L’histoire d’Abelio commence par une passion. Grégoire Dupré est en classe de 3e et il est un praticien assidu d’aéromodélisme. Une passion qui ne le quitte plus depuis 10 ans. Doué en sciences, après le lycée Salliège, à Toulouse, il entre en école d’ingénieur à Grenoble à l’ISC Phelma, mais avec le statut « d’étudiant entrepreneur » qui lui permet de mener à bien son projet de création de drones à voilure fixe. Un ami de son père, Philippe Caumes, 61 ans, docteur en mécanique physique, spécialiste de l’ingénierie des systèmes complexes dans des domaines de hautes technologies, membre du pôle de compétitivité Pégase à Aix-en-Provence, suit ce parcours avec bienveillance. En 2017, cette passion des objets volants se concrétise et le binôme se constitue pour créer une start-up qui va développer un drone intelligent, solaire, au bilan carbone irréprochable, mais surtout qui va devenir un outil de l’agriculteur.
Pour atteindre des niveaux de rentabilité acceptables, les exploitants agricoles ont agrandi leurs terres. L’identification des carences en eau, en engrais ou encore l’apparition de maladies et de parasites, est encore aujourd’hui principalement effectuée visuellement par les agriculteurs lorsqu’ils le peuvent. Le paysan sait en observant ses champs s’il faut arroser, traiter, enrichir les sols. Aujourd’hui, ce que l’on appelait « le tour de plaine » est impossible. Les problématiques prioritaires rencontrées par l’exploitant sont les adventices (les mauvaises herbes), les maladies et les ravageurs. L’agriculteur a donc tendance à prévenir les risques, sans avoir des données précises. Dans un souci de rentabilité, il tente d’agir massivement, via des produits phytosanitaires ou avec le désherbage systématique et des résultats désastreux pour l’environnement et la qualité des produits.
Le « tour de plaine 2.0 »
« Notre idée, explique Philippe Caumes à Gomet’, est de remplacer l’œil de l’agriculteur, de faire un « tour de plaine 2.0 » et d’apporter à l’exploitant une information précise, actualisée, lisible pour savoir s’il doit traiter, arroser, désherber. » Abelio a conçu un système avec trois composantes :
- Un drone solaire autonome,
- Des capteurs qui saisissent des longueurs d’onde invisibles à l’œil humain, (proches de l’infrarouge) mais qui mesurent la réfractance de plante. Chaque maladie ayant une « signature spectrale », l’image donne, grâce à un logiciel intelligent, un diagnostic de la plante et donc identifie le traitement approprié et mesuré. Les produits phytosanitaires, l’eau et les engrais sont limités au strict nécessaire : la bonne dose, au bon endroit et au bon moment.
- Le logiciel est capable d’analyser l’ensemble des problématiques touchant l’exploitation à partir de toutes les informations collectées : données du drone, images satellites, données météorologiques et prises de terrain.
La start-up est née à l’incubateur du Village by CA à Toulouse et a levé ses premiers financements avec Airbus Développement, BPIFrance et la Région Occitanie.
Le siège est dorénavant aixois et a reçu l’appui de Pays d’Aix développement. Abelio vient de clore une levée de fonds en crowdfunding avec Sowefund. L’objectif affiché était de 500 000 € avec un pallier de levée à 300 000 €, atteint de justesse. Un beau résultat dans une conjoncture chahutée. Une bonne base pour solliciter Région Sud Investissement, la banque en crédit ou à nouveau BPIFrance. L’objectif est de passer en phase opérationnelle en 2021.
Les essais, (la preuve de concept) se font dans une ferme expérimentale près de Toulouse. Des développements sont encore nécessaires pour fiabiliser les services. Les premiers tests affichent des résultats sympathiques de 98 % de fiabilité, mais sur des terres de moins de 20 hectares. Les cibles sont plus vastes : des exploitations agricoles de céréales et oléoprotéagineux de plus de 100 hectares, qui représentent 80 000 exploitations environ en France.
Pour une agriculture de précision
Le système sera en fait une prestation globale pour l’agriculteur, simple à implémenter. La solution est déployée par un « télépilote » missionné par Abelio. Le drone réalise de 15 à 20 vols par saison, sur la base d’un abonnement annuel de 25 €/an/hectare selon la culture. L’exploitant pourra faire plus et acheter le drone : il aura une surveillance quotidienne et automatisée des cultures, avec des données consultables, comme la météo.
Pour commercialiser ce service innovant, Abelio compte sur le relais des coopératives qui sont le vecteur des pratiques des paysans et qui ont des moyens financiers décisifs. L’entreprise s’est déjà rapprochée de plusieurs coopératives de grande envergure. L’enjeu pour les fondateurs est de promouvoir au-delà d’une application, une agriculture de précision qui permet de préserver les cultures et donc leur rendement, d’optimiser l’utilisation des produits phytosanitaires et fertilisants et d’économiser la consommation d’eau.
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