Daniela Levy, porte-parole de Osez le Féminisme 13 et d’Osez le féminisme national, nous éclaire sur les actions de son association dans la Métropole Aix Marseille Provence.
Depuis quand existe Osez le féminisme ?
Daniela Levy : Osez le féminisme existe depuis 2009, nous sommes une association généraliste. Nous réagissons à tous les sujets liés à l’égalité entre les femmes et les hommes. Nous disons souvent que nous voulons « féminister la société », ce qui signifie que nous voulons augmenter le niveau de féminisme dans la société. Notre approche est systémique, toutes les formes de violences faites aux femmes sont liées. Nous évoquons le continuum des violences, pour signifier que ce sont les mêmes enjeux et les mêmes mécanismes qui sous-tendent l’ensemble des violences faites aux femmes. C’est pour cela qu’il est important de dénoncer toutes les violences et le patriarcat dans son ensemble. Nous nous mobilisons dès que cela est nécessaire.
Que fait exactement l’association Osez le féminisme 13 ?
D. L. : Nous ne sommes pas une association de terrain, nous n’accompagnons pas les femmes victimes de violences. Nous faisons du plaidoyer. Notre objectif est de faire entendre une parole féministe. Nous faisons des actions de sensibilisation sur les réseaux, nous publions des communiqués de presse pour apporter nos grilles d’analyse sur les sujets d’actualité. Nous sommes également présentes dans la rue par des actions d’happening et des manifestations. Nous organisons et participons à des colloques et à tables rondes. Nous développons des partenariats avec d’autres associations féministes. Nous sommes en lien avec les pouvoirs publics, nous sommes régulièrement auditionnées à l’Assemblée nationale et au Sénat pour apporter nos analyses sur les textes qui sont en discussion. Nous réagissons chaque fois que nécessaire pour dénoncer les violences que subissent les femmes. Et nous sommes forces de proposition pour sensibiliser et construire une société féministe.
Est-ce que le féminisme revient à prendre le pouvoir sur les hommes ?
D. L. : Non. Le féminisme revient à prendre le pouvoir pour obtenir l’égalité entre les femmes et les hommes. Le féminisme, ne revient pas à souhaiter inverser les rôles. Pour le dire de façon un peu provocante, nous ne souhaitons pas violer un homme toutes les 8 mn en France, nous ne souhaitons pas tuer un homme tous les 2,5 jours. C’est pourtant ce que subissent les femmes aujourd’hui, en France. Nous souhaitons abolir ces violences, cela passe par l’abolition de la domination masculine et l’abolition du patriarcat. Les idées reçues sur le féminisme ont la peau dure, même si je peux constater une réelle évolution ces cinq dernières années. Le fait que nous dénonçons un système qui se dit naturel, mais qui n’a rien de naturel, a pour conséquence que les individus qui voient leurs positions avantageuses être attaquées, vont répondre par la résistance.
Avez vous des exemple d’actions déployées dans la Métropole d’Aix Marseille Provence ?
D. L. : Nous allons participer à un colloque sur les violences faites aux femmes, organisé par plusieurs associations dont Osez le féminisme. Il aura lieu 25 novembre à l’université d’Aix-en-Provence. Je prendrai la parole pour évoquer les effets de la mémoire traumatique, lorsque l’on subit des violences sexuelles. Nous préparons la manifestation pour la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes. Elle aura lieu le 27 novembre à 14h devant l’hôtel de ville de Marseille. La manifestation sera organisée par plusieurs associations féministes comme Femmes solidaires Marseille et l’Assemblée des femmes. Cette journée est importante car elle permet d’établir un bilan de ce qui a avancé et de ce qui n’a pas avancé. Nous pouvons constater que les chiffres sur les violences n’évoluent pas. Nous pouvons dénoncer la manière dont les femmes sont accueillies et accompagnées, notamment par les professionnel.les de police et de justice. Les femmes victimes de violences sexuelles ne sont pas suffisamment bien accueillies par les services de police. Les témoignages #double peine en atteste. Le cadre légal existe mais il reste à le faire appliquer et certains textes peuvent encore être améliorés. Les moyens et la volonté politique manquent cruellement.
Les chiffres sur lesquels vous vous appuyez sont-ils fiables ?
D. L. : Nous nous servons notamment des chiffres publiés par le ministère de l’intérieur, par le ministère de la justice et par le service de l’égalité entre les femmes et les hommes. C’est le ministère de la Justice qui annonce que seul 1% des plaintes pour viol aboutissent à la condamnation des violeurs. C’est à partir de ce chiffre que nous parlons de culture du viol et de l’impunité des violeurs. C’est le ministère de l’Intérieur qui annonce qu’une femme est tuée tous les 2,5 jours par son conjoint ou son ex conjoint. C’est à partir de cette information que nous parlons du fait de société massif que représentent les violences conjugales. Les chiffres attestent de l’ampleur des violences contre les femmes. Nous avons besoin de pouvoir faire ce diagnostic, pour nous faire entendre et pour ensuite envisager des solutions à la hauteur des enjeux.
Que faites-vous pour lutter contre le harcèlement de rue ?
D. L. : Nous nous mobilisons sur cette forme de violence depuis 2012, au travers de campagnes de sensibilisation notamment sur les réseaux et dans la rue. Les collages sont présents depuis la création de l’association. Les murs sont un de nos moyens de communication, une des manières de se saisir de l’espace public. Nous sommes aussi en lien avec les pouvoirs publics et avec la ville de Marseille. Avec Femmes solidaires Marseille et l’Assemblée des femmes, nous avons remis au maire de Marseille, Benoît Payan, et à Nathalie Tessier, la déléguée droits des femmes, un texte avec 66 propositions dans l’optique de faire de Marseille une ville féministe. Parmi ces propositions, certaines portaient sur la place des femmes dans les espaces publics. Nous avons été reçus aux alentours du 8 mars dernier par le maire, par Nathalie Tessier et par Audrey Gatian (autre adjointe du maire de Marseille, NNDLR) . Un travail a commencé à être initié notamment autour de la charte européenne de l’égalité. Nous continuons à être en lien et espérons pouvoir faire un bilan d’ici la fin de l’année.
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