Le métier est d’une grande discrétion. La généalogie successorale s’impose pourtant de plus en plus dans des situations des familles recomposées, des trajectoires internationales improbables ou des conflits avec amnésie sélective. Un acteur immobilier, va rechercher les propriétaires d’une copropriété ou un bien en déshérence, un banquier est tenu de retrouver les héritiers d’un coffre-fort qu’il devra garder 20 ans s’il ne retrouve pas les légitimes propriétaires, un aménageur devra lever les options d’un immeuble en indivision ou tout simplement et plus couramment les notaires ont le devoir de ne clore une succession que lorsqu’ils se sont assurés que tous les ayants droit ont été identifiés.
À Aix en Provence, l’Étude généalogique Guénifey fait partie du top four national des cabinets généalogiques successoraux avec 150 collaborateurs et des succursales à Bordeaux, Caen, Chartres, Dijon, Lille, Lyon, Marseille, Montpellier, Nantes, Nice, Niort, Paris, Quiberon, Rennes, Rouen, Toulouse, Tunis. Julien Llorca pilote l’entreprise depuis cinq ans et en est le PDG depuis 2019. Fondée en 2001 par Jean-Philippe Guénifey, l’Étude généalogique Guénifey assure la vérification des dévolutions successorales, la recherche d’héritiers et leur représentation lors du règlement de la succession.
Jean-Philippe Guénifey a souhaité, en 2017, prendre du recul. Un Family office, Néopart, est entré au capital et il a fait intervenir un manager de transition Julien Llorca pour recadrer la société. Après une carrière dans la logistique l’informatique le transport, Julien Llorca est devenu en 2011 consultant et manager de transition et il est intervenu dans plusieurs entreprises souvent pour des difficultés liées à la succession.
En 2019 Jean-Philippe Guénifey organise la cession de l’étude. Le Family Office cède ses parts à Matignon Investissement, BNP Développement (23 %) et le fonds tunisien AfricInvest (12 %). Julien Llorca entre au capital avec près de 10 % des parts. Julien Llorca bouscule un peu les équipes et accélère, mais veut récompenser. Un plan d’actions gratuites permet à une douzaine de collaborateurs historiques d’entrer au capital pour 5 % du capital.
En 2017, l’Étude Guénifey réalise 6,5 millions d’euros de chiffre d’affaires. En 2023 avec 160 personnes, elle compte boucler son chiffre d’affaires à 25 millions d’euros (15 millions d’euros en 2021).
Julien Llorca s’est pris de passion pour la généalogie successorale : « Je suis pied-noir, corse, espagnol et syrien, confie-t-il à Gomet’, c’est un travail sur la matière humaine. Nous traitions avant notre discussion, un dossier qui nous amène en Côte d’Ivoire, en passant par les Pays Bas avec des biens en Espagne. Et bien entendu une situation de vie de famille avec deux mariages et six enfants. Dans un enchevêtrement des législations ; c’est passionnant ! »
Le contrat de révélation
Le modèle économique repose sur le contrat de révélation, un mandat de représentation des héritiers identifiés. « Quand tout se passe bien, raconte Julien Llorca, un dossier dure 18 mois à deux ans. En fonction des complexités, c’est plus long. En 2023, nous encaissons des dossiers ouverts depuis 2005 ou 2006. 30% de nos rentrées viennent de dossiers qui ont plus de cinq ans. Ce métier génère des charges fixes importantes, nous pouvons gérer des procès de voisinage par exemple, un redressement fiscal, des prestations immobilières de sauvegarde, payer l’assurance, murer une porte… »
In fine, l’étude réalise les actifs, des ventes à 99%, le notaire nous envoie les fonds, rembourse les frais engagés et prélève ses rémunérations, en général 12 % des fonds versés aux héritiers. Contrairement au notaire, aux avocats ou aux agences immobilières, le métier n’est pas réglementé. « Nous avons mis en place une fiducie, plaide Julien Llorca, qui sécurise les biens qui nous sont confiés. La fiducie est plus forte qu’une hypothèque. Les sommes sont cantonnées avec tous les documents du dossier dans une société fiduciaire indépendante du cabinet. Nous offrons une double sécurisation sur les fonds et sur les actes qui permettent de gérer ces successions. »
C’est un métier de proximité. « Les notaires principalement ou les banques, les personnes qui ont à gérer une déshérence, sont sur un territoire, argumente julien Llorca, : il faut les voir, discuter comprendre la problématique du dossier Deuxième besoin de proximité, la recherche. Nous sommes à Aix-en-Provence par exemple, peu d’habitants sont originaires depuis X générations de la Provence. Notre recherche ira à Paris ou sur les ports de la Méditerranée en fonction de la vie des personnes. Nous avons des chercheurs, en équipe qui vont sur le terrain pour récupérer des pièces en en local. »
Une levée de 10 millions d’euros en juillet 2022
Entrepreneur, ambitieux, le 16 juillet 2022, Julien Llorca boucle une levée de fonds de 10 millions d’euros auprès de ses actionnaires. « Avec un actionnariat plus puissant, dit-il, nous pouvons continuer notre croissance tant en France qu’à l’étranger. »
- “Le premier axe est la digitalisation de nos activités pour que nos collaborateurs se concentrent sur leur valeur ajoutée par sur des tâches ingrates. Nous voulons conserver de manière durable les talents avec des plans de carrière pour faire évoluer les personnes. Nous devons sécuriser et préserver la traçabilité de nos démarches.
- Deuxième axe de progrès la productivité, la recherche la plus rapide possible de façon que les personnes et les héritiers en profitent le plus vite possible. J’ai un dossier pour lequel nous avons évidemment besoin d’accélérer. La dame a 92 ans et elle va toucher une somme relativement importante. Il faut qu’elle puisse en profiter, vite !
- Ensuite nous voulons faire déjà grandir les sites sur lesquels nous sommes installés. Comme Paris, Lyon ou Lille. Nous avons besoin de densifier le réseau avec une agence à peu près tous les 150 km pour couvrir tout le territoire et faciliter sur les recherches.
- Nous avons ouvert un département international depuis trois ans. Nous avons des relais sur plus de 100 pays. Après avoir ouvert en Tunisie, d’où la présence active d’Afric Invest, nous regardons la Belgique cette année, puis d’autres pays européens, dans les dans les deux ans qui viennent : en Italie, en Espagne, nous regardons l’Allemagne et l’Autriche. Mais, il faut connaître les pratiques locales. En Allemagne, par exemple on s’arrête au 4e degré. En France, on va au 6e.
- Enfin selon les opportunités nous faisons de la croissance externe. Au cours des dernières années nous avons repris trois sociétés de généalogie. “
Tiercé ou quarté ?
Le marché de la généalogie successorale, se divise, en deux parties, d’un côté quatre sociétés importantes, Coutot-Roehrig (créée en 1894, 70 millions d’euros de CA), la société Add Associés (créée en 1990, 30 millions d’euros de CA), la société Andriveau (créée en 1830, 16,5 millions d’euros de CA en 2021 ) « et nous, nous sommes 3° ou 4° selon les critères ! », précise Julien Llorca. Dans le deuxième groupe, une centaine d’acteurs réalise chacun un million de chiffre d’affaires avec des tentatives de regroupements.
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