Lors du grand débat sur les questions de financement et d’organisation de la filière vélo qui se déroulait lors de la 2e édition des Rencontres du vélo et des mobilités douces, Florence Gall, déléguée générale de la filière vélo à l’APIC. Association de promotion et d’identification des cycles et de la mobilité active a bien posé la problématique : comment faire du vélo un objet économique ?
Qu’il soit ludique, sportif, éducatif, physique, urbain, rural, tout le monde en convient et les Rencontres du vélo en ont montré tous les aspects. Mais le vélo est aussi un objet économique, technologique, marchand qui ne sort pas de nulle part. Contributrice au Plan gouvernemental de financements de la filière, du fonds mobilités actives Florence Gall s’inspire des dix propositions du rapport du député Renaissance, philocycliste Guillaume Gouffier-Valente.
Aura, Grand Ouest, Occitanie… des exemples à suivre ?
En France la filière se structure. Trois clusters sont à ce jour entrés dans une dynamique de coproduction. La Vélo Vallée en région Occitanie a créé à L’Isle-Jourdain dans le Gers une Vélo factory qui promet un vélo 100 % occitan. Dans la région Aura, le cluster Mobilité active et durable en Auvergne-Rhône-Alpes, basé à Villeurbanne, MAD a intégré CARA, le pôle de compétitivité lyonnais dédié à la mobilité. MAD Lyon s’affiche comme le « gang lyonnais du vélo ». Le dernier né, le projet de cluster Grand Ouest fédère les acteurs économiques des régions Pays de la Loire, Centre Val de Loire et Bretagne il est soutenu par quatre industriels : Arcade Cycles, la Manufacture française du cycle, Velco et Wello. Ils ont créé la filière interrégionale CyGO pour réindustrialiser, former, et devenir plus visible pour mieux recruter, et s’affranchir autant que possible des fournitures asiatiques.
Ces trois clusters bénéficient du plan vélo et ils peuvent présenter des projets à l’Europe qui a des outils diversifiés pour soutenir une filière européenne et contrer l’invasion des cycles asiatiques. Dans ces trois grands espaces le vélo est entré dans la rubrique industrie et fait partie du plan de réindustrialisation de la France. Sans faire de nostalgie souvenons-nous que la France fut leader mondial de la fabrication des deux roues et que nous avons laissé filer cette compétence en Asie.
À Barcelone, l’Institut européen d’innovation et de technologie et sa directrice de l’innovation du hub sud EIT Urban Mobility Maria Paula Caycedo, est la porte d’entrée des financements européens et accompagne les porteurs de projets.
Jean Daniel Beurnier, chef d’entreprise, élu consulaire persévère dans son engagement pour la filière. Il est convaincu que le potentiel en région Sud est à portée de main et qu’un cluster peut fédérer les industriels qui portent des projets novateurs, les distributeurs, mais aussi ceux qui pratiquent et ceux qui aménagent.
Vers une centrale des mobilités à Euroméditerranée
Euroméditerrranée, raconte Brice Chandon, responsable ingénierie du développement durable d’Euroméditerrranée étudie par exemple la possibilité de transformer un parking en hauteur en centrale des mobilités avec des services qui permettraient de laisser son véhicule, de recharger ses batteries, de retrouver son vélo ou d’en louer un, d’héberger un atelier de réparation…
Jean Daniel Beurnier, a rédigé un projet de structuration de la filière et l’a soumis à la Région Sud qui a en charge le développement économique. « La solution est d’abord politique » souligne-t-il avec force. L’exemple des trois clusters existants confirme, le rôle central des régions et métropoles pour fédérer et financer l’émergence d’une filière industrielle.
OzoElectric, Iweech et Giant : prêts à travailler ensemble
Les entrepreneurs présents dans le débat avaient tout pour être concurrents entre eux. Lionel Macaluso, responsable marketing chez Giant Bicycles France, basé à Aix, marque internationale qui se revendique « premier constructeur mondial » de vélo, Jean-Pascal Plumier, cofondateur et P-dg Ozo Electric propose plutôt que d’acheter de transformer son vieux vélo en VAE avec un kit maison, et Émile Ponson, responsable de la production et du développement à Iweech propose un vélo intelligent qui détecte vos habitudes de conduite et adapte vitesse et rythme à vos desiderata sans écran, sans manette, sans bidule. Le tout grâce à l’IA.
Trois univers, mais qui ont intérêt à faire valoir la filière cycliste et qui sont prêts à travailler ensemble et à dépasser les légitimes concurrences qui existent entre eux. Premier objectif qui fait l’unanimité des industriels: le besoin de formation.« Lorsque nous trouvons un technicien vélo disent-ils, il connait le vélo mécanique, mais n’a aucune notion sur l’assistance électrique. Or 80% des besoins sont sur l’assistance, l’électricité, et demain l’IA!» C’est le fondement d’un cluster, descendant des pionniers italiens que l’on appelait alors « districts » (cf. l’exemple d’Alessi), des vallées industrielles et artisanales qui partageaient les services et coordonnaient leurs entreprises pour produire et vendre mieux.
Comme l’indiquait Florence Gall il est temps de passer à la case industrie : Iweech a obtenu le soutien de France 2030 et est en recherche active d’un terrain oud une friche si possible à Marseille pour créer de toutes pièces une nouvelle unité de production. De quoi casser les codes du vélo simple loisir et mettre de l’énergie pour que la région, profitant de l’expérience des trois précédents clusters puisse s’organiser et créer de la valeur et de l’emploi.
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