L’annonce a fait l’effet d’un coup de massue aux acteurs du monde économique et une partie du monde judiciaire à Marseille : la délocalisation de l’activité judiciaire, historiquement localisée en centre-ville, vers le quartier d’Euroméditerranée, dans une même cité judiciaire neuve.
Lors de cette annonce, faite en novembre 2023, le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti avait exhorté les collectivités locales à mettre en place des mesures pour préserver le centre-ville. En effet, la crainte des acteurs économiques est la fuite des cabinets d’avocats pour se rapprocher de la future cité judiciaire, qui constituerait une perte conséquente de clientèle. A l’occasion de ses vœux à la presse, jeudi 18 janvier, le préfet de la région Provence Alpes Côte d’azur et des Bouches-du-Rhône Christophe Mirmand a apporté des précisions sur l’avenir du cœur commerçant de la cité phocéenne. Parmi les solutions pour maintenir l’activité en centre-ville, le haut fonctionnaire cite la possibilité de créer une zone franche, c’est-à-dire une zone bénéficiant de règles fiscales plus incitatives afin de favoriser le maintien des cabinets comme des commerces…
Mais cette solution relève encore du domaine de l’hypothèse. Et l’idée n’est pas neuve. L’ancienne municipalité l’avait demandée au gouvernement socialiste de Manuel Valls au milieu des années 2010. « Cette zone franche que nous demandons dans l’hyper centre-ville, entre la Canebière et la place Castellane, nous permettrait de faire repartir le commerce et l’emploi et d’obtenir des aides pour la réhabilitation des logements dégradés », affirmait ainsi Solange Biaggi, l’adjointe de Jean-Claude Gaudin, déléguée au commerce et à l’artisanat dans nos colonnes en novembre 2016.
Une concertation « dans les semaines à venir »
Il promet ainsi la tenue d’une concertation avec les acteurs concernés « dans les semaines à venir » afin de répondre à plusieurs questions : la délocalisation va-t-elle vraiment engendrer la fuite des cabinets d’avocats ? Ou la ligne de tramway entre les catalans et la rue de Rome – qui rejoindra le métro vers Arenc – permettra-t-elle d’assurer leurs déplacements depuis le centre-ville ? Quelles autres activités peuvent prendre place en lieu et place des anciens palais de justice ? Ce sont quelques unes des problématiques qui seront, à n’en pas douter, soulevées lors de cette concertation. Une première réunion doit avoir lieu la semaine prochaine avec les services de l’Etat, affirme le préfet.
Benoît Payan : « J’avais proposé deux espaces dans des écoles »
Interrogé à nouveau sur ce sujet à l’issue de ses vœux à la presse jeudi 11 janvier, Benoît Payan dit prendre acte : « Le gouvernement, soutenu par la Région Sud et la Métropole a fait un choix. Je n’ai pas la main sur ce gouvernement. […] J’avais proposé deux espaces dans des écoles [pour accueillir la cité judiciaire] mais le ministre de la Justice (Eric Dupond-Moretti, ndlr) m’a dit que ce n’était pas possible », relate-t-il, résigné.
Relancé par Gomet’ sur les solutions que la mairie pourrait mettre en place, notamment dans le cadre de son plan centre-ville, pour venir en aide aux commerçants dans ce contexte, l’élu s’agace : « C’était au ministère de le faire. Chacun doit prendre ses responsabilités. Moi, je suis républicain et je m’alignerai sur les décisions prises. Si certains ont fait des promesses de Gascon au président de la CCI, qu’ils s’alignent dessus ! » gronde Benoît Payan, en ciblant indirectement le ministère mais aussi la Métropole et la Région.
Martine Vassal dénonce l’inaction de la Ville de Marseille
La présidente de la Métropole Aix-Marseille Provence et présidente du Département des Bouches-du-Rhône, qui présentait elle aussi ses voeux à la presse, lundi 8 janvier, a une toute autre interprétation que celle du maire de Marseille. « Ce que je regrette c’est qu’il n’y ait pas eu plus de concertation, notamment avec la Ville de Marseille pour qu’elle fasse une proposition parce qu’il y avait effectivement une possibilité. »
Martine Vassal souligne au passage que, en vertu de la loi sur la décentralisation, « le tribunal Autran, celui du commerce et le palais Monthyon sont propriétés du Conseil départemental ainsi que le bâtiment du tribunal administratif en face qui est parti. Nous sommes parties prenantes sur le devenir de ces espaces. Aujourd’hui, faute d’actions et de propositions de la Ville de Marseille, pour essayer de récupérer des bâtiments en face et d’essayer de faire quelque chose, le ministre de la Justice a pris cette décision, a priori sur le périmètre d’Euroméditerranée. Et d’ajouter : « Heureusement que l’on a fait le tramway… Au moins cela permettra de pouvoir aller d’un point A à un point B assez rapidement. »
Si la décision est confirmée, les modalités restent floues : « il y a eu une annonce mais nous n’avons pas le planning », il s’agit pour Martine Vassal de « dès maintenant travailler sur le futur de ces bâtiments. Et pour cela il faut avoir des interlocuteurs qui ont envie de dynamiser le centre-ville… Je les ai avec la chambre de commerce et l’union patronale. »
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