studios d’Olivier Marchetti. La mairie de Port-de-Bouc est propriétaire des terrains de l’ancienne usine Azur Chimie, plus de 12 hectares en déshérence depuis une dizaine d’années. Encore une fois, Olivier Marchetti regarde ce foncier avec attention : « Evidemment, nous sommes intéressés et on travaille avec les collectivités sur cette reconversion de friche industrielle », annonce-t-il. Seulement, le site est extrêmement pollué et « on essaye de voir comment devenir propriétaire du terrain, mais pas de cette pollution », précise le dirigeant. Pour cette zone, il entrevoit le développement avec les grandes plateformes du net de plus en plus demandeuses d’espaces pour réaliser leurs séries. « On pourrait y accueillir un petit Pinewood, les studios londoniens où investissent les grosses majors comme Disney et Amazon », décrit-il. Si la route est encore longue pour libérer les terrains, il a déjà une idée précise de son projet : une douzaine de studios, trois ateliers, des bureaux et des logements pour les équipes de tournages… « Chaque opérateur pourrait avoir ses propres studios fermés selon ses envies, avec ses règles de confidentialité. C’est une demande forte aujourd’hui », souligne-t-il. Les ambitions de Provence Studios ne semblent pas avoir de limites.
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