Changer ou moderniser une station d’épuration est pour une commune, un coût, peu visible mais nécessaire. Bamboo for life fait de cette contrainte une opportunité, non seulement pour choisir un procédé naturel, mais pour trouver des nouvelles ressources, sans débourser le prix d’un investissement. C’est le mécano à la fois financier, technologique et éthique que propose Bernard Benayoun. Un enjeu planétaire et humain : chacun d’entre nous produit en moyenne 150 litres par jour d’eaux usées !
Hôte de la pépinière CleanTech
Le bambou, Bernard Benayoun le connaît par cœur et il a su développer des systèmes qui utilisent ses rhizomes, ses cannes, ses feuilles pour chambouler les traitements de l’eau. Il est diplômé de la très célèbre et sélect École Boulle, celle qui forme les designers et ébénistes aux traditions du bois. Il en a gardé la créativité, et le goût du beau. Mais depuis 20 ans, depuis des missions en Afrique de l’Ouest et en Asie, il a fait des recherches approfondies pour utiliser la formidable capacité de cette « mauvaise herbe », invasive, luxuriante, et résistante pour contribuer à l’assainissement des eaux usées.
De 2002 à 2015, Bernard Benayoun a déployé une activité, avec la société Phytorem, de R & D et de création de stations d’épuration à base de bambou en phytoremédiation et il a installé une cinquantaine de stations en France continentale, en Guinée Conakry, en Côte d’Ivoire au Mexique, à la Réunion. En 2018, avec Myriam Lankry, il fonde une SAS Bamboo For Life cocoonée au Technopôle de l’Arbois dans la pépinière CleanTech. Le but est de passer en phase industrielle et de déployer d’autres activités liées aux capacités du bambou.
Le bambou évapotranspire
Pour appréhender le business model de cette start-up détonante, il faut repartir du process. Le procédé Bambou Assainissement® se déroule en trois phases.
- Les eaux usées, ce qui s’écoule de nos égouts, les eaux domestiques comme les eaux de pluie très souvent mêlées, arrivent en station d’épuration. Un processus mécanique de dégrillage, de dessablage, de dégraissage permet de récupérer ce qui est solide : les lingettes soi-disant biodégradables, les mégots, les masques, les petits déchets plastiques jetés, etc. Ces déchets, explique Bernard Benayoun « n’ont rien à faire ici et retournent à la filière de traitement des ordures ménagères.»
- Dans la seconde phase, ce liquide très chargé est déversé dans la rhizosphère : tout se passe dans les racines du bambou, les rhizomes, où ont été ajoutés des champignons, des microorganismes et des bactéries qui dégradent la matière organique. Cette transformation produit de l’azote, du phosphore, et du potassium qui constituent le nutriment des plantes, en l’occurrence des bambous qui vont transformer ce déchet en biomasse.
- Le bambou prélève l’eau qu’il va évapotranspirer par son feuillage et ainsi rejeter une eau parfaitement pure dans l’atmosphère. L’eau traitée qui n’a pas étéé prélevée par la plante va pouvoir s’infiltrer et ainsi recharger la nappe phréatique.
Le bambou a pour particularité de pousser très vite, jusqu’à un mètre par jour, d’atteindre sa taille adulte rapidement, de vivre huit années, mais d’être actif écologiquement pendant quatre ans. L’entretien consiste donc à tailler les chaumes, les cannes, régulièrement ce qui donne de la biomasse, un matériau dont la France est importatrice. Une station est constamment en régénération, le rhizome limité dans son expansion par un géotextile va produire les jeunes pousses nécessaires. Ce matériau, le chaume pourra trouver sa place dans le textile biosourcé, dans la construction, dans le design, dans l’isolation, et alimenter les centrales à biomasse qui doivent trop souvent importer leurs combustibles.