Le soleil tape déjà fort en ce milieu de matinée du mercredi 28 juin, à la cité Benza, dans le 10e arrondissement de Marseille. Dans la cour bitumée, au milieu de laquelle un seul arbre permet d’apporter un peu d’ombre, les habitants se sont réunis en masse, se mêlant avec les quelques élus présents. Ce n’est pas tout les jours que le président de la République vient leur rendre visite !
Déclaration du Président @EmmanuelMacron depuis Marseille. pic.twitter.com/OOAmN2wGzT
— Élysée (@Elysee) June 28, 2023
En effet, pour évoquer le sujet du logement, un des thèmes phare de son plan Marseille en grand, Emmanuel Macron a choisi de se rendre sur les terres de Renaissance, dans cette circonscription où l’ex-LR désormais macroniste Lionel Royer-Perreaut a été élu député en 2022. L’Elysée, pour sa part, avance une autre raison pour justifier le choix de cette cité dans le voyage présidentiel : si Benza ne fait pas partie des cités de Marseille jugées « en urgence absolue », elle est en passe de le devenir, et symbolise donc la nécessité d’agir en amont, sans attendre que la situation se dégrade encore davantage. « C’est inhabitable. On s’entasse à plusieurs dans des appartements. Dans les parties communes, les installations datent des années 60, il y a des fusibles en plein air avec lesquels les plus jeunes jouent, des fois des incendies se déclenchent … C’est vraiment très dangereux », déplore Maïdine, habitant de la cité.
Lorsque Emmanuel Macron arrive, la majorité des habitants l’acclament mais certains restent en retrait, affichant une mine pessimiste : « Tu crois que c’est demain qu’il va nous apporter un ascenseur qui fonctionne ? Tout ça, c’est de la poudre aux yeux » souffle une femme qui observe la scène de loin et s’éloigne, le menton en l’air, promener son chien.
11 opérations prioritaires, dont 3 d’intérêt national
Aux (nombreuses) attentes des habitants, Emmanuel Macron a apporté quelques éléments de réponse : le président de la République a annoncé le lancement de onze opérations urgentes sur Marseille, dont trois Orcod-In (opération de requalification des copropriétés d’intérêt national). Ce dispositif d’Orcod-In permet de mener des opérations de pilotages directement gérées par l’Etat, via un établissement public foncier, et permet d’agir de façon globale pour résoudre la problématique des copropriétés dégradées : acquisition du foncier, relogement des habitants, mobilisation de dispositifs coercitifs etc. « Nous allons nationaliser ces copropriétés. Ainsi, là où on mettait sept à huit ans avant pour identifier le problème, nous ne mettrons que 18 à 24 mois. » Il ne précise cependant pas quelles sont les copropriétés concernées par ces opérations.
Le chef de l’Etat veut aussi « changer la loi pour accélérer les travaux d’urgence » et « exproprier plus rapidement les marchands de sommeil » : « Actuellement la loi protège trop ceux qui ne jouent pas le jeu. Mais il y a aussi les délais administratifs qui sont trop longs. Personne ne peut comprendre que des délais d’étude durent deux ans. Nous allons changer cela » affirme-t-il.
La mairie de Marseille satisfaite mais …
Des déclarations qui satisfont à moitié la Ville de Marseille : « Nous avons demandé à Emmanuel Macron un plan global sur les 29 copropriétés dégradées de la ville. Ce dispositif annoncé qui englobe 11 copropriétés, c’est très bien, mais ce n’est pas suffisant. Le risque est que le temps qu’on restructure ces onze copropriétés urgentes, les autres se dégradent encore plus à leur tour. Il faut traiter les 29 copropriétés d’un coup » analyse l’adjoint au logement de la Ville Patrick Amico, interrogé par Gomet’ à Benza.
« Il nous faut des syndics publics gérés par les bailleurs sociaux car certains syndics ne jouent pas leur rôle et font payer des charges abusives. Il faut aussi impérativement déplafonner le montant des aides de l’Anah (Agence nationale de l’habitat, ndlr) pour éviter que les copropriétés aient à avancer le coût des travaux » juge pour sa part Samia Ghali, deuxième adjointe du maire en charge de la relation avec l’Agence nationale de la rénovation urbaine (Anru), qui a aussi fait part de ces remarques au chef de l’Etat. Dans un communiqué (voir ci-dessous), la Ville se félicite néanmoins d’avoir obtenu la lancement d’une opération d’intérêt national, une mesure demandée dans le cadre des Etats généraux du logement, en novembre 2022. « Nous obtenons des avancées concrètes pour lutter contre l’habitat indigne à Marseille et partout en France », se réjouit ainsi le maire de Marseille Benoît Payan.
Ce soir, malgré l’engouement généré par la venue présidentielle, une question doit encore turlupiner les habitants de Benza, à laquelle Emmanuel Macron n’a pas apporté de réponse : auront-ils bientôt un nouvel ascenseur fonctionnel pour gravir les dix étages de leurs tours ?
Document source : le communiqué de la Ville de Marseille à la suite des annonces d’Emmanuel Macron sur le logement
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