A l’incubateur Zebox, dans la Cité de l’innovation et des savoirs d’Aix-Marseille, la société Mão Boa a organisé le 28 novembre une table-ronde sur un thème de management : la mobilisation des collaborateurs en matière de stratégie climat et sa stratégie RSE (responsabilité sociale des entreprises), en invitant à s’exprimer les sociétés Sami, Valgo et Montmirail.
Cette table-ronde a permis de partager différentes solutions et actions pour impliquer les salariés dans la construction de la feuille de route RSE des entreprises, et les bonnes pratiques de deux entreprises sélectionnées justement pour leur engagement RSE, en étudiant comment mettre en place une stratégie climat qui engage tous les salariés. La Convention des entreprises pour le climat, associée à la démarche, était présente.
Mão Boa (Marseille), représentée par Maxime Marchand, son co-fondateur en 2019 avec Marie-Alphie Dallest, a pour mission d’aider les entreprises à développer leur démarche RSE et à accélérer leur transformation durable par la participation des équipes. Sa solution repose notamment sur un outil digital de déploiement dans les équipes, pour diffuser information et diagnostics, pour engager des actions concrètes avec les collaborateurs et pour mesurer l’impact positif obtenu. L’approche proposée est collaborative : ce sont les salariés, par leurs actions, qui initient le changement du modèle de leur entreprise sur les enjeux RSE internes. Mão Boa est déployé dans plus de 87 pays pour des dizaines de milliers de collaborateurs dans des entreprises comme Veolia, Constructa, ou encore le Groupe Malakoff Humanis. La start-up marseillaise a été accompagnée par le programme d’accélération de Kedge Entrepreneurship et a bénéficié d’une subvention de la fondation de Kedge dont Maxime Marchand est diplômé.
En cours de levée de fonds actuellement avec Lita.co, Mão Boa sera aussi la 1ère start-up à bénéficier de financements grâce la plateforme Ypik, le nouveau club d’investissement co-fondé par des diplômés de Kedge, dont Georges Klenkle, président de Kedge Alumni, qui soutient le développement de start-up à potentiel engagées face aux enjeux sociaux et environnementaux. Mão Boa figure dans le mapping 2023 des start-up françaises à impact réalisé par Bpifrance, le Hub France Digitale et Mouvement Impact France et dans TechForGood.
Sami (Paris), dont Clémentine Meilland, responsable des partenariats à Marseille, a présenté l’activité et les convictions, est éditeur de logiciels et conseil en décarbonation et plan climat, qui depuis sa création en 2020 compte 600 entreprises accompagnées, ETI et PME, multi-secteurs. Solution climat pour les entreprises et les cabinets de conseil, grâce à un logiciel en ligne puissant, flexible et pédagogique, couplé à un accompagnement humain dispensé par des consultants internes et partenaires, Sami ambitionne d’accélérer la décarbonation de toutes les entreprises, en s’adaptant au secteur d’activité et au niveau de maturité de chaque entreprise pour l’aider dans sa politique environnementale. Sa plateforme climat 360° traite la comptabilité carbone, l’impact des produits et leur écoconception, le plan climat et le plan de réduction d’émissions et leurs objectifs, les émissions évitées et la communication climat. En novembre 2023 a été lancée Sami Academy, pour former aux enjeux climat en entreprise.
L’implication des équipes est garante de meilleurs résultats
Sami constate que l’implication des équipes est garante de meilleurs résultats de transition et donc que la stratégie climat globale d’une entreprise a intérêt à se déployer par un plan d’actions avec tous les contributeurs. Son outil de mesure précise est alimenté par des collectes collaboratives entre les équipes financières, informatiques et opérationnelles, et son catalogue d’actions s’étoffe au fur et à mesure des idées des entreprises clientes. Son slogan est de “permettre à chaque entreprise de faire sa part pour le climat, de façon simple, pédagogique et impactante.”
Pourquoi les entreprises s’engagent-elles dans une démarche climat, décarbonation ou RSE ? Sami et Mão Boa accompagnant de nombreuses entreprises, ils ont observé leurs motivations et les ont partagées. La première motivation est éthique, lors de la prise de conscience, par l’entrepreneur ou la direction de l’entreprise, de l’impact de l’entreprise sur l’environnement et de sa capacité d’action, tandis que la raison règlementaire (comme la directive CSRD par exemple) vient en dernier. Plus concrète, la seconde motivation est la marque employeur, pour faciliter les embauches, limiter la rotation, épanouir ses équipes et favoriser leur performance par leur motivation : trois quarts des jeunes de moins de 30 ans placent aujourd’hui le salaire sous la RSE dans leurs critères de choix de rejoindre une entreprise et d’y rester. Economique aussi, la 3e raison invoquée fréquemment est la compétitivité commerciale, notamment pour tous les appels d’offres, de plus en plus souvent conditionnés à une feuille de route climat, surtout de la part de grands comptes (comme par exemple EDF, ADP ou Engie) envers leurs fournisseurs PME, les labels et cotations extra-financières (comme Ecovadis par exemple) entrant dans les critères de sélection des donneurs d’ordres.
Valgo (Toulouse, agence à Vitrolles) est un groupe de dépollution employant 700 personnes en France et à l’international, dont Delphine Defrance est la directrice RSE. Tout en confirmant l’intérêt commercial réel de la démarche dans le monde des chantiers et travaux, elle précise que c’est l’entrée de Tikehau (gestion d’actifs) à hauteur de 30% dans le capital de Valgo, au travers d’un fonds à impact, qui a donné le signal de départ d’une motivation RSE puissante. L’approche ESG (Environnementale, sociale et de gouvernance) étant pour eux synonyme de création de valeur, ils ont encouragé la construction d’une stratégie solide en ce sens, avec des investissements financiers et humains et l’appui de la direction générale, conditions de succès nécessaires selon Delphine Defrance. Trois axes ont été retenus : l’humain, la transition carbone, la biodiversité.
Valgo, des référents RSE dans les 14 agences
Humainement, la performance des chantiers dans cette activité passe naturellement par la santé et la protection des collaborateurs. Delphine Defrance a présenté la façon du groupe Valgo d’embarquer les collaborateurs sur chantiers ou en agences vers un raisonnement RSE initialement éloigné de leur quotidien et la dureté de leur travail. Des référents RSE ont été nommés dans les 14 agences et les métiers ; bien formés, réunis régulièrement, ce sont eux qui diffusent dans les équipes. Le fait que le désamiantage soit envisagé comme un soin à la terre, et donc les ouvriers comme des médecins de la terre, a permis à ce que les équipes trouvent une réponse à leur quête de sens, la vie dans le sol étant un impact indirect fort de leur travail. Un engagement collectif extérieur à l’entreprise a été proposé en partenariat avec les Apprentis d’Auteuil et a emporté l’adhésion. Pour le volet carbone, un premier bilan carbone a été réalisé. Les critères énergie et transport ont été relativement faciles à analyser, ce sont les scopes 1 et 2 dont l’entreprise a une assez bonne maîtrise. En revanche chez les fournisseurs, le scope 3, la mesure a été plus difficile, une calculette interne ad hoc a été conçue, des démonstrations faites en agence, l’outil Mão Boa déployé, des calculs personnels et challenges encouragés.
Des indicateurs quantitatifs ont été définis, comme en matière de biodiversité. Le plan de transition a été réalisé de façon technique, avec des métriques calculatoires précises et des KPI (Key Performance Indicators) à suivre et atteindre pour les managers. Des partenariats ont été mis en place pour des achats responsables. Cet impact est mis en avant dans les offres commerciales de Valgo et ses réponses aux appels d’offres. Les enjeux commerciaux sont nets, les grands comptes comme EDF et Total prennent en compte cette innovation. Le choix du groupe Valgo est « d’investir en décarbonation et rester dans notre chaine de valeur, sans tabler sur des compensations ailleurs. »
Montmirail (Marseille), courtiers en assurance depuis 120 ans à Marseille, était représenté par Vincent Payen, son directeur général, et Julie de Tournadre, responsable RSE et communication interne et externe. Filiale du groupe Verspieren depuis 2000, Montmirail est un important courtier en assurance du sud de la France qui compte environ 100 collaborateurs à Marseille, Lyon, Toulouse et Bordeaux. S’il est présent dans tous les secteurs, les grands comptes comme les PME et les établissements publics et privés, il est notamment spécialisé dans les risques de la construction, les risques d’entreprises, le maritime et le transport.
Montmirail : le secteur de l’assurance est au coeur de l’impact climat
De manière générale, Vincent Payen a rappelé que le secteur de l’assurance est au coeur de l’impact climat, qu’il existe une mutualité climat, qu’une partie des primes est affectée à un fonds environnement collectif, mais que les approches solidaire et financière sont en rivalité dans ce métier. Le risque de désassurance sur les risques verts trop forts n’est pas totalement à exclure, mais le métier de l’assurance en est au balbutiement des primes indexées aux critères RSE. De façon interne, le secteur de l’assurance étant sensibilisé, on y note des démarches RSE importantes et des acteurs engagés et actifs. Julie de Tournadre a justement présenté le plan interne à Montmirail intégrant la RSE à la stratégie de l’entreprise. Ce plan RSE formalisé contribue de façon sensible à la cohésion des équipes. La démarche a été progressive : au départ, c’est un comité de cinq personnes englobant la direction, les ressources humaines et la communication qui a porté le projet, axé d’abord sur l’emploi et les RH, avec le Label Emplitude ; puis le relais a été transmis aux managers et commerciaux, le comité élargi à 12 personnes par appel à candidatures, et le label Lucie 26000 obtenu en 2023.
Les axes RSE classiques ont été déployés : le social, l’inclusion, la qualité de vie au travail, le sociétal, l’associatif, l’environnemental, le carbone. Montmirail a mené des actions concrètes, telles que la réduction drastique du papier au profit de la gestion électronique des données, l’eau et l’éclairage automatiques, les bornes électriques pour les voitures des équipes et des collaborateurs ; le lundi de Pentecôte a été consacré au ramassage de déchets en extérieur en équipes. Un effort de sensibilisation et d’explication de la démarche RSE a été fourni, par exemple par des flash info réguliers, et en 2022, c’est un séminaire RSE global qui a entrainé un déclic de crédibilité et adhésion. Pour embarquer les collaborateurs et les rendre tous acteurs, a été lancé le programme “90 actions, 90 jours, 90 collaborateurs”, et il ressort que les gens de l’entreprise aiment y contribuer et se sentent valorisés par ces actions.
Pour conclure, le consensus a été total sur le fait que l’entreprise devient plus performante en déployant une stratégie RSE que si elle ne le fait pas, et que la stratégie RSE est plus réussie si elle inclue largement les équipes que si elle reste restreinte. Après avoir bien évoqué les moyens de mobiliser les collaborateurs dans la stratégie de l’entreprise, la salle a proposé un renversement du thème : et si ce sont les équipes qui veulent mobiliser leurs dirigeants dans l’élaboration d’une stratégie climat ambitieuse ?
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