Des incertitudes tant politiques que géopolitiques pesantes mais un bilan solide. Entre instabilité institutionnelle, crise en Mer Rouge, et autre recomposition des grandes alliances maritimes, l’année 2024 ne s’est pas déroulée en eaux calmes, loin s’en faut. Mais le Grand port maritime de Marseille Fos (GPMM) a tenu bon la barre, notamment grâce à sa stratégie de longue date de diversification.
« C’est une année compliquée et de grande instabilité, a posé, d’emblée, Christophe Castaner, le président du conseil de surveillance, lors de la traditionnelle conférence de presse de début d’année qui s’est tenue ce lundi 27 janvier. Mais on a continué à avancer et je peux vous dire que ce que l’on fait ici reste très regardé, depuis Paris, tout comme au niveau européen ».
Hausse du chiffre d’affaires du port de 7%, à 224,5 millions d’euros
De fait, une fois encore, le port connaît une hausse de son chiffre d’affaires de près de 7%, avec 224,5 millions d’euros en 2024 contre 210,5 en 2023. Et ce, malgré une légère baisse du volume total de marchandises (-2%), soit 70,5 millions de tonnes en 2024 contre 72 millions de tonnes l’année d’avant. « Nous observons un trafic globalement stable, mais avec des performances très contrastées selon les filières », a expliqué de son côté Hervé Martel, le président du directoire.
Dans le détail, c’est le trafic des conteneurs qui a le mieux tiré son épingle du jeu en 2024, enregistrant une croissance de 9%, tandis que, dans le même temps, le leader mondial du transport de conteneurs MSC est devenu le premier client du port avec un trafic en hausse de 75%. Des résultats qui doivent à deux facteurs majeurs pour Hervé Martel. L’un conjoncturel et dû « à peu près pour moitié à l’augmentation du transbordement en raison du détournement des routes maritimes vers le cap de Bonne Espérance ». L’autre tiré par la hausse des flux d’import-export européens avec des destinations telles que la Chine (+12%), l’Algérie (+12%), la Turquie (+13%), ou encore La Réunion (+25%) et l’Égypte (+25%).
Le trafic de conteneurs en hausse, les vracs solides en chute libre
Avec 44,3 millions de tonnes, la filière des vracs liquides est, elle, globalement stable avec un léger recul global de 2%. Les volumes de produits raffinés sont en hausse de 10 %, compensant la baisse des importations de pétrole brut en lien avec les arrêts techniques des raffineries d’Esso et de Cressier en Suisse.
Le gros point noir, en revanche, porte sur le trafic des vracs solides, en baisse de 26% par rapport à 2023 en raison « d’une très forte baisse de l’activité sidérurgique », selon Hervé Martel. Lequel pointe le quasi-arrêt, en 2024, des deux fourneaux d’ArcelorMittal à Fos-sur-Mer et, plus largement les difficultés actuelles du géant mondial de la sidérurgie.
Enfin, concernant le trafic de passagers, le port enregistre une très légère baisse de fréquentation, de l’ordre de 4 %, avec 3,9 millions de passagers en 2024 contre 4 millions un an plus tôt, un record à l’époque. « On se maintient donc à un niveau très élevé », s’est réjoui Hervé Martel, qui souligne par ailleurs que 30 % de l’activité s’est effectuée avec des navires propulsés au GNL (Gaz naturel liquéfié), « de plus en plus propres ».
Les investissements du port en hausse de 30%
Côté d’investissements, le port a dégagé un budget de 99 millions d’euros en 2024, soit une hausse de 30 % en un an ! Près de la moitié de cette enveloppe (47 millions d’euros) a été consacrée à des projets axés sur la transition écologique et la décarbonation, dont 20,8 millions d’euros pour le report modal des marchandises (projets ferroviaires Graveleau et Mourepiane) ; 18,8 millions d’euros pour la connexion électrique des navires à quai et les centrales photovoltaïques ; 4,1 millions d’euros pour le traitement des eaux de carénage et 3,1 millions d’euros pour le verdissement du parc automobile.
Dix millions d’euros ont également été investis dans le développement des activités maritimes, dont 3,5 millions d’euros sur les terminaux vracs liquides. Neuf millions d’euros ont été investis sur les grands projets d’aménagement : études pour le projet Deos consacré à l’éolien flottant, extension du réseau d’eaux industrielles de la ZIF Caban. Enfin 33 millions d’euros ont été investis afin de moderniser les structures portuaires existantes.
Cet effort va être poursuivi en 2025, à hauteur de 99 millions d’euros également. Soit 35 millions d’euros pour le développement de la transition écologique et la décarbonation, 32 millions d’euros pour le développement des activités maritimes et l’aménagement des bassins et des terminaux et le support des activités existantes et 32 millions d’euros pour moderniser les infrastructures portuaires.
Un « mur d’investissement » face au défi de la décarbonation
« Cela démontre une vraie capacité du port à investir et se développer, qui nous offre un vrai levier d’avenir pour nos orientations stratégiques », souligne Christophe Castaner. Car ce n’est qu’un début, insiste le président du conseil de surveillance, qui évoque « un mur d’investissement, de l’ordre de 1 milliard d’euros sur les cinq prochaines années, si on veut être au niveau des défis qui nous attendent, en premier lieu en matière de décarbonation de nos industries. On est à un moments clé. On peut considérer ces enjeux comme une contrainte, j’y vois d’abord une formidable opportunité. »
Des investissements « colossaux et indispensables » qui permettront de répondre aux enjeux environnementaux, de soutenir le développement des industries qui choisissent de s’implanter dans la région et de moderniser les infrastructures portuaires. Les projets ne manquent pas (Carbon, Deos, Gravithy, H2V, Néocarb…), sans compter ceux déjà réalisés (le four à poche d’ArcelorMittal, Knauf, Kem One, Marcegaglia…) et le Grand port maritime de Marseille-Fos, qui bénéficie de « la plus grande zone de projets indistriels en France avec Dunkerque », grâce notamment à ses 709 hectares nouveaux sanctuarisés, est prêt à les accompagner. Christophe Castaner et Hervé Martel ont tracé le cap, « une vision » : faire du port de Marseille, à l’horizon 2050, un « grand hub logistique, passagers, énergétique, industriel et numérique ».
Document source : le bilan 2024 du Grand Port de Marseille Fos
Lien utile :
> Notre dossier consacré aux projets industriels à Fos