La révolution se fait à bas bruit, comme un train qui arrive à l’heure. Le 7 février 2022, après six années de négociation, l’Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM) et trois organisations syndicales représentatives (FO, CFDT et CFE-CGC) ont signé une nouvelle convention collective nationale unique pour les salariés de la métallurgie. Rappelons que la métallurgie ne se limite plus aux maîtres de forges : la construction navale, l’aéronautique, la sidérurgie, l’énergie, la microélectronique, l’optique, le médical… en font partie.
Ce texte remplacera à partir du 1er janvier 2024, les 78 conventions existantes. Thierry Chaumont, président de l’UIMM Régions Sud Corse et de l’UIMM Alpes Méditerranée a rappelé lors d’une conférence de presse tenue le 27 avril 2022 que « les entreprises avaient avant ce texte des milliers de pages de textes conventionnels, 7 000 pages au total qui ont été ramenées à 230, pour régir les relations de travail dans une branche éclatée. » La loi El Khomri, puis les ordonnances Macron ont mis la pression pour réduire le nombre de conventions collectives. En 2015, le ministère du travail recensait près de 700 conventions collectives. Une majorité d’entre elles, faute de négociation possible, n’était jamais à jour, ni en phase avec les changements du travail.
Dans leur communiqué commun, les organisations patronales et syndicales soulignent que « la colonne vertébrale de cette nouvelle convention collective est avant tout le nouveau système de classification des emplois, lequel assurera davantage d’équité grâce à une description des emplois plus claire. Les emplois seront classés en fonction de six critères : la validation des connaissances, la contribution, la communication, la coopération, la description des tâches et l’autonomie. Cette nouvelle grille prendra en compte l’évolution des métiers et la diversité des compétences. »
500 jours pour remettre à plat les contrats de travail de chacun des salariés
Il reste un peu plus de 500 jours, pour remettre à plat les contrats de travail de chacun des salariés, il leur revient d’engager la discussion avec les partenaires sociaux. « On repart de zéro, affirme Thierry Chaumont, et il faut redéfinir chaque poste. Nous avons des outils paritaires de déploiement afin d’expliquer à nos adhérents mais aussi à des petites entreprises, des start up, qui jusqu’à maintenant ne sont pas entrées dans la convention collective. » En effet après un décret du ministre du Travail, la convention sera une “convention étendue” qui s’appliquera de droit à toutes les sociétés qui ont un code NAF qui les rattache à la métallurgie. Pour Gilbert Marcelli, président de l’UIMM Vaucluse « la convention offre une grille unique pour tous les compagnons, un cadre de référence avec un parcours complet du salarié dans une transparence totale. La convention est paritaire et la métallurgie est avant-gardiste en proposant un nouveau contexte de dialogue social ».
Ce nouveau système s’appuie, explique l’UIMM, tout d’abord sur l’emploi réellement tenu. « Celui-ci doit être détaillé dans une fiche descriptive d’emploi et doit correspondre à ce que fait réellement le salarié et bien entendu à ce qu’attend l’employeur. Les salariés sont également consultés pour garantir cette cohérence. Cette fiche descriptive permet ensuite une analyse de l’emploi à travers six critères : la validation des connaissances, la contribution, la communication, la coopération, la description des tâches et l’autonomie. Le résultat de cette analyse permet à chaque entreprise de classer et hiérarchiser les emplois les uns par rapport aux autres. Le classement de l’emploi, mentionné sur la feuille de paie, devient un indicateur propre à l’emploi occupé. Ce n’est pas le « grade » d’un salarié, ni un moyen de faire de la reconnaissance individuelle. »
La nouvelle classification évitera le mercato entre départements
« Ce n’est pas une nouvelle négociation, précise Thierry Chaumont, le cadre est défini mais il faut écrire et décrire de façon paritaire les postes de travail en cohérence totale avec la mission réalisée dans 850 entreprises. La nouvelle classification évitera aussi souligne le président de l’UIMM, le mercato entre départements ou zones d’emploi, puisque tout tient dorénavant dans une page et que les salaires correspondant à la nouvelle grille sont transparents ».
Jusqu’à présent le salaire minimal était défini au niveau des territoires, les minima seront désormais établis au niveau national et applicables de manière homogène partout dans l’Hexagone. Enfin, les salariés non-cadres du secteur verront, grâce à ce nouveau texte, leur couverture sociale améliorée avec notamment la mise en place d’un régime de prévoyance (décès, incapacité, invalidité).
Pour Serge Bornarel, délégué général de l’UIMM Alpes Méditerranée, « il faudra faire le travail ensemble c’est-à-dire employeurs et salariés, il faut revisiter les classifications, mais on ne classe plus des individus, mais des postes où l’on évalue notamment l’autonomie et la compétence. »
Une nouvelle UIMM « bi-régionale »
Un consultant en ressources humaines nous confiait qu’il y avait là du travail de fond et du business pour les deux années à venir. Afin d’être en phase pour mettre en œuvre cette nouvelle convention collective, l’Union des industries métallurgiques restructure son organisation territoriale. L’UIMM Alpes Méditerranée, l’UIMM Côte d’Azur et l’UIMM Vaucluse ont créé l’UIMM Régions Sud Corse, avec la volonté de porter ensemble le déploiement de la nouvelle convention collective nationale dans la région Sud et la région Corse. « Cette nouvelle UIMM « bi-régionale », souligne Thierry Chaumont qui en a été élu président, est la concrétisation d’une mobilisation de nos chambres syndicales territoriales pour accompagner les entreprises, elle est le résultat d’une vision partagée des services utiles aux entreprises et d’outils régionaux que nous devons apporter. » UIMM Sud sera aussi un interlocuteur unique des pouvoirs publics et surtout de la Région Sud.
Le document pédagogique paritaire, mode d’emploi de la mise en œuvre de la convention
La communication de la CFDT sur la convention
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