Le premier semestre 2024 s’annonçait plutôt maussade. Sur le plan national les professionnels constatent une « contraction du marché du capital-risque » comme l’écrit Madyness, avec une baisse du nombre de levées et du montant des levées. La période des licornes est révolue et si les chiffres restent tout à fait conséquents ils restent concentrés sur la région parisienne. Lors de ce premier semestre, sur le plan national 365 start-up ont permis à l’écosystème de lever plus de 3,8 milliards d’euros. Et les professionnels de la région percevaient un deal flow en retrait.
23 levées
Pourtant dans notre région Sud, le nombre de levées dépasse au cours du 1er semestre 2024 celui de l’an dernier, puisque nous étions à 20 et que nous atteignions les 23 comme le révèle la nouvelle vague de notre baromètre régional des levées de fonds, réalisé avec nos partenaires Région Sud Investissement et Crowe Ficorec, et Webtime Media sur la Côte d’Azur.
Il est à noter que nous n’avons pas retenu dans notre tableau ce qui a été présenté comme une levée de fonds de Stedim à Aubagne pour 1,2 milliard d’euros. C’est en fait un mouvement de trésorerie interne au groupe Sartorius qui couvre pour 800 millions de la dette. Mais la somme des levées a chuté de plus de la moitié passant de 377 millions d’euros en 2023 à près de 157 millions cette année, la moyenne est néanmoins conséquente avec 6,8 millions d’euros.
En fait, nous avons peu de ces très grandes levées, qui l’an dernier avaient tiré le marché vers le haut, elles venaient alors des biotechs et du solaire. Nous avons cette année une seule biotech, Tafalgie qui a levé 8,5 millions.
L’âge des entreprises
Pour la première fois, nous avons enrichi notre palmarès en scrutant la date de création des sociétés. La moyenne à 13 ans dit peu de choses, cependant la courbe des âges nous indique que nous avons en fait trois groupes d’entreprises.
– En toute logique, un beau contingent de start-up, qui vont d’un à 4 ans, des entreprises à risque naturellement, mais qui sont porteuses du développement de demain.
– Un groupe conséquent d’entreprises d’âge moyen, qui vont de 6 à 19 ans : les financeurs ont sous les yeux plusieurs années d’exploitation, ils peuvent jauger la capacité des équipes à manager leur projet, la fiabilité des produits, la pertinence des marchés. Le risque de ce contingent est nettement plus limité que celui des start-up.
– Et puis nous avons les vétérans qui vont de 28 à 94 ans : ce sont des entreprises matures qui souvent à l’occasion d’un changement de génération ou de l’arrivée d’un nouveau manager repreneur réveillent une marque un peu dormante et font des choix de développement stratégiques forts. Mais ils s’appuient sur un potentiel avéré et sur des marchés déjà consolidés. Notre région recèle ainsi des pépites, souvent implantées dans les arrière-pays, des entreprises très discrètes, qui sont déjà exportatrices et dégagent des résultats conséquents comme Plantin et ses truffes dans le Vaucluse.
Le top 6 diversifié
Nous avons retenu un podium des levées supérieures à 10 millions d’euros qui fait apparaître un paysage totalement contrasté, qui inclut le solaire, l’agroalimentaire, le numérique et l’insertion sociale. Ces levées sont souvent le fruit d’un long chemin et vont alimenter un développement stratégique de long terme pour des entreprises déjà consolidées.
Une région équilibrée
La répartition géographique de ce premier semestre fait apparaître une région Côte d’Azur en forme qui compte 30 % des levées et, si l’on cumulait Marseille et Provence nous aurions les 70%, qui complètent le tableau. Mais il faut tout de même noter que Marseille intra-muros est en faiblesse et que les chefs d’entreprise privilégient des implantations « à la campagne » avec des espaces plus accessibles, une qualité de vie recherchée par les salariés et les cadres, et des liaisons plus faciles pour la logistique.
Si cette géographie se confirmait, la capitale régionale devrait réfléchir à son offre pour les entreprises. Hugues Parant, l’ancien directeur général d’Euroméditerrranée avait souvent et fortement mis en garde sur la pénurie d’espaces pour les entreprises (1) et la nécessité urgente d’ouvrir pour cette décennie de nouveaux locaux pour attirer les investissements.
Le retour du numérique
Avec 11 levées sur 23, le numérique se taille la part du lion et comme au plan national, est le secteur qui truste le plus les financements. Le numérique est, avouons-le, une rubrique attrape-tout qui inclut la start-up innovante, comme l’entreprise traditionnelle qui se modernise et se numérise. Mais il s’agit bien d’une tendance et les investisseurs vont plus volontiers vers des modernisations d’entreprises existantes que sur des start-up plus aventureuses.
L’énergie reste un secteur qui a un fort besoin capitalistique, on voit ici que TSE réalise une 2e levée après sa levée record de l’année dernière. Les entreprises du solaire recherchent des fonds puisque les installations (qui ont dorénavant trouvé leur modèle économique) sont fortement consommatrices de cash. Le plus souvent, elles ne veulent pas couvrir ce besoin en venture capital, car elles souhaitent un investissement non dilutif. Relevons dans les thématiques qui sont toujours présentes : les mobilités, les fintechs, l’agri-agro et toujours les biotechs.
Que sera l’année 2024 ?
Nous avons de très belles entreprises, nous l’avons évoqué qui sont en levée de fonds au début du 2e semestre en ce mois de juillet. Par contre la situation politique comme la situation économique sont en suspens et en général les investisseurs préfèrent la stabilité plutôt que le questionnement permanent.
Document source : le tableau complet des opérations du 1er semestre
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[1] Il déclarait en avril 2022 dans Gomet’ : « Nous sommes sur un marché en tension avec 2,5 % de taux de vacance : c’est le bailleur qui est maître. On peut craindre une augmentation sévère des tarifs de location si rien n’est fait pour accroître notre capacité d’offre. On sait qu’il faut 40 000 m2 de bureaux par an pendant 10 ans pour contrer cette évolution. »