Les piscines Nord et de Luminy vont refaire surface. Respectivement abandonnés en 2009 et 2010, ces bassins vont être réhabilités sous l’impulsion de la Ville. Les élus de la majorité ont voté en conseil municipal le 7 juillet la création d’une société d’économie mixte à opération unique (Semop) permettant une co-gestion privée et publique de ces deux équipements. La forme de cette société a néanmoins soulevé des questionnements et des critiques au sein de l’opposition.
« J’ai combattu contre la démolition de la piscine Nord. Tout le monde venait ici pour apprendre à nager car on n’avait pas tous la possibilité d’aller à la mer », se rappelle Samia Ghali, l’adjointe en charge des grands équipements. A Marseille, 14 piscines sont en activité, soit l’équivalent de « six fois moins au m2 que dans les autres villes de France », pointe Hervé Menchon, l’adjoint au littoral. En 2020, une étude menée par la municipalité avait également révélé qu’un marseillais sur deux ne savait pas nager lors de son entrée en classe de sixième.
De son côté, l’ex-maire des 9e et 10e arrondissements, actuellement député Renaissance, Lionel Royer-Perreaut pointe la construction « d’un parc sportif acquisitif et aqualudique » au lieu d’un bassin de nage pour les habitants. Cette critique est partagée par le Collectif des écoles de Marseille (CEM) qui a fait parvenir une lettre au maire le 5 juillet, regrettant : « Vous décidez de construire des centres aqualudiques dont le modèle financier repose sur des activités payantes… »
Samia Ghali a donc présenté son rapport en conseil municipal pour acter la création d’une Semop pour gérer ces deux équipements. « Nous avons choisi ce mode d’opération car le rapport de la CRC (Chambre régionale des comptes, NFLR) disait qu’il nous aurait fallu 50 ans pour atteindre nos objectifs en matière de rénovation des piscines… Et je ne crois pas que ce soit la méthode de travail que nous voulons », justifie l’élue. La Semop est la solution proposée par l’AMO (aide à maîtrise d’ouvrage) diligentée par le cabinet Finance Consult qui prévoit la gestion d’une collectivité en partenariat avec un acteur économique. Selon le cadre réglementaire, la collectivité peut détenir entre 34 et 85% de la société et l’acteur économique ne peut en détenir moins de 15%.
« Je veux que des investisseurs publics arrivent dans cette Semop. Le public conservera la majorité pleine. »
Benoît Payan
« Pourquoi vous qui vous êtes opposés politiquement aux PPP [partenariats publics privés] pourquoi vous défendez la Semop ? », demande Lionel Royer-Perreaut. « Vous devez avoir le nom de l’investisseur tiers. Donnez-le-nous ! », presse le député. En réponse, le maire, Benoît Payan défend ignorer l’identité de cet investisseur privé : « Il y aura une mise en concurrence conformément à la loi », promet-il. Et de poursuivre : « Je veux que des investisseurs publics arrivent dans cette Semop. Le public conservera la majorité pleine. »
Revoir le conseil municipal de Marseille en vidéo
Piscines à Marseille : deux centres aquatiques pour un coût total de 75 millions
En dehors du modèle de société sélectionné, qui est assez rare chez les collectivités, l’association CEM se désole du coût estimé pour réaliser ces travaux : 42,7 millions pour le site de Luminy et 31,6 millions pour celui du Nord, soit une enveloppe globale de près de à 75 millions d’euros. « Ce qui est bien au-delà de tous les coûts constatés en France pour la construction de piscines entre 7 et 20 millions d’euros HT en fonction du niveau d’équipement, de la taille du bassin ou de la prise en compte des impératifs liés à l’organisation de compétitions », explique la lettre de la CEM.
Dans la majorité, les élus écologistes ont bien voté la création de la Semop. « La réouverture des piscines Nord est une très bonne nouvelle », glisse Sébastien Barles (EELV), adjoint à la transition écologique. Son groupe, Ecologiste et pluriel-s, met toutefois en garde sur la consommation d’eau et d’énergie envisagée pour ces futurs équipements. « Nous devons penser les équipements les plus vertueux possibles, il faut réfléchir à comment chauffer l’eau, retraiter les eaux usées… », poursuit l’élu.
Sébastien Barles propose l’exemple d’une piscine en Isère, celle de Bourgoin-Jallieu, qui est couverte de panneaux photovoltaïques avec des procédés naturels pour chauffer l’eau. Le Collectif des écoles de Marseille propose également un autre exemple la moins coûteuse et moins énergivore : la piscine essentielle proposée par le champion Alain Bernard à moins de 5 millions d’investissement. L’association ne perd pas de vue sa volonté de « mutualiser » la construction des piscines avec la Société publique des écoles de Marseille en charge de la rénovation de 188 écoles.
Liens utiles :
> Marseille : piscines, budget, énergie… les dossiers chauds du conseil municipal
> Conseil municipal de Marseille : commerces, Maison diamantée, rue d’Aubagne, Buzine…