Lorsque le maire de Salon-de-Provence, Nicolas Isnard, a vu les factures énergétiques exploser, lorsque l’électricité, le gaz, le fioul ont affiché de la croissance à deux chiffres, il a décidé de prendre le taureau par les cornes et de remettre tout à plat. « Une déferlante s’est abattue sur nous, la crise est brutale et imprévue et nous n’avons pas de réserves » affirme le maire ce mardi 4 octobre face à la presse.
Si la municipalité laissait filer, le budget de la ville de 85 millions d’euros subirait une hausse de trois millions d’euros uniquement pour l’énergie. Inutile de démultiplier les mesurettes qui certes apportent leur obole, mais peuvent laisser de côté des équipements massivement énergivores. Nicolas Isnard et son adjoint aux finances, David Ytier, ont donc présenté en mairie un plan drastique.
Quatre secteurs consomment la majorité du budget : l’électricité dans les bâtiments et les équipements représente en 2021, un million d’euros, l’éclairage public 640 000 euros, le chauffage urbain 470 000 euros et le fioul 340 000 euros. Pas question pour le maire de Salon « d’imposer aux élèves le col roulé » dit-il. Les écoles sont donc sanctuarisées dans leur chauffage, même si certaines adaptations ou des gestes civiques y seront promus comme les détecteurs de mouvement qui vont peu à peu équiper les 25 écoles et leurs 118 classes.
Trois sites ont été identifiés comme étant les plus énergivores de la ville en électricité : le musée du Château de l’Empéri, le complexe sportif du centre-ville avec sa piscine et la restauration collective. Pour la facture de fioul, les serres Manières, le garage Payan et la halle des sports voient leur facture plus que doublée. Pour le chauffage urbain, c’est la piscine des Canourgues qui augmente de 142 %.
Une fois ce diagnostic posé, l’équipe municipale est entrée dans le dur, les équipements sur lesquels il faut faire des économies significatives. « Nous voulons faire des économies structurelles », affirme le maire. Le premier est l’éclairage public avec pour une ville de 45 000 habitants, 7 450 points lumineux. Grâce à l’aide du Conseil départemental notamment, en 2023, 60% de cet éclairage sera en led. Mais pour l’instant, la mesure d’urgence consiste à éteindre l’éclairage entre minuit et cinq heures du matin dans les zones résidentielles sur les entrées de ville et sur les monuments : 6 000 points de lumière seront ainsi éteints pendant 5 heures, 260 points de contrôle permettent de commander l’éclairage municipal et permettront d’adapter cette expérimentation qui sur un an génère à elle seule 400 000 € d’économies. « 80 % de la délinquance a lieu le jour se défend Nicolas Isnard, face à ceux qui craignent pour la sécurité. Les cambrioleurs préfèrent la lumière ! » Les illuminations de Noël, mesure de bon sens, resteront allumées uniquement pendant la période de Noël et s’éteindront au mois de janvier.
Question plus sensible : celle des piscines, il y va de l’apprentissage de la natation pour les élèves. Mais la piscine de Canourgues comprend deux bassins : un extérieur de 815 m3 et un intérêt de bassin intérieur de 245 m3. À partir du 15 octobre le bassin extérieur sera fermé, ce qui génère une économie de 300 000 €.
Le musée de l’Empéri a le paradoxe d’être visité en été et très peu en hiver, de novembre à avril lorsque les coûts énergétiques sont élevés ; la fréquentation oscille de huit personnes à 60 personnes par jour selon les saisons. Le musée fermera donc 8 mois sur 12 : à l’issue des Journées du patrimoine en septembre et il rouvrira pour la Nuit européenne des musées.
Quant au fioul, il alimente principalement les serres municipales qui permettent de produire les plantes pour les espaces verts de la ville. La serre tropicale qui était chauffée à 20°C sera fermée et les plantes seront rassemblées dans une serre chauffée à 12°C ce qui générera une économie de 50 000 €.
Ces mesures nous permettent de nous adapter à un monde nouveau
Nicolas Isnard
Ces mesures conclut le maire « sont des mesures d’urgence, mais en même temps, elles nous permettent de nous adapter à un monde nouveau, de nous questionner sur certains équipements et finalement de faire du bien à la planète ».
Les communes, les maires, les techniciens de collectivités territoriales réfléchissent à des solutions nouvelles de sobriété
Une politique de sobriété calculée et planifiée qui rejoint celles qui sont mises en place par nombre de maires dans le département.
Au vu de l’affluence à la table-ronde du Salon des maires le 29 septembre dernier « Économies d’énergie : des solutions concrètes pour réduire la facture » à laquelle Gomet’ était associée, les communes, les maires, les techniciens de collectivités territoriales prennent en main la gestion de l’énergie, réfléchissent à des solutions nouvelles de sobriété.
Le maire de Saint-Chamas, Didier Khelfa, qui préside le Syndicat mixte d’énergie du département des Bouches-du-Rhône (Smed 13) a recensé et analysé ses 47 bâtiments communaux et il connaît leur consommation, leur occupation, permanente ou alternée et les travaux qu’il faudra faire pour améliorer la situation. À Bouc-Bel-Air, la municipalité s’est attaquée au patrimoine municipal, bâtiment après bâtiment, en rénovant l’isolation, le chauffage, la ventilation. Le maire de Graveson, Michel Pécout a repris en main l’éclairage public et a réussi à engranger des économies de 24%. Saint-Martin-de-Crau a fait passer son parc d’éclairage à 52% en led.
Le Département veut des diagnostics de performance énergétique avant de financer…
Didier Khelfa invite ainsi les maires à préparer des dossiers sur chaque équipement, sur chaque bâtiment de leur commune afin de pouvoir, en temps et heure, bénéficier des aides publiques. Nathalie Gastaud, chef du service des communes qui délivre les subventions du Département sur les économies d’énergie demande aux élus plus de méthode et de prospective. Elle exigera dorénavant des« diagnostics de performance énergétique» préalables aux travaux et invite les communes à présenter des projets de “relamping” (en provençal, de passage au led en français courant).
Didier Khelfa constate que la population, qui aurait pu protester, il y a quelques mois face par exemple aux restrictions d’éclairage est au contraire prête à des gestes civiques. Les maires de Sénas ou Mallemort par exemple témoignent que les citoyens demandent « une extension de l’extinction.»
Lien utile :
Consultez le Guide de l’élu éco-responsable édité par Gomet’