La rénovation du quartier de Noailles, grande promesse politique de la nouvelle majorité municipale liée à la catastrophe de la rue d’Aubagne, semble enfin s’amorcer. La mairie centrale, en partenariat avec la mairie du 1/7, vient en effet de lancer une « contribution citoyenne » pour permettre aux « habitants et habitués » de la rue d’Aubagne de donner leur avis sur l’avenir de cette rue au passé funeste : en effet, le 5 novembre 2018, les numéros 63 et 65 de la rue d’Aubagne s’effondrent et entraînent la mort de huit personnes.
Aujourd’hui, la Ville souhaite insuffler à nouveau de la vie sur cette portion de Noailles, sur le haut de la rue d’Aubagne, en permettant aux familles, commerces, associations, activités de s’y réinstaller. Deux journées de forums ouverts le samedi 12 mars et le dimanche 27 mars (voir invitation ci-dessous) seront ainsi menées par l’association Destination Familles, afin de permettre aux habitants d’échanger. La mairie et Destination Familles s’appuient également sur le tissu associatif déjà existant à Noailles (Noailles debout, Minots de Noailles, Because U art, etc.) pour effectuer du porte à porte et organiser des ateliers dans le but de recueillir l’avis de ceux qui ne feront pas forcément le déplacement pendant les forums.
Les conclusions issues de cette « contribution » citoyenne seront ensuite restituées sous forme de livrables et à l’oral. Il est bien question d’une « contribution » et non d’une « consultation » souligne la maire de secteur Sophie Camard : « Il s’agit de mettre les riverains à contribution du projet, de nous aider à le construire, pas simplement de leur demander leur avis sur un projet déjà défini », explique-t-elle à l’occasion d’une conférence de presse organisée lundi 7 mars pour présenter le dispositif.
Une « maison des projets » à Noailles pour renseigner les habitants
Afin de pousser la concertation encore plus loin, la Ville a relancé l’idée d’une maison des projets, déjà évoquée par le passé sur l’emplacement de l’ancien écailler Toinou. Cette hypothèse n’est a priori plus envisagée et la Ville « est en train de regarder son patrimoine », pour déterminer où l’implanter, précise Mathilde Chaboche. Elle devrait ouvrir ses portes « courant 2022 dans l’hypercentre de Marseille », selon l’adjointe à l’urbanisme Mathilde Chaboche, afin d’être « un lieu totem pour l’information des habitants, mais également un lieu qui pourrait accueillir des ateliers pour les enfants par exemple », ajoute l’élue.
Par ailleurs, comme le précise l’adjointe à l’urbanisme, cette « contribution citoyenne » qui s’amorce n’est « qu’une première brique ». En effet, une seconde phase de concertation s’ouvrira ensuite pour une durée de quatre ans, afin de permettre le dialogue avec les habitants sur le long terme. Cette concertation sera menée par un prestataire choisi à l’issue d’une procédure d’assistance à maîtrise d’ouvrage.
Ce n’est pas la première fois que la Ville prend l’initiative de demander l’avis de la population : en 2020 déjà, elle avait organisé une concertation citoyenne sur l’avenir du quartier de Noailles dans sa totalité.
Un dossier déposé à l’ANRU ce mercredi 9 mars 2022
Cette réhabilitation de la rue d’Aubagne s’inscrit dans un projet plus large prévu dans le projet partenarial d’aménagement (PPA), piloté par la Société publique locale d’aménagement d’intérêt national (SPLA-IN), qui réunit l’Etat, la Métropole et la Ville de Marseille. « Lors de notre arrivée à la municipalité, la SPLA-IN n’était qu’une coquille vide », observe Sophie Camard, mairie du 1/7 et seule représentante de la Ville au sein de la société. Depuis la mise en service de la SPLA-IN, les acteurs impliqués ont avancé étape par étape en procédant à des enquêtes sur l’état du bâti et en recensant le patrimoine de la puissance détenu par la puissance publique.
« On compte aujourd’hui seulement 4% de vrai logements sociaux sur le secteur de Noailles, mais il y a encore trop de logement sociaux dit “de fait”, c’est-à-dire de l’habitat indigne »
Sophie Camard, maire du 1/7
Autre étape importante : le dépôt d’un dossier ce mercredi 9 mars auprès de l’Agence nationale de la rénovation urbaine (Anru) afin d’obtenir un financement avoisinant les 350 millions d’euros sur un coût total de 600 millions d’euros sur la totalité du PPA, soit quatre îlots au total (deux à Noailles, deux dans le 3e arrondissement) ainsi qu’un cinquième îlot englobant le patrimoine des collectivités publiques (70 immeubles au total sur les deux îlots de Noailles). Les collectivités publiques souhaitent qu’une grande partie des immeubles soit dédiée à du logement social ou pour les salariés, et qu’une part soit réservée à l’innovation. « On compte actuellement 4% seulement de vrai logement social sur Noailles, mais il y a trop de logement sociaux de fait, c’est-à-dire d’habitat indigne» déplore la mairie du 1/7. Ville et Métropole espèrent que l’enclenchement du processus de restauration donnera l’impulsion aux propriétaires privés qui pourront engager aussi des rénovations grâce aux aides de l’Agence nationale de l’habitat (Anah). « Sinon, nous devrons les contraindre par des moyens coercitifs », avertit Sophie Camard.
Pour une fois, Ville et Métropole semblent avancer de concert. « Nous avons voulu sanctuariser la question de l’habitat indigne de nos désaccords politiques », insiste Sophie Camard, qui se réjouit de la fluidité des rapports avec la Métropole sur ce dossier. Mercredi 2 février, la maire de secteur était également aux côtés du président de la SPLAIN et vice-président métropolitain David Ytier pour la remise de clés de l’emblématique immeuble Le Noailles, sur la Canebière, qui accueillera prochainement 22 logements sociaux. « La preuve qu’il est possible d’avoir du logement social en centre-ville », se réjouit Sophie Camard.
22 logements sociaux dans l’immeuble Le Noailles
Belmondo, Arletty ou encore Fernandel y ont séjourné. Jadis, le Grand hôtel Noailles Métropole faisait rayonner la Canebière. A l’issue de cette période faste, le 62-66 La Canebière accueille le commissariat de Noailles, mais aussi des bureaux. Resté vide pendant plusieurs années et racheté par l’Etablissement Public Foncier (EPF) Provence-Alpes-Côte d’azur, le bâtiment voit une nouvelle étape de son histoire s’enclencher. En effet, il accueillera prochainement pas moins de 22 logements sociaux, répartis sur 1200m² de locaux. C’est le bailleur social Logirem qui récupère la gestion des lieux et y entamera des travaux à compter de juin 2022, pour une livraison en juin 2023. Mercredi 2 février dernier, l’EPF a officiellement remis les clés du bâtiment à Logirem, mais conserve tout de même ses bureaux dans une partie du bâtiment.
La conception des logements a été confiée à l’Atelier Donjerkovic, qui a eu à cœur de mettre à profit les caractéristiques haussmanniennes des lieux : « Nous avons utilisé la hauteur sous plafond de 4 mètres pour créer des mezzanines », explique Mathilde Rieu, architecte, à Gomet’. Le coût mensuel des logements loués à partir de juin 2023 oscille entre 200 euros (pour un F1) et 650 euros (T5).
Liens utiles :
> Le site de Destination Familles
> [Interview] La Plaine, Noailles, Belsunce, SPLA-IN, …les chantiers de Sophie Camard (2/4)
> Avenir de Noailles : la mairie de Marseille invite des habitants à la concertation