Le Breton Jean-Yves Le Drian, né à Lorient, ex-président du conseil régional de Bretagne, est revenu sur les rives de la Méditerranée, à Marseille, mardi 21 novembre, comme il s’y était engagé auprès de Renaud Muselier quelques semaines plutôt lors d’une visite sur le port de la cité phocéenne. Et le ministre de l’Europe et des Affaires étrangères n’a pas fait le voyage pour rien alors qu’il débarquait d’un voyage hautement sensible en Birmanie.
Il s’est exprimé, avec engagement, sur le devenir de la politique méditerranéenne de la France et de l’Europe, en insistant à plusieurs reprises sur le rôle central que Marseille pourrait y jouer. Une intervention remarquée lors de la première édition du colloque Méditerranée du futur qui se tenait à la Villa méditerranée en présence de nombreux élus et décideurs du pourtour méditerranéen. Nous vous proposons une sélection d’extraits du discours de Jean-Yves Le Drian ainsi que l’intégralité du discours en document en source (ci-dessous).
1. A propos de Marseille
« Il était très important que ce colloque ait lieu et qu’il se tienne à Marseille. D’abord parce que Marseille accueille des institutions importantes à vocation méditerranéenne. Elles sont de portée nationale comme l’Agence des Villes et Territoires Méditerranéens Durables (AVITEM) ou internationales comme le Centre pour l’intégration en Méditerranée (CIM). Je tiens à saluer également les représentants de l’Union pour la Méditerranée et les représentants de l’Union européenne qui, à côté des institutions que je viens de citer, co-organisent cet événement. La présence de toutes ces institutions sur le sol marseillais exprime le rôle majeur que Marseille doit tenir comme « pôle méditerranéen ». Je crois que c’est votre ambition M. Le Président. »
« La Méditerranée du futur ne sera pas seulement la Méditerranée des Etats mais celle des acteurs économiques, des villes, des régions, des organisations non gouvernementales, et certainement de la jeunesse. Un forum informel et régulier des acteurs gouvernementaux et non-gouvernementaux, réunissant tous les forces vives de la Méditerranée, pourrait traduire, régulièrement, ici à Marseille, cette réalité, pour créer cette Méditerranée du futur. »
2. A propos de la Méditerranée et de l’Europe
« Le premier message que je tiens donc à vous adresser est un message de confiance : ne nous laissons pas aller à voir la Méditerranée comme un espace éclaté, mais forts de notre histoire et confiants dans l’avenir voyons la comme une chance unique d’enrichissement mutuel et d’intérêts partagés. Cette réalité, cette unité historique et culturelle, ce partage de nos langues, nous devons l’enseigner collectivement aux jeunes générations pour lutter contre les divisions que voudraient exacerber certains. »
« La Méditerranée est le carrefour entre l’Europe et l’Afrique, entre l’Europe et le Proche-Orient. Je suis donc convaincu que l’Union européenne a un rôle à jouer dans cet espace, en tant que co-président de l’UpM, par l’aide au développement qu’elle apporte, par les réunions qu’elle anime. La refondation de l’Europe souhaité par le Président de la République peut aussi s’exprimer dans un cadre méditerranéen. Face aux défis globaux auxquels elle doit répondre, qu’il s’agisse de sécurité, d’économie, d’environnement ou de climat, l’Europe ne peut se projeter sans prendre en compte la dimension méditerranéenne de son avenir. »
« La Méditerranée est enfin un passage. D’abord un passage de et vers l’Afrique. Les pays d’Afrique du Nord sont depuis toujours un lieu d’échanges avec ceux du Sud du Sahara : ce désert est en quelque sorte une mer intérieure. La relation avec les pays du Sahel mérite d’être regardée d’un point de vue « méditerranéen » – et non pas d’un point de vue externe – pour créer un axe intégré entre l’Afrique, la Méditerranée et l’Europe, souhaité par le Président de la République. »
Penser une réponse globale
« Des projets se sont développés, ici et là, sous des formes différentes, ces projets ont permis d’avancer. La question est de savoir si elle suffit à répondre aux défis que je viens de rappeler. Je pense que le temps est venu de franchir un nouveau cap, de penser à une réponse globale. On a essayé dans le passé, cela n’a jamais vraiment abouti, sans doute le temps est-il venu de penser une réponse globale et de passer ensemble d’une Méditerranée des projets à un véritable projet pour la Méditerranée. C’est ce sens que je suis venu vous apporter mon soutien, approuver et apprécier la démarche que vous avez initiée Monsieur le Président. »
3. A propos des institutions et organes de coopération
« Je pense en premier lieu à l’Union pour la Méditerranée (UpM) qui doit savoir mêler la labellisation de projets, notamment dans le domaine de l’intégration économique, la coordination d’actions, voire, et c’est souhaitable, et c’était sa vocation, le dialogue politique. A l’approche de son dixième anniversaire, il appartiendra à ses membres – et la France y prendra sa part – de dire ce qu’ils en attendent, de fixer pour l’avenir un horizon partagé, de susciter des initiatives pour relancer cet espace. »
Un dialogue 5+5 sur le thème du portuaire à Marseille ?
« J’ai dit l’UpM, je pense également au dialogue 5+5. Format plus ancien, format qui nous rassemble, format très actif : il a prouvé son utilité, je l’ai moi-même déjà expérimentée comme ministre de la défense. Il a prouvé son utilité, qu’il s’agisse de tourisme, d’environnement, de culture, d’échanges sur les politiques étrangères, d’échanges de défense, et nous pourrons, comme nous sommes ici dans un lieulaboratoire, imaginer l’étendre à d’autres thèmes, comme il l’a été récemment aux finances. Je pense que l’on pourrait, par exemple, ici à partir de Marseille, étendre le 5+5 aux grandes questions portuaires.
L’intégralité du discours de Jean-Yves Le Drian