En marge du CartoonNext, l’événement organisé par l’association Cartoon pour les professionnels et les étudiants de l’animation et du jeu vidéo, Gomet’ à interrogé Michel Bissière, le conseiller régional délégué à la vie artistique et culturelle et président d’Arsud. Il était accompagné d’Elena Konke, chef de service adjoint Industries Culturelles et Image de la Région Sud. L’élu nous explique les enjeux en terme d’emplois et de financements pour attirer les studios de création sur notre territoire.
Comment percevez-vous l’évolution du secteur de l’animation en Provence ?
Michel Bissière : Il y avait déjà une envie, et les mentalités des gens ont évolué pendant le Covid-19 avec les plateformes de diffusion (Netflix, Disney +) et le télétravail notamment. La région est accueillante. Elle a montré qu’elle offrait des possibilités d’accueil et d’accompagnement de tournages, en incitant plusieurs structures à s’implanter sur le territoire. Notre président,Renaud Muselier, veut faire de la Région Sud une région de création, de diffusion et de promotion.
Vous avez participé à un moment d’échange entre les jeunes et les entreprises de l’animation (studios, producteurs…). Quels sont les besoins que vous avez relevés chez les étudiants et les entreprises ?
Pour les garder sur le territoire, nous devons attirer les entreprises qui recrutent.
Michel Bissière
M. B. : Le but d’un jeune est avant tout de trouver un travail. Je connais bien l’école reconnue d’animation à Arles, le Mopa. Il y a quelques années, tous les jeunes diplômés de cette école partaient aux États-Unis et au Canada… Pour les garder sur le territoire, nous devons attirer les entreprises qui recrutent. Comme l’explique bien Marc Rius le producteur de « Tu ne nous ZA pas vu », qui m’a demandé de faire venir ses concurrents sur le territoire pour créer un effet de masse et faire rester les talents. Aujourd’hui, son studio basé à Arles (TNZPV Productions et studio) va recruter près de 120 graphistes pour produire The Coop Troop avec les équipes de Mikros animation (Bob l’éponge, La Pat’ Patrouille). C’est une très belle boîte de la région en animation qui travaille avec Technicolor. (Ndlr, entreprise spécialisée dans la conception et la fabrication de systèmes vidéos et d’effets visuels).
Comment aider concrètement ces « pépites » à émerger et à les faire rester sur le territoire ?
M. B. : En partie grâce aux fonds d’aides. Quand la Région aide financièrement la production d’une série, d’un court ou long métrage, elle exige que 160% de cet argent versé soit dépensé sur le territoire. La mécanique incite à faire travailler les talents ici. Les boites ont besoin de talents confirmés, et pour qu’un talent confirmé vienne ici, il faut qu’il soit sûr d’avoir du travail à long terme. C’est ça notre prochain objectif en créant un « fonds vidéo ». Nous voulons rendre cette activité pérenne sur le territoire. Quand un talent confirmé n’aura plus de travail en animation, il en aura pour le jeu vidéo : il pourra passer de l’un à l’autre.
De combien sera doté ce fonds ? Est-il déjà lancé ?
M. B. : Le fonds jeux vidéo va commencer à 250 000 euros et je pense qu’il va évoluer rapidement. Nous avons clos les appels à projets le 15 avril et nous allons certainement retenir deux projets en production et deux autres en prototypage.
Cela va de pair avec l’augmentation de 10% du budget culturel de la Région Sud…
M. B. : Oui, c’était une promesse électorale. Le budget du département culture était à 63 millions et il est passé à 72 millions. Le président de la Région veut sanctuariser le budget de la culture pour montrer que ce n’est pas une variable d’ajustement.
Le montant du « fonds animation » va-t-il également augmenter ?
M. B. : Nous n’allons pas augmenter le fonds animation. Il a déjà triplé depuis sa création en 2010 : il est passé de 300 000 euros, puis à 600 000 euros en 2017 à l’arrivée de la nouvelle mandature, et nous l’avons rehaussé de 30% en 2020. Aujourd’hui, il est d’un million d’euros. Nous attendons que les autres collectivités en créent d’autres.
« Marseille en Grand » : un effet d’annonce pour la culture selon vous ?
« Nous ne voulons pas déstabiliser les trois lieux de tournages qui marchent : Marseille, Nice et Martigues.»
Michel Bissière
M. B. : Nous sommes ravis des annonces faites par le président Emmanuel Macron en septembre. Néanmoins, nous ne voulons pas déstabiliser les trois lieux de tournages qui marchent : Marseille, Nice et Martigues. Nous entendons bien que ces trois sites gardent la même importance. Marseille ne doit pas empiéter sur l’activité des studios de Nice et Martigues. Le président évoque des dépenses d’investissements. Or, il va falloir faire fonctionner tout ça. Les collectivités devront prendre en charge les dépenses de fonctionnement. La Région Sud prendra sa part, mais nous devons nous rencontrer avec la Métropole et la Ville pour voir si chacune des collectivités concernées est prête à participer aux frais.
La saison estivale est riche en festivals dans la région (Cannes, Avignon, Arles, Marseille…) arrive. Quelle est votre approche pour rendre ces événements plus accessibles aux jeunes, potentiels futurs talents de la région ?
M. B. La région tient vraiment à rendre accessible ces grands festivals aux lycéens et apprentis. Chaque année, ils sont 22 000 élèves à participer à un programme pour décrypter des films et être sensibilisés à avoir de l’esprit critique face à une œuvre. Parmi ces jeunes, 500 sont accompagnés à Cannes avec leurs enseignants pour qu’ils rencontrent les équipes de tournages. Le soir, ils montent les marchent sur le tapis rouge et ils sont annoncés comme les équipes de films… Ils rêvent un peu, c’est beau à voir ! Nous faisons la même chose pour le festival d’Avignon et pour les rencontres de la photographie à Arles. Donc oui, la région accueille les festivals les plus prestigieux, mais ils ne sont pas réservés à une élite.
Liens utiles :
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