Des transports accessibles à tous ! C’est inscrit dans le marbre dans l’agenda de la mobilité métropolitaine. Même si des efforts ont été réalisés ces dernières années, certaines villes de la métropole Aix-Marseille Provence sont encore à la traîne en matière d’accessibilité. Et certains sont confrontés à ces difficultés quotidiennement.
Joseph est Marseillais depuis toujours. Il est né dans le quartier du Panier et il y a bien longtemps son « QG » c’était le Vieux-Port. Cela fait plusieurs années qu’il a déserté ce lieu, si cher à son coeur. Touché par une maladie alors qu’il n’avait que 37 ans, et qui lui a coûté sa jambe droite, depuis il se déplace en fauteuil roulant, une grande majorité de son temps. Aujourd’hui, à 60 ans, et malgré son handicap, Joseph cultive la bonne humeur et n’est pas avare de petites plaisanteries. « Ce destin », il l’a accepté et n’a cessé de se battre pour garder une grande autonomie. Il a tout mis en œuvre pour réapprendre à conduire et ces moments au volant lui permettent de conserver une part de liberté. Mais prendre sa voiture quand on est handicapé, cela relève parfois du parcours du combattant.
« C’est plus simple d’aller dans les centres-commerciaux… »
Nous avons tenté l’expérience avec lui dans le 12e arrondissement de Marseille. A bord de son 4X4 qui roule à l’éthanol, chargé de son fauteuil roulant à l’arrière, nous démarrons avec un objectif simple : aller prendre un café. Les routes passent et se ressemblent. « Ça fait bientôt une demi-heure que l’on tourne et toujours pas de place pour handicapés », fait remarquer Joseph. « Je conçois très bien que Marseille soit une veille ville, avec des montées et qu’il est difficile de créer des places de stationnements pour handicapés partout, mais lorsqu’on peut le faire il faut le faire. Pour moi, c’est plus simple d’aller dans les centres-commerciaux ou supermarchés, car les parkings sont aménagés », confie-t-il, sans jamais se placer dans la posture d’une victime.
Après un moment, deux places matérialisées en bleu, avec un panneau de signalisation apparaissent dans le quartier de Saint-Barnabé. Nous vérifions que ce sont bien deux véhicules disposant du macaron destiné aux handicapés qui sont garés à cet endroit. Ce n’est pas toujours le cas, mais ici pas de mauvaises surprises. « C’est bien et cela montre aussi que les gens respectent ces emplacements. Ça serait bien qu’il y en ait un peu plus, car on aurait pu s’arrêter là pour prendre le café », plaisante Joseph. « Encore faut-il que le bar ou le café soit accessible… » Avec le temps, le Marseillais a repéré les places où il peut s’arrêter pour sortir son fauteuil, sans problème, « car les valides ne comprennent pas toujours pourquoi il nous faut impérativement ces places ». Démonstration faite avec son fauteuil roulant. Et le rituel est toujours le même. Sortir du véhicule à l’aide de ses béquilles, puis avec le bras mécanique faire descendre son fauteuil. « Il faut de la place pour faire tout ça. Ces places sont indispensables pour nous, on ne peut pas se garer n’importe où ».
Alors il y a des lieux sur lesquels Joseph a mis une croix, « car je tourne trop longtemps pour trouver une place ». Il sait que des aménagements ont été réalisés pour rendre les transports collectifs accessibles : sur les trois tramways et sur le réseau de bus. « Mais ça reste encore trop compliqué ». Le réseau de tramway reste néanmoins le seul réseau marseillais entière accessible. Côté bus « certains le sont mais pas encore tous les arrêts… ». Quant à métro, « c’est impossible à l’heure actuelle ». Même si les quatre dernières stations ouvertes en 2010 sont accessibles, (Blancarde, Louis–Armand, Saint-Barnabé et Fourragère), les rames ne le sont pas. Une problématique qui sera résolue avec le remplacement des vieilles rames de métro : les quais seront protégés par des façades à mi-hauteur et dotés de portes anti-chutes pour répondre aux normes actuelles d’accessibilité, complétés par d’autres aménagements tels que portes réservés pour les personnes handicapées ou des planchers surbaissés. Deux stations de métro adaptées sont en cours de réalisation : Capitaine Gèze et Saint-Marguerite-Dromel.
Un investissement de 160 millions d’euros
La Métropole a engagé la mise en conformité des arrêts de bus et des stations de métro existantes, ce qui représente un investissement global de plus de 160 millions d’euros. Dans les six ans, se sont 3460 arrêts de bus prioritaires (près de 50% du réseau) qui seront ainsi rendus accessibles, permettant de faciliter le déploiement des rampes d’accès des autobus.
Pour compléter ces aménagements parfois complexes à mettre en œuvre, 5 services de transports à la demande pour les personnes à mobilité réduite, couvrant 85% du territoire métropolitain, ont également été mis en place : Mobimétropole (Marseille), Accessibus (Aix), Boulegan (Aubagne), Icibus + (Bus de l’étang) et Allo Le Bus (Martigues et Istres Ouest Provence). Chaque service est disponible à la demande pour toute personne possédant une carte justifiant d’un taux d’invalidité d’au moins 80%. En 2016, plus de 3300 personnes étaient inscrites pour bénéficier de cette flotte de 75 véhicules totalement adaptés, représentant un coût annuel de 6,24 millions d’euros.
Le service Mobimétropole et ailleurs…
En attendant la mise en accessibilité complète des réseaux aux personnes à mobilité réduite d’ici à 2025, inscrite à l’agenda de la mobilité métropolitaine, Joseph opte parfois pour le dispositif Mobimétropole. Un service de transport à la demande géré par la Régie de Transports (RTM), qui fonctionne de 6 heures à 1 heure du matin, tous les jours sauf le 1er mai. « Le prix du transport est de 4 euros », souligne Joseph, heureux de ce dispositif. « Il faut reconnaître quand les choses sont bien, et c’est déjà bien d’avoir ce service de transport », ajoute-t-il avec un bémol néanmoins. « Il mérite d’être améliorer, car un jour j’étais sur liste d’attente et on m’a oublié », raconte-t-il sans rancune. Autre point qui mérite d’être améliorer selon lui : « Si vous avez prévu d’aller au cinéma parce que la météo vous indique qu’il pleut et que finalement il fait beau et que vous préférez la plage, vous êtes quand même obligé d’aller au cinéma. » Reste que depuis sa mise en place, MobiMétropole fonctionne bien. L’année dernière, le dispositif a enregistré plus de 100 000 demandes. Un service de ce type dédié aux personnes à mobilité réduite sera proposé dans l’ensemble des communes de la métropole Aix-Marseille Provence.
A Aix, l’efficacité du réseau Accessibus.
Autre exemple. Depuis son accident de moto, Yann Moinau est condamné au fauteuil roulant. Nous l’avons suivi dans les rues aixoises. A Aix, tout le réseau est accessible aux personnes handicapées. Depuis 2015, la Ville a mis en place puis étendu le service Accessibus (trajet porte-à-porte). Côté voirie, la municipalité a adapté toutes les nouvelles places de la Rotonde aux nouvelles normes handicap. Par exemple, au niveau de l’Apple Store, des marqueurs pour les aveugles sur le bord des marches ont été matérialisés. Pour Yann, « c’est assez accessible dans l’ensemble, sauf lorsqu’il y a des travaux notamment dans le centre historique, ou lorsque des voitures sont mal-garées. » Il pointe également du doigt l’accessibilité dans les magasins. « De ce côté-là, ça traîne encore… »
Liens utiles :
Notre dossier complet sur l’Agenda de la mobilité métropolitaine> [Vidéos] La mobilité métropolitaine : méthode, agenda et grands enjeux avec Jean-Pierre Serrus
> [Transports] L’agenda de la mobilité métropolitaine veut booster l’usage des transports publics
> [Vidéo] Métropole : pour que le vélo devienne « La Petite Reine » des transports doux
> [Vidéo] Bus électriques : les « i2e » une nouvelle voie vers des transports plus propres dans la métropole
> [Transports] Une métropole mieux connectée grâce à la multimodalité
> [Vidéos] Transports : pour une métropole accessible à tous !
> Un réseau de lignes Premium pour rendre les infrastructures efficaces
> Ces voies réservées pour mieux circuler dans la métropole
> Du métro « full automatique » au téléphérique, l’innovation dans la mobilité métropolitaine .
> [Vidéo] Mobilité métropolitaine : « Je partage ma voiture et toi ? »
Reportage réalisé en partenariat avec la Métropole Aix-Marseille-Provence