Les grandes capitales sont-elles l’apanage des grands groupes ? Paris est-elle la seule ville française intéressante pour les entrepreneurs étrangers ? Ce sont les questions auxquelles a voulu répondre Provence Promotion qui organisait avec le Club Top 20, la Métropole et la Chambre de commerce et d’industrie ce jeudi 15 septembre son premier forum d’Aix-Marseille, en préambule aux Etats de France qui se réuniront le 15 novembre prochain à Paris.
Et force est de constater, aux vues du nombre de représentants de grands groupes internationaux présents à cette occasion – Google, Air Products, Siemens, … – que Marseille suscite de l’intérêt. D’ailleurs, selon EY Consulting (voir le baromètre en document source), la métropole d’Aix-Marseille se classerait en troisième position parmi les villes pouvant challenger Paris, derrière Bordeaux et Strasbourg. Quant à Lyon, elle baisse considérablement et se classe en cinquième position avec 17% de taux d’attractivité pour les investisseurs en 2022 (contre 28% en 2021, et 25% pour Marseille).
Des atouts numériques, logistiques et militaires
Comment expliquer l’attractivité de la cité phocéenne, longtemps perçue comme une mauvaise élève sur plusieurs aspects ? « Il y a trois points forts dont on parle peu lorsqu’on évoque Marseille : c’est d’abord un hub logistique, notamment avec le port. Ensuite, c’est un hub numérique, grâce à la quinzaine de câbles sous-marins que nous possédons et par lesquels transitent les données du monde entier. Enfin, nous possédons des bases militaires très importantes à proximité, sur Salon et Istres, qui sont constamment en lien avec l’armée américaine. Ces trois points jouent un rôle décisif dans la décision d’une entreprise pour s’implanter », souligne Philippe Stefanini, président de Provence Promotion.
Car malgré ces atouts, il faut encore convaincre : « C’est le jeu de la concurrence européenne », tranche Jean-Luc Chauvin, président de la CCI Aix-Marseille Provence. « A l’échelle du monde, l’Europe de l’ouest ne représente qu’une part du marché. Si un grand groupe choisi de s’implanter à Barcelone, par exemple, il n’ira pas s’installer aussi à Marseille », détaille-t-il. Mais notre ville dispose d’un autre atout dans sa manche, selon l’élu : sa proximité avec le continent africain, qu’il entend d’ailleurs mettre en avant avec son projet Afric’agora, qui doit voir le jour début 2023.
Enfin, le territoire se démarque par plusieurs projets emblématiques, tels que Iter, qui attire les spécialistes de l’énergie comme Westinghouse (Etats-Unis), qui dispose d’un site dans le quartier de Bonneveine à Marseille, ou encore Air Products, basé à Rognac et l’Estaque.
Accélérer sur la mobilité, la transition environnementale … et le numérique
Invités à témoigner, divers dirigeants ont pris la parole lors du forum pour donner leur point de vue sur les atouts du territoire … mais aussi ses inconvénients. Et paradoxalement, les entrepreneurs pointent du doigt des difficultés sur le numérique.
Ainsi, malgré la bonne connectivité du territoire Aix-Marseille grâce à ses câbles sous-marins, Google n’envisage ainsi pas tout de suite d’y ouvrir une antenne. « Les infrastructures nécessitent des moyens humains mais uniquement au moment où elles sont déployées. Une fois qu’elles le sont, elles ne mobilisent pas beaucoup, ce n’est donc pas parce qu’il y a des câbles à Marseille que nous allons recruter sur place. Nous embauchons davantage dans les domaines de l’ingénierie et des équipes produits. Or, historiquement, le développement de ces activités s’est fait à Paris », explique à Gomet’ Benoît Tabaka, secrétaire général de Google France, présent lors du forum. Le “G” de Gafam est pourtant implanté en province, comme à Montpellier, Rennes, ou Nancy.
Emilie Sidiqian, directrice générale de Salesforce France, groupe californien spécialiste de la relation client, dresse un constat similaire : « Investir sur le numérique, ce n’est pas uniquement avoir des câbles : il faut aussi aider les entreprises locales à se digitaliser. Il y a encore une accélération à donner », analyse-t-elle. Salesforce dispose d’une équipe marseillaise, mais pas de locaux. Le groupe qui a racheté en 2021 son voisin de palier à San Francisco Slack (messagerie collaborative) envisage néanmoins de s’investir plus dans la région. Un événement est en préparation et Emilie Sidiqian a multiplié durant son passage à Marseille les rendez-vous avec l’écosystème économique local.
Autre difficulté chronique de la métropole : les difficultés dans les transports qui, sans surprise, peuvent parfois rebuter les entreprises. Enfin, Aix-Marseille ne figure pas parmi les bons élèves de la transition environnementale, malgré les efforts des entreprises.
Marseille, une ville accueillante pour les grands groupes
Conclusion : si les grands groupes internationaux éprouvent certes une attirance pour le Sud, beaucoup préfèrent quand même garder un pied dans la capitale, à l’exception de quelques grands groupes nés à Marseille tels que CMA-CGM. Le PDG du groupe maritime, Rodolphe Saadé appelait d’ailleurs la semaine dernière au Forum de l’UPE 13 les acteurs économiques à se mobiliser collectivement pour attirer ici plus de grands groupes.
C’est pourtant aussi le cas du groupe italien Autogrill, dans le secteur de la restauration, qui a choisi il y a 25 ans de localiser son siège à Marseille. « Marseille peut faire peur à cause de son millefeuille administratif : mairies de secteur, Métropole, Région … Malgré cela, c’est une ville qui ne vous laisse pas neutre. Nous avons trouvé un accueil très chaleureux et avons été très bien accompagnés par les structures locales comme l’Upe13 ou le Club Top 20 » s’enthousiasme Stan Monheim, DG France et Europe d’Autogrill.
L’aspect chaleureux de Marseille lui permettra-t-il, dans les années à venir, d’accueillir davantage de grands groupes ? Nul doute, en tout cas, que la ville suscite un intérêt croissant. Provence Promotion espère notamment que la Coupe du monde de rugby en 2023 ou encore les jeux olympiques de 2024 contribueront à renforcer cet attrait.
Document source : l’étude d’EY Consulting sur l’attractivité de la France
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