Anne-Marie Perez est la directrice générale du pôle de compétitivité régional Capenergies, structure à l’initiative du H2 Club en Région Sud. Elle est également déléguée régionale Sud pour France Hydrogène. Cette structure vise à accélérer le développement des solutions hydrogène, afin de « réindustrialiser le territoire, d’accélérer la transition énergétique et de créer de la valeur localement ». La quête de ces objectifs nécessite parfois une évolution du cadre réglementaire.
L’hydrogène est au cœur de l’actualité locale, notamment avec les récentes avancées du projet européen de pipeline H2Med entre Barcelone et Marseille. Mais aussi avec la multiplication des projets structurants à l’échelle métropolitaine, notamment sur le bassin de Fos-sur-Mer et de l’étang de Berre. À Paris, se déroule mercredi 1er et jeudi 2 février le salon HyVolution, pour lequel la Région Sud a mobilisé une délégation conséquente (dossier de presse en fin d’article).
Comment expliquer la multiplication des projets liés à la création, au transport ou à l’utilisation de l’hydrogène dans la zone de Marseille-Fos ?
Anne-Marie Perez : Ce territoire est l’un des plus carbonés de France, aux côtés de Dunkerque. Cela s’explique notamment par la présence des industries, de la raffinerie, de la pétrochimie, de la sidérurgie, entre autres. Le tout représente 20% des émissions de CO² en France. Mais il existe plusieurs leviers pour décarboner ce Marseille-Fos dont l’hydrogène. Le fait qu’on ait une zone industrielle autour d’un des plus grands ports d’Europe, qui dispose déjà de nombreuses infrastructures, fait en sorte qu’on a besoin d’hydrogène pour décarboner l’ensemble des usages (trafic terrestre, maritime, aérien, ndlr). Et c’est pour cela qu’il existe autant de projets.
Tel que présenté, l’hydrogène s’apparenterait presque à une solution « magique » pour décarboner l’industrie et les transports, non ?
A-M.P : Ce n’est pas magique, parce que c’est une solution de décarbonation parmi d’autres. Disons que l’hydrogène a sa place, pour certains usages, dans certaines conditions, parce qu’il n’existe pas encore de solutions alternatives. C’est une molécule qu’on connaît, et qu’on utilise déjà dans l’industrie. On ne part pas de zéro. Le défi maintenant, c’est de réussir à produire à échelle industrielle, et à un prix compétitif. Aujourd’hui, 60% du prix de l’hydrogène en exploitation est lié au coût de l’électricité utilisée pour sa production. Par ailleurs, certaines réglementations européennes exigent désormais que l’hydrogène soit vert, c’est-à-dire qu’il soit obtenu à partir d’électricité renouvelable. Donc il faut avoir accès à cette production, et de manière compétitive. Ce qui est important, pour réussir ce développement, c’est d’avoir une approche systémique, et de travailler collectivement.
Différentes couleurs sont utilisées pour qualifier l’hydrogène : gris, vert, bleu… À quoi correspondent-elles ?
A-M.P : L’hydrogène gris, c’est celui qu’on utilise actuellement. Il est élaboré, à partir de gaz naturel, un combustible fossile, par un processus appelé vaporeformage. C’est une méthode qui émet du CO². L’hydrogène décarboné, quant à lui, est produit, non plus à partir de gaz, mais à partir d’électricité décarbonée. Il existe plusieurs manières d’obtenir de l’hydrogène sans carbone, mais la majorité des projets s’appuient aujourd’hui sur le processus d’électrolyse de l’eau, c’est-à-dire avec des électrolyseurs.