En visite dans la cité phocéenne vendredi 11 février dernier, au tribunal judiciaire de Marseille, le Garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti a présenté son « plan Marshall pour la justice phocéenne » qui comprend le renforcement des effectifs de magistrats et la création d’une cité judiciaire d’ici 2028. Cette annonce entre dans le cadre du plan Marseille en grand, annoncé par Emmanuel Macron lors de sa venue à Marseille en septembre dernier (voir nos précédents articles).
Dans un premier temps, le ministre de la Justice a annoncé l’arrivée dès septembre 2022 de seize postes de magistrats supplémentaires : 4 au parquet et 12 au siège. Toujours dans l’objectif de renforcer les effectifs, le plan dévoilé par le ministre comprend également l’ajout de dix postes de greffiers.
Une cité judiciaire à Marseille dès 2028
40 000 mètres carrés. C’est la superficie que doit occuper la future cité judiciaire, également annoncée par Eric Dupond-Moretti, qui sera construite à Marseille d’ici 2028. Elle pourrait accueillir 600 magistrats et fonctionnaires au total, dont trois juges d’instructions supplémentaires, six parquetiers et sept juges correctionnels. Le ministre n’a pas apporté plus de précisions sur le lieu choisi pour accueillir ce futur temple dédié à la justice.
1/2 Aujourd’hui, en présence du bâtonnier Jean-Raphaël Fernandez, le garde des Sceaux, @E_DupondM a officialisé la création, d’ici 2028, d’une grande cité judiciaire. 🏢 40 000m2 dédiés à la justice pour les citoyens marseillais ! #Marseille #Justice #Juridiction #Tribunal pic.twitter.com/tWeXPXh1GH
— Barreau de Marseille (@marseilleavocat) February 11, 2022
Les professionnels de la justice satisfaits mais …
Dans un communiqué conjoint, le syndicat de la magistrature et le syndicat des avocats de France ont réagi dans la foulée des annonces ministérielles. « Poursuivez vos efforts … » invitent-il ainsi Eric Dupond-Moretti. En effet, la profession affiche un enthousiasme modéré face aux promesses : « Nous ne sommes pas dupes des annonces faites à deux mois des présidentielles, pour des demandes que nous faisons depuis des années … » souligne ainsi Nathalie Roche, co-déléguée du syndicat de la magistrature, contactée par Gomet’. « Nous sommes frustrés que les attributions de postes se fassent uniquement sur le volet pénal. Le ministre oublie tout un pan de la justice du quotidien : le juge aux affaires familiales, le juge de proximité, le juge pour enfants, le juge d’application des peines … Le satisfecit du ministre qui va jusqu’à prétendre que la situation s’est améliorée, est plus que déplacé », déplore aussi Nathalie Roche.
« Le satisfecit du ministre de la Justice est totalement déplacé »
Nathalie Roche, co-déléguée du Syndicat de la magistrature
Elle dénonce des promesses « hors sol », qui ne tiennent pas compte de la réalité du terrain. « Le gouvernement annonce une augmentation des effectifs de police à Marseille, ce qui est très bien, mais comment faire s’il y a plus de prévenus mais pas assez de magistrats pour les juger ? » interroge la magistrate. La profession regrette surtout l’insuffisance du nombre de greffiers – seulement dix – au regard des besoins car « ce sont les greffiers qui font fonctionner la justice », précise-t-elle. Pour rappel, lors d’une procédure judiciaire, le greffier assure le compte rendu des débats, prévient les différentes parties des dates d’audience, rédige les procès verbaux et les décisions de justice, entre autres.
Les syndicats ne se montrent pas plus emballés par la promesse d’une cité judiciaire : « une cité d’ici 2028, alors que rien n’est dans les tuyaux, cela paraît irréel. Nous savons très bien que cette promesse ne sera pas tenue ». Pourtant, la justice manque cruellement de locaux, en plus de manquer de personnel : « Nous n’avons que quinze salles d’audience au tribunal. L’Etat avait mis à notre disposition la caserne du Muy pour accueillir les nouveaux locaux du tribunal judiciaire, mais cette dernière n’a pas pu ouvrir ses portes », rappelle Nathalie Roche.
Les syndicats déplorent les conséquences de la prise de conscience tardive du Gouvernement : des audiences surchargées et l’absence de jugement dans un délai raisonnable, un principe juridique pourtant inscrit dans la Convention européenne des droits de l’Homme …
Document source : la réaction du syndicat de la magistrature et du syndicat des avocats de France
Liens utiles :
> Éric Dupond-Moretti en déplacement à Marseille
> Nos précédents articles sur Marseille en grand