Jeudi 27 février, le Medef Sud donnait rendez-vous à une centaine d’entrepreneurs locaux, élus politiques ou simples visiteurs sur les bancs de Sciences Po Aix afin de présenter le nouveau rapport du think-tank maison Nouveau Cap intitulé : Préserver l’eau en région Sud – Provence-Alpes-Côte d’Azur, 11 propositions pour faire face au défi d’une gestion partagée et durable de la ressource. Le sujet a été débattu lors d’une table-ronde avec des spécialistes régionaux sur la question.
Dans son rapport, le Medef détaille précisément ses recommandations quant à la gestion de la ressource (Photo : Marius Linarès)
Joséphine Thierry, responsable communication et affaires publiques du Medef Sud, a souligné la complexité du sujet lors de la présentation du rapport. « Confrontée à l’ambivalence du sujet », elle rappelle que la gestion de l’eau concerne sa qualité, sa quantité, ses usages et son partage. Les épisodes climatiques extrêmes de ces dernières années, comme la sécheresse et les inondations, interrogent la capacité du territoire à s’adapter : « les décideurs et l’ensemble des citoyens doivent se préparer ». La région Sud est considérée vulnérable face au changement climatique, avec notamment « 19 % du territoire régional à protéger contre le risque d’inondation », une élévation du niveau de la mer de 20 cm et « 10 000 édifices menacés d’ici 100 ans dans le Var et les Bouches du Rhône ».
Une ressource à protéger et à mieux partager
La Région Sud, fortement impliquée dans cette problématique, a multiplié les initiatives. Bénédicte Martin, vice-présidente en charge de l’agriculture, de la viticulture, de la ruralité et du terroir, le rappelle : « la Région a une longue histoire avec la question de la gestion de la ressource en eau ». Depuis 2016, les efforts se sont intensifiés avec une explosion des investissements à partir de 2022. « Nous avons cette culture de la sobriété. Nous ne prélevons que ce dont nous avons besoin », insiste-t-elle.
D’un autre côté, le paradoxe de l’étang de Berre, qui reçoit chaque année 2 milliards de mètres cubes d’eau douce venant des Alpes, est mis en avant par Philippe de Fontaine Vive, ancien vice-président de la Banque européenne d’investissement. « Nous disposons d’une ressource abondante, inconnue du monde entier », constate-t-il, tout en soulignant l’opportunité d’un aménagement territorial structurant (voir notre dernier article sur le projet de dérivation des eaux) permettant de redistribuer cette eau jusqu’au Var.
Vers une meilleure gestion et une réutilisation de l’eau
L’enjeu de la sécurisation de l’approvisionnement en eau, notamment pour l’agriculture, est une priorité pour Franck Sanfilippo, directeur du service de l’eau de la Société du Canal de Provence. Il met en avant des innovations possibles comme la télédétection pour anticiper les sécheresses et des panneaux photovoltaïques sur les canaux pour produire de l’énergie renouvelable qui est « un sujet collectif ».
La réutilisation des eaux usées, encore marginale, est identifiée comme un levier essentiel. Actuellement, moins de 1% de ces eaux sont réutilisées en raison des restrictions sanitaires. L’objectif affiché est ambitieux fixé par le rapport de Nouveau Cap est clair : « devenir la première région à utiliser les eaux usées pour atteindre 10 % en 2030 ». Le rapport encourage leur usage pour l’arrosage des espaces verts et le nettoyage des voiries et de nombreux autres usages.
Un enjeu économique et écologique
L’équilibre entre protection de la ressource et développement économique est une nécessité mise en avant par les auteurs du rapport. L’eau doit être considérée comme un facteur de risque à part entière, notamment en raison du « risque de rupture en approvisionnement en eau » qui pourrait impacter plusieurs secteurs, comme le lavage automobile, contraint à la fermeture en cas de sécheresse.
Les perturbations du cycle de l’eau dues au changement climatique préoccupent Nicolas Roche, professeur à Aix-Marseille Université. Il rappelle que « la majeure partie de l’eau est dans la nature » et insiste sur l’importance de la réutilisation : « un mètre cube réutilisé, quel que soit l’endroit, est bénéfique ».
11 propositions pour un avenir durable
Le rapport du Medef Sud présente 11 propositions articulées autour de trois axes principaux, dont la modernisation des réseaux, l’augmentation de la réutilisation des eaux usées et la révision du prix de l’eau pour refléter son coût réel. Il souligne également le coût de l’inaction, illustré par la gestion de la crise de 2022. « Préserver la ressource est un impératif écologique, économique et stratégique », insiste le rapport. L’eau est désormais un enjeu majeur pour l’avenir du territoire, nécessitant une mobilisation collective des acteurs publics et privés.
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