A regarder les pubs de l’application qui fait fureur chez les ados, Tik Tok s’enorgueillit de permettre à tout un chacun de « faire le buzz ». On comprend dès lors pourquoi tant « d’idiots utiles » (à leurs adversaires) s’y ébattent, sans toujours mesurer les conséquences de cette communication débridée.
L’avènement d’internet, ce réseau planétaire apparu à la fin du siècle dernier, a ouvert une boîte de pandores avec des « sites », « des forums », des « encyclopédies », un « réseau » et des pratiques qui peuvent aller du pire, la délation, l’injure, la menace… au meilleur, l’occasion de créer une communauté, de retrouver des amis d’avant et d’ailleurs, de faire une « boucle » réservée à quelques fidèles. « Réservée » n’est pas par contre synonyme de « protégée ».
La récente péripétie judiciaire qui a mis en cause les pratiques coupables de plusieurs élus marseillais dans le 11/12 et le 6/8 a permis de mettre au jour un pot aux roses. Une fraude massive lors des dernières élections municipales pour fabriquer des procurations douteuses ou, pire, faire voter des électeurs incapables de le faire en toute conscience (Démence sénile, alzheimer). A travers la révélation devant le tribunal correctionnel, des contenus interceptés par les enquêteurs, on a découvert, médusé ou écœuré, le cynisme absolu, la grossièreté assumée mais surtout l’absence avérée de toute éthique, de la part de ceux qui s’exprimaient en l’occurrence sur whatsapp, une boîte aux lettres numérique.
Le président de l’instance judiciaire a jugé le dialogue révélé « glaçant ».
Le président de l’instance judiciaire a jugé le dialogue révélé « glaçant ». Pour le moins. Le nouveau ministre de l’Intérieur, M. Bruno Retailleau, dont quelques prévenus partagent sans doute les aspirations, est loin de ces turpitudes même s’il s’agit bien d’encartés « Les Républicains », sa famille politique, qui ont comparu cette semaine. Il prône pour la France trois priorités, « Un, rétablir l’ordre, deux, rétablir l’ordre et trois, rétablir l’ordre ! ».
Que pense-t-il, lui dont la fonction comprend la carte électorale et les élections, de ce « désordre » marseillais affiché (et condamné) qui a mis en scène des personnalités élues en principe pour respecter et faire respecter la loi ? Un ange vendéen passe d’autant que le procureur Jean-Yves Lourgouilloux à l’issue de procès s’est interrogé « est-ce que ce ne serait pas la révélation d’un système qui existe depuis très longtemps ? ». Une piste pour le premier flic de France.
A gauche comme à droite, ceux qui feront mine de s’interroger méritent d’ores et déjà un Molière pour leur interprétation de Tartuffe.
Sébastien Delogu ciblé, Sarah Bourgeois dénoncée
Cet épisode qui rejoint la longue liste des psychodrames politiciens que nourrissent la ville et le département depuis des décennies, devrait malgré tout inciter ceux qui surfent sur le net à un peu de pondération, un soupçon de retenu et beaucoup de prudence. Car la boîte à gifles ne s’est pas refermée pendant que se jouait le procès que nous venons d’évoquer.
Le député Insoumis Sébastien Delogu, toujours prompt à dégainer sur les réseaux, façon Lucky Luke, a eu droit en retour de la part de ses adversaires à un ignoble lynchage en règle, moquant son « illettrisme » ou, pire, son « analphabétisme ». Pas suffisant pourtant pour qu’il se prive de cette boîte à messages simplistes, hâbleurs, toujours violents.
La gauche pour sa part vient de dresser ses piques contre une ancienne colistière de Martine Vassal, Sarah Bourgeois, pour avoir sur son compte d’influenceuse, « Marseille, poubelle la vie » publié une fake news. On y voit sur une vidéo un « corps » gisant dans un jardin du huitième : une supposée victime selon elle du trafic de drogue très prospère dans cet espace. Sauf qu’il s’agissait d’une malheureuse suicidée… Désolation.
Il revient à ceux qui prétendent diriger ou rediriger la ville d’élever le débat
Il y a fort à parier que la période qui s’ouvre, avec ses incertitudes pour le pouvoir élyséen et la représentation parlementaire et l’horizon déjà ouvert des élections municipales de 2026, va aggraver la bataille féroce qui se joue sur les réseaux. Il revient à ceux qui prétendent diriger ou rediriger la ville d’élever le débat. Et si possible de museler ceux qui, à défaut de faire appel à l’intelligence artificielle – « la meilleure et la pire des choses qui soit arrivée à l’humanité » selon l’astrophysicien Stephen Hawking – puisent dans leur intelligence étriquée.
Le philosophe Cicéron affirmait que « rien n’est plus rapide que la calomnie, rien ne se propage plus facilement, rien qui ne s’accrédite plus facilement et ne trouve des gens pour la diffuser largement. » En son temps antique Internet n’existait pas, mais le venin des mots, oui. On sait depuis quelques heures que ceux qui le distillent risquent de passer par la case « prison », avec ou sans sursis.