Vendredi, jour de marché. Entre les étals habituels du marché de Puyricard, au nord d’Aix-en-Provence, les candidats rivaux au second tour des élections législatives de la 14e circonscription se font face à face. Un climat tendu, mais « respectueux », selon les militants des deux partis, celui d’un côté de Jean-David Ciot (candidat socialiste, affilié au Nouveau front populaire) et celui d’Anne-Laurence Petel (candidate sortante de la majorité présidentielle, Ensemble).
Dans la 14e circonscription comprenant les cantons d’Aix-en-Provence centre, Aix-en-Provence Nord-Est (partie non comprise dans la 11e circonscription), Peyrolles-en-Provence et Trets, Gérault Verny, candidat du RN, est arrivé en tête avec 31,65 % des voix (21 734 votes). Il est suivi de près par Jean-David Ciot du NFP, qui recueille 29,40 % des suffrages (20 242 voix), et par la députée sortante Anne-Laurence Petel du parti présidentiel Ensemble, qui obtient 28,91 % des voix (19 853 votes). La 14e circo est la seule circonscription des Bouches-du-Rhône à présenter une triangulaire pour le second tour des législatives le 7 juillet prochain.
Ensemble : les convictions d’une candidate décriée
10 000 signatures contre le maintien de Petel au second tour
Côté camp macroniste, la fin de la campagne, « ça se passe à fond mais dans une pression incroyable ! » partage Anne-Laurence Petel. « Depuis lundi nous sommes harcelés, il y a un dénigrement permanent de ma personne. Il y a une pétition en ligne portée par le candidat de gauche, totalement irresponsable au regard de la violence qu’il y a, et du contexte, où ma collègue Prisca Thevenot s’est fait agresser. Je ne comprends pas cette violence » témoigne la candidate, en réponse à une pétition lancée par une citoyenne de la 14e circo, pour un retrait de sa candidature (voir notre article).
Une pétition qui s’élève maintenant à presque 10 000 signatures. A noter qu’hier soir, jeudi 4 juillet, Anne-Laurence Petel a reçu le soutien de Renaud Muselier, dans une vidéo où il dit : « Dans cette triangulaire difficile, Anne-Laurence est soutenue par les instances nationales. Elle est en combat contre le Rassemblement national, elle va gagner si vous la soutenez. Donc moi, je suis à fond pour qu’Anne-Laurence Petel puisse continuer à nous représenter à l’Assemblée nationale à Paris ».
Pour la candidate Ensemble, hors de question de céder sa place. « Je veux laisser le choix aux électeurs, un choix républicain, au milieu de choix qui même sous un paravent socialiste constitue des extrêmes. Les électeurs doivent avoir un choix républicain et démocrate, contre le parti de Jean-Luc Mélenchon et celui de Jordan Bardella », insistant sur sa volonté de faire « choisir » les convictions plutôt que de l’opportunisme. Anne-Laurence Petel confie « avoir conscience du risque entrepris » de maintenir sa candidature, « mais c’est un risque respectueux, toutes les voix sont utiles à conquérir, celles de droite et celles de gauche, qui ne doivent pas partir chez un imposteur ». Elle insiste sur ce qu’elle appelle une « imposture » de l’investiture de gauche, « quand vous regardez le programme du NFP on comprend que c’est le retour de l’abaya à l’école, que c’est le matraquage fiscal, que c’est le détricotage des lois votées sur le séparatisme, la laïcité, pour les valeurs de la République. On ne peut pas faire confiance aux socialistes, aujourd’hui Jean-David Ciot dit aux citoyens sur le marché “ne regardez pas le programme parce que moi je me fais élire avec Mélenchon mais je trahirai demain, ne vous inquiétez pas”, ce n’est pas une candidature de conviction ».
Pour Jean-David Ciot, l’adversaire « c’est le RN, pas Anne-Laurence Petel »
Un peu plus loin dans l’allée, Jean-David Ciot, sa suppléante Noëlle Ciccolini-Jouffret, et son équipe de militants, interpellent les passants. Jean-David Ciot veut le faire entendre, « j’ai été désigné clairement comme le candidat capable de barrer la route à l’extrême droite ». Et ses derniers jours de campagne « se passent bien », grâce à des rencontres « de gens qui m’encouragent, même de ceux qui n’ont pas voté pour moi au premier tour et qui disent aujourd’hui assumer de me faire élire, devant le risque du Rassemblement national ».
Jean-David Ciot remercie par ailleurs les derniers soutiens qu’il a reçus, dont ceux de Olivier Dussopt (ancien député Renaissance), de Mohamed Laqhila (candidat MoDem vaincu qui s’est désisté dans la 11e circo des Bouches-du-Rhône), et celui de Maryse Joissains l’ancienne maire LR d’Aix, concurrente que le candidat socialiste avait battue dans la 14e circonscription aux législatives en 2012. « On n’avait pas les mêmes orientations politiques mais on a su s’affronter sans s’insulter ni diffamation. Certains devraient en prendre conscience, les attaques n’élèvent pas le débat politique. Nous avons des responsabilités politiques, chacun les assume », commente Jean-David Ciot. Interrogée par Gomet’ en début de matinée, le maire d’Aix-en-Provence, Sophie Joissains, ne souhaite en revanche pas donner de consigne de vote, « je veux rester dans une position où j’écoute la population et j’essaie de comprendre ce qu’elle souhaite, ce qui va pas et ce qui ne va pas. »
Le candidat promet une députation de « rassemblement », « j’ai toujours été socialiste et en même temps je suis une personnalité d’ouverture, de rassemblement, je suis social-démocrate. Je crois en l’économie, parce que si l’on ne crée pas de richesses, on ne crée pas d’emplois, il y a une question d’équilibrage à travailler ». Maire du Puy-Sainte-Réparade, il est pourtant dans sa commune derrière le RN à 36,79 %, contre 31,62 % des suffrages exprimés. Un contexte périurbain sur lequel Jean-David Ciot promet de s’engager, « j’entends les revendications et les souffrances des citoyens, leur sentiment de déclassement, en particulier chez les électeurs du RN. Je veux redonner voix aux périurbains. J’ai cru en la politique d’Emmanuel Macron, mais aujourd’hui je fais le constat qu’elle ne fonctionne pas, la fracture sociale n’a fait que s’aggraver. Je suis la personne locale qui promet de faire entendre toutes les voix, il y a un travail de reprise de confiance à faire ».
Et pour le second tour, la place n’est pas à la polémique de la triangulaire, le candidat du Nouveau front populaire l’affirme : « mon adversaire politique c’est l’extrême-droite, pas Anne-Laurence Petel, elle a pris ses responsabilités de se maintenir et je le regrette, je le lui ai dit mais c’est son choix. Elle prend une responsabilité de faire un marchepied pour l’extrême-droite, elle l’assumera. Mon adversaire est un monsieur (Gérault Verny, candidat RN), qui ne vient pas d’ici, qui refuse les débats, j’aurais aimé lui demander pourquoi a-t-il financé le Livre noir de Zemmour, pourquoi finance-t-il les militants anti-avortement, qui explique que le racisme latent n’est pas si grave,… on ne peut pas savoir, il est caché dans l’ombre et ne parle pas, je ne sais pas au fond ce qu’il pense ».
En savoir plus :
Notre dossier d’actualités consacré aux législatives