La Compagnie nationale du Rhône et son gestionnaire privé Engie consulte pour la gestion des 18 sites industriels et portuaires, situés entre Lyon et Arles. La gestion, l’exploitation et l’entretien de ces ports publics ont en effet été confiés à des tiers, à travers des « conventions de sous-traités de concession » qui arrivent prochainement à échéance. Lyon, Salaise-Sablons, Portes-lès-Valence et Arles sont concernés.
Les échelles ne sont pas les mêmes entre Lyon qui dispose de 184 hectares et Arles une cinquantaine, mais cette consultation qui attribue des équipements publics pour 25 années doit s’inscrire dans le cadre du projet de Grand port Lyon Marseille. Elle en illustre la complexité avec la nécessité de fédérer plus d’une centaine d’acteurs aux intérêts contradictoires. La CNR à gestion privatisée adjuge des ports publics, le Grand port maritime de Marseille Fos joue sa partition, la concertation est conduite sous la houlette de la préfète de la région lyonnaise et les élus de Marseille Provence ne sont que spectateurs.
Stéphane Paglia chef d’entreprise dans l’informatique à Saint-Martin-de-Crau, président de la Chambre de commerce et d’industrie du Pays d’Arles explique aux lecteurs de Gomet’ le sens de la candidature consulaire pour ce« contrat de sous-concession pour l’exploitation, le développement, la maintenance et le gros entretien renouvellement du port public d’Arles.»
Pourquoi la Chambre de commerce et d’Industrie d’Arles se porte-t-elle candidate à la gestion du port ?
Stéphane Paglia : Depuis les années quatre-vingt, nous sommes les exploitants du port de commerce d’Arles. Nous avons un vrai savoir-faire reconnu sur tout le bassin. Nous sommes un port quadri modal, maritime et fluvial. Sur cette dernière mandature nous avons réalisé un million d’euros de travaux et deux millions d’achats de matériel : une nouvelle grue, des chargeurs. Nous investissons fortement pour décarbonner les transports.
Cette année nous avons retiré 1500 camions de la route de Fos à Arles
Stéphane Paglia
Nous commençons à gérer les conteneurs : cette année nous avons retiré 1500 camions de la route de Fos à Arles. Nous avons une expertise pour gérer un outil au service du territoire.
Les chambres ont toujours historiquement créé et géré les infrastructures économiques : aéroports, zones d’activités, ports… Nous avons toujours été à la manœuvre. Le seul intérêt, pour nous, est de servir le territoire avec un hub logistique performant.
En quoi le Port d’Arles peut-il développer le conteneur ?
SP : Nous avons des ruptures de charges, entre Fos et Arles. Tout le monde a fait des efforts, les armateurs, les clients, le port. Aujourd’hui, des barges qui remontent vers Lyon font une halte à Arles. On décharge une partie des conteneurs et ils poursuivent leur route. Là nous commençons à être compétitifs.
Le but du jeu, est de désengorger la route. On ne remplacera pas la route mais, si on arrive à lever 15 ou 20 % des camions de la route, nous serons sur un transport plus vertueux. L’accessibilité du port est bonne, on rejoint directement la rocade et on accède ainsi au réseau autoroutier. Pour le fer, nous avons un embranchement rail qu’il faut développer. Nous voulons créer une zone de stockage pour exploiter mieux le train vers le nord de la France et inversement, pour absorber les décalages avec les horaires d’arrivée des navires. Ce sera un parking à wagon pour optimiser les convois ferroviaires.
Quelles sont vos priorités ?
SP : La première priorité est de refaire le quai sud dans les normes pour le traitement des déchets.
La priorité numéro deux, est d’investir dans du matériel, notamment pour gérer les conteneurs. Il faut acheter un autre type de grue pour pouvoir dépoter les bateaux plus vite puisque c’est ce qui fait le prix du transport. Nous ne cherchons pas le volume mais la qualité nous ne pouvons accepter des navires que jusqu’à 3000 tonnes : nous faisons du sur-mesure.
Chaque territoire a sa signature et il faut qu’il reste indépendant
Stéphane Paglia
Le projet de Grand port Lyon Marseille est en débat. Comment positionnez-vous Arles dans cette vision ?
S. P : Il faut que les ports travaillent ensemble, et c’est déjà le cas. L’association MedLink réunit tous les ports de l’axe, du Rhône avec Marseille. Il faut encore accentuer les synergies. Pour autant, chaque territoire a sa signature et il faut qu’il reste indépendant. La taille nous donne une réactivité, une souplesse que l’on perdrait dans un grand ensemble.
Chaque port doit rester indépendant ?
S. P : C’est comme ça que nous serons le plus agile. Mais il faut travailler ensemble. Nous ne sommes pas dans la même typologie que sur la Seine. Depuis l’étranger, il faut un guichet unique, c’est MedLink, qui travaille avec les différents intervenants sur le territoire. La vraie concurrence vient de Gênes avec le train Lyon-Turin, on risque de voir les bateaux décharger à Gênes pour aller dans le nord de l’Europe.
Que pensez-vous du projet d’unification du système informatique avec Marseille Gyptis International MGI?
S. P. : Il faut une uniformisation de la partie logicielle avec des datas facilement accessibles, par tous et de manière uniforme. Ce sont des vrais sujets. Je suis pour que tout le monde utilise les mêmes systèmes avec les mêmes règles et les mêmes datas.
Les barges et les péniches doivent se convertir à l’hydrogène
Malgré tous les discours, le fluvial rhodanien ne décolle pas. Comment faire ?
S. P. : Nous avons souffert de la concurrence de l’autoroute avec un prix qui était redoutable sur la route. Aujourd’hui avec les objectifs de décarbonisation tous les systèmes sont mis en place pour aider les clients à passer sur le report fluvial, ça nous permet de devenir compétitifs.
Nous avons progressé en trafic l’année dernière. Le chiffre d’affaires du port a augmenté de 25 %. Nous avons ouvert un quai supplémentaire qui avait été bloqué pendant longtemps, puisqu’il y avait eu quelques malfaçons en 2016. Il y a une appétence pour passer par le port. Mais il ne faut pas se mentir, le fluvial ne remplacera ni la route ni le train, c’est un complément. Il faut aussi que le transport fluvial fasse sa mue lui aussi et que les barges et les péniches se convertissent à l’hydrogène très rapidement. Nous avons en projet une station d’avitaillement hydrogène sur le port pour accélérer cette transition.
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