Vue de l’extérieur, la Villa Méditerranée a une physionomie résolument moderne. Mais à l’intérieur, c’est une tout autre histoire … Depuis mai, les travaux pour transformer le sous sol de la Villa en réplique de la grotte Cosquer battent leur plein. Un chantier à 24 millions d’euros, financé à hauteur de 8 millions par la Région Sud, le reste étant à la charge de la société exploitante, Kléber Rossillon, qui a remporté l’appel d’offre de la région en 2019 avec Eiffage et l’architecte Corinne Vezzoni.
Les premiers résultats des travaux sont frappants de réalisme : à grand renfort de béton et de peintures, les anciens murs ont pris l’aspect d’une roche sableuse et irrégulière. L’ancien escalier en colimaçon permettant d’accéder au rez-de-chaussée a cédé la place à une immense cavité rocheuse. Dans un coin de la « faille des bisons », première salle dans laquelle a débouché Henri Cosquer, une peintre s’affaire à reproduire un effet d’humidité sur de fausses stalactites. Plusieurs peintures rupestres ont déjà été reproduites, dont la fameuse « main de la découverte », « celle grâce à laquelle le plongeur a compris qu’il n’était pas le premier homme à pénétrer dans la grotte », relate Kléber Rossillon, fondateur de la société éponyme.
Un peu plus loin, en levant les yeux, on remarque un drôle d’oiseau dessiné à même la roche : aussi incroyable que cela puisse paraître, « il y a 20 000 ans, des pingouins vivaient dans la Méditerranée, à Marseille. Ils cohabitaient avec des lions, des phoques moines, ou encore des cerfs, des animaux que l’on retrouve également sur les murs de la grotte », poursuit Kléber Rossillon, en connaisseur du sujet. Les 15 panneaux comprenant des peintures bien spécifiques, comme le panneau des chevaux, ont pour leur part été fabriqués dans des ateliers spécialisés en art pariétal, situés notamment en Dordogne. Certains sont déjà arrivés sur place, comme le panneaux « des mains noires » ; d’autres, tels que l’emblématique « panneau des chevaux », se font encore attendre. Une fois achevée, la grotte constituera un parcours de 200 mètres de long que les visiteurs pourront effectuer à bord de petits modules électriques.
Réplique de la Grotte Cosquer : un chantier complexe
Ce n’est pas une mince affaire que d’adapter les 1500 m2 de cet espace aux proportions de la grotte originelle, qui en mesure 2500. Pour y parvenir, il a fallu découper la grotte en six « écailles », ou salles, et ôter tout ce qui correspondait aux tunnels dans la grotte. De même, la physionomie de la grotte a radicalement été revue : « Il n’était pas possible de conserver la forme et le niveau des sols d’origine, qui ne sont pas droits et très proches du plafond », explique Frédéric Prades, directeur de la Grotte Cosquer Méditerranée – le nom du projet final.
« La phase préliminaire d’études aurait dû durer un ou deux ans ; elle a duré seulement quelques mois »
Laurent Delbos, chargé de mission pour Kléber Rossillon
« Il fallait que la boîte ne rentre pas dans la boîte, sinon cela aurait été trop facile ! », plaisante Laurent Delbos, chargé de mission pour le compte de la société Kléber Rossillon. S’il en sourit aujourd’hui, il reconnaît que « ce chantier a occasionné quelques nuits blanches » à l’équipe. « Le timing est très serré : rendez-vous compte, deux ans pour tout réaliser ! Le problème n’est pas la reconstitution de la grotte en soit. Les grottes, on sait les faire : il y a eu Chauvet, Lascaux… Mais dans leur cas, les études avaient déjà été réalisées au préalable. Là, les études ont été lancées au moment où il a été décidé de faire la réplique ! Toute cette phase préliminaire d’études, qui aurait dû durer en moyenne un ou deux ans, a été raccourcie à quelques mois seulement». Aujourd’hui, « le chantier a rattrapé son retard », affirme Laurent Delbos.
Autre difficulté : les problèmes de corrosion de la Villa Méditerranée qui persistent depuis plusieurs années et compliquent d’avantage le chantier : «Aujourd’hui, on évacue 80 mètres cube d’eau par jour, ce qui est très inférieur au maximum de ce que l’on peut évacuer. Toutefois, des travaux d’étanchéité on été faits partout dans le bâtiment. Par ailleurs, les endroits où nous avons ces infiltrations ne sont absolument pas proches de la grotte », rassure Frédéric Prades. En effet, l’étanchéité du bâtiment doit être assurée, surtout qu’il est prévu d’installer 360 mètres carrés de bassin d’eau dans la grotte, afin d’ajouter du réalisme, la véritable grotte étant elle-même remplie en partie d’eau au moment de sa découverte par Henri Cosquer.
Jusqu’à 4000 visiteurs par jour
A ce stade du chantier, les promoteurs du projet se tournent vers l’avenir : « Nous envisageons un départ des modules toutes les cinquante secondes. Chaque modules pouvant accueillir six personnes, nous pourrons aller jusqu’à 4000 visiteurs par jour. Sur une année, nous espérons accueillir entre 500 000 et 600 000 visiteurs », projette Frédéric Prades qui ajoute : « Ce ne sont pas des chiffres fantaisistes : ils sont fondés sur ceux de la fréquentation de la réplique de la Grotte Chauvet (également exploitée, en Ardèche, par Kléber Rossillon, ndlr) ou du Mucem à leur ouverture. »
Mais le chantier de l’ex-Villa est loin d’être terminé. Hormis le sous-sol, tout le reste du bâtiment reste à aménager. En effet, comme le rappelle Frédéric Prades « il n’y a pas que la grotte qui sera à visiter. » En effet, le souhait des exploitants est d’immerger au maximum les visiteurs dans l’aventure d’Henri Cosquer : « Cela commencera pas une entrée dans la Villa transformée en ancien port de pêcheurs des années 80, qui se veut être celui de Cassis. Puis, les visiteurs passeront devant le Bar de France, qui proposera un véritable service de restauration mais sera lui aussi scénographié, avant de rentrer dans un monte-charge, qui les emmènera en sous-sol pour visiter la grotte. Ils accèderont ensuite à l’amphithéâtre où ils pourront visionner un film réalisé spécialement pour la visite qui retrace la découverte de Cosquer. La visite de terminera par une dernière étape dans le porte-à-faux de la Villa Méditerranée qui sera consacrée à la reconstitution d’un habitat préhistorique, d’animaux de l’époque et à la réflexion sur la montée du niveau de la mer », détaille Frédéric Prades.
« C’est magnifique, le souci du détail, cette collaboration entre les scientifiques, le délégataire, les politiques pour afficher notre culture mémorielle. Cette exposition nous interroge sur l’avenir de notre planète mais aussi nos origines. C’est un projet qui ne concerne pas que la Région, mais le monde entier », insiste pour sa part Richard Strambio, conseiller régional délégué au patrimoine et à la mémoire.
Les premières images du chantier de la Grotte Cosquer
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