Comme les mousquetaires, les trois questions principales de nos rencontres sont en fait quatre. La 4e, qui est en fait la première, est celle du mix énergétique. En perpétuel débat, objet du jeu des lobbies, sujet aux aléas techniques, politiques ou climatiques, le mix est à la fois une prospective, qui nous projette à 5 ans 10 ans ou 30 ans et un bilan des choix ou des non-choix du passé. Nous attendons ainsi de la nouvelle ministre une « stratégie française Énergie Climat, une stratégie nationale bas carbone, et un plan national d’adaptation au changement climatique » qui doivent mettre le tout en cohérence.
Le mix énergétique en mouvement
La place du nucléaire dans notre mix est par exemple le résultat des sacs et ressacs des politiques publiques qui sont passées du nucléaire triomphant au nucléaire honteux vers une relance polymorphe aux interrogations multiples.
Chacune des grandes filières que nous allons tenter de comprendre au cours de nos rencontres énergies, solaire et éolien en mer ce mercredi 2 octobre, hydrogène et nucléaire le 8 janvier prochain, a trop souvent la tentation chacune tour à tour d’être la solution unique et le substitut à tout le reste.
Les aléas des uns et des autres devraient conduire à plus de modestie. L’évidente prudence, comme la demande inexorable d’électricité poussée par la transition énergétique comme par la transition numérique imposent de mixer nos énergies, d’adopter une démarche pragmatique, avec une analyse coût bénéfice : toute production d’énergie ne peut se faire sans externalité négative.
Dans nos débats, nous n’aurons donc aucun a priori idéologique ou technologique mais nous voulons, pour chacune des filières examinez posément et le plus rationnellement possible trois aspects :
La faisabilité technologique
Contrairement à ce que l’on veut nous faire croire, des progrès immenses en matière technologique, en savoir-faire, en compétences humaines sont indispensables pour porter à maturité de nouvelles filières énergétiques. Nous avons perdu au cours des deux dernières décennies, notre avance dans le nucléaire. L’éolien en mer, quoique l’on en dise, est toujours à la recherche de son modèle technique et économique et la production de panneaux solaires en France, à des prix de marché est un défi inédit.
Jouons cartes sur table et parlons vrai de ces problématiques technologiques que l’on ne peut glisser sous le tapis et évacuer avec quelques communiqués soporifiques lorsque les pannes ou les retards sont là.
L’acceptabilité sociale
Elle a fait chuter nombre de projets, le recul de l’industrie pendant les deux dernières décennies a fait oublier les usines, les barrages, les grands travaux… Chaque projet doit dorénavant se soumettre, et c’est un progrès, au débat public, tel qu’il est prévu avec la Commission nationale du débat public. Certains ont très bien compris le mode d’emploi, d’autres devront faire leur apprentissage.
L’évidence économique d’un équipement, sa pertinence pour le territoire doivent se plaider, se défendre, à hauteur d’homme, dans des réunions chahutées, parfois électriques et avides d’explications, de preuves, de démarches respectueuses des habitants et de l’environnement. Le Nimby ne peut être balayé d’un revers de main, il est devenu un facteur essentiel à comprendre pour tous les entrepreneurs de l’énergie.
Des modèles économiques fluctuants
Les modèles économiques des nouveaux patrons de l’énergie interrogent. Les annonces et les effets d’annonces se chiffrent en milliards (le prix d’une éolienne en mer par exemple). Mais la trésorerie actuelle des promoteurs se calcule en millions. En fait dans ce que l’on nous annonce, il y a trois tiers plus un. (Encore les mousquetaires !)
Le plus un, c’est la phase actuelle qui consiste à crédibiliser un projet, à préempter des terrains, à nouer des alliances, à déminer les oppositions, à surmonter les obstacles administratifs et à entretenir vis-à-vis de financeurs potentiels les contours d’un projet désirable et porteur de bénéfices futurs. Cette phase n’est pas la plus gourmande, mais tout de même. On y retrouve une contribution des porteurs du projet, du seed money, des subventions locales attirées par l’emploi et des subventions d’étude nationales ou européennes.
Le schéma d’après, qui se chiffre lui en milliards, comporte trois parties : `
- Des financements dits propres avec un recours aux investisseurs en capital, des grands fonds européens ou internationaux qui misent sur l’énergie.
- Deuxième ressource, l’emprunt qui semblait être très séduisant au temps des taux nuls ou négatifs, mais qui avec des taux à 2 %, 3 % ou 4 % va grever directement la marge nette et donc les bénéfices futurs attendus. Les promoteurs devront affiner et aiguiser les business plans pour convaincre les banquiers.
- Enfin la dernière partie doit être trouvée sur des financements européens comme le Green deal ou français comme France 2030. etc. Le « quoi qu’il en coûte » étant révolu, l’État est à la recherche du plus petit milliard d’économie, il faudra là aussi beaucoup de talents pour aller chercher un argent public qui sera plus exigeant et plus rare.
Ces trois questions nous semblent fondamentales, il y en a certainement d’autres et nous les aborderons, si elles viennent dans le débat, nous les soumettons à nos intervenants, au public, aux enseignants et aux étudiants qui vont nous suivre à Centrale Marseille.
Notre événement est gratuit et ouvert à tous sur inscription