En 18 ans, la série « Plus Belle la vie » s’est fait une place au soleil : 4 465 épisodes ont été tournés dans les studios du pôle média de la Belle de mai à Marseille (3e) inaugurés en 2004, la même année que le feuilleton. Un écosystème de 600 professionnels du spectacle, comédiens, producteurs et techniciens s’est constitué autour de « PBLV » ou « plus belle », comme aiment l’appeler les intimes. La fin de la série produite par Newen Studios et France Télévisions, diffusée pour la dernière fois le 18 novembre sur France 3, s’accompagne d’une incertitude chez les intermittents pour travailler à Marseille. Pourtant, la municipalité assure que les studios du pôle média resteront attractifs.
Plus belle la vie, c’est donc fini… en tous cas, sur France télévisions qui perd les droits TV à la fin de l’année. Mais le Mistral a-t-il soufflé son dernier mot ? En coulisse, depuis six mois, un collectif de 300 intermittents « PBLV 2.0 » s’est formé pour reprendre la série, remodeler la ligne éditoriale, produire différemment et la diffuser sur une plateforme indépendante.« C’est la reprise d’une usine ! Notre objectif est qu’un maximum de personnes puissent continuer le projet », explique Florence Demay, la porte-parole du collectif contactée par Gomet’.
Depuis une semaine, les membres du collectif négocient pour
obtenir le droit d’utiliser la marque« Plus Belle la vie » auprès de Newen Studios, la société de production propriétaire de la marque et bailleur des studios du pôle média jusqu’en 2025. Mais pour prendre sa décision, Newen a demandé à l’association d’apporter des assurances financières et une nouvelle proposition éditoriale.Des éléments que Florence Demay assure avoir transmis au producteur. Sans rentrer dans les détails du plan de financement en cours de négociation, la productrice affirmeque les membres, actuellement constitués en association, travaillent pour devenir une Société coopérative et participative (SCOP), pour reprendre la série. Florence Demay a récolté un accord formel des professionnels qui « feront des efforts sur leurs salaires et les récupéreront à la fin de l’année sous forme de bénéfices, le temps de relancer la série. » De fait, le collectif vise une réduction des coûts de production pour un épisode évalués « en deçà des 130 000 euros dépensés par France Télévision et France 3. »
Comme une famille qui ne veut pas se séparer – ni de la série, ni de Marseille – le collectif porte son nouveau projet artistique pour« dépoussiérer l’image» du programme. « Les tournages se feront plus en extérieur pour retrouver cet ADN des débuts, la lumière de Marseille», explique la marseillaise. L’autre défi du collectif, et pas des moindres, est de pouvoir utiliser deux des six plateaux de tournage du pôle média : le commissariat et la place du Mistral avec son café éponyme. La conservation de ce décor mythique est un élément clé de la réussite du projet, sans lequel il deviendrait trop coûteux.
Des soutiens de la Région Sud, la Métropole, l’office du tourisme…
Or, la préparation d’une série sur les grands magasins parisiens qui pourrait remplacer les décors de la série marseillaise, inquiète Florence Demay. Même si Newen ne confirme pas cette information. La productrice déplore une future « transformation des studios du pôle média en un lieu comme la Victorine à Nice, vides de tout…» Pour elle, la série était une « formidable fenêtre de Marseille sur le monde, visible tous les soirs ». C’est pour cette raison que l’Office du tourisme de Marseillesoutient le projet. La structure est dirigée par Marc Thépot jusqu’au 31 décembre avant de revenir aux mains de la ville de Marseille au 1er janvier dans le cadre de la loi 3DS.
Plusieurs institutionnels ont également donné leur accord pour soutenir financièrement la SCOP, dont la Région Sud et la Métropole Aix-Marseille. « Ils ont bien conscience de la gravité de la situation. L’État, la chambre de commerce (CCI) Aix-Marseille Provence nous suivent aussi. On a trouvé des soutiens absolument partout. Mais c’est à la mairie de dire « Plus belle la vie c’est notre fleuron, c’est notre joyau ! »
Des relations distendues avec la Ville de Marseille
En 2025, date à laquelle Newen ne sera plus locataire des studios, la ville de Marseille, propriétaire du foncier, devra chercher un autre opérateur pour louer ses studios de la Belle de mai. Le collectif s’est rapproché de Laurent Lhardit, l’adjoint à l’économie, pour négocier une réduction de loyer dans deux ans. « Mais c’est non tout de suite », confie Florence Demay. Et de poursuivre : « On va continuer à se battre. J’espère que Laurent Lhardit va revoir sa copie. Jean-Marc Coppola [Adjoint à la culture de Marseille, NDLR] nous soutient. »
Bien queLaurent Lhardit accueille ce projet « avec beaucoup d’enthousiasme », la Ville « peut difficilement aller plus loin. Notre métier ce n’est pas d’évaluer la qualité d’un projet économique de production. On ne sait pas faire. », justifie l’élu.Pour Laurent Lhardit, négocier une réduction des loyers avec le collectif n’est pas de son ressort. « Notre affaire à nous, c’est de savoir quel sera le nouvel opérateur qui intègrera les studios en 2025 après Newen. C’est confidentiel mais on a déjà reçu deux demandes d’opérateurs pour une installation de studios à Marseille », confie l’adjoint.
La priorité de la mairie est de vérifier l’attractivité des studios du pôle média, qui héberge aussi des entreprises et un incubateur. « Le retour des expertises indépendantes est très positif.Ces studios ont une grande valeur sur le marché. Donc, à ce stade, la seule chose que l’on peut dire c’est que les studios continueront à être des studios. Il y a de la demande. Le sujet cinéma est un gros sujet actuellement. », explique l’élu.
Les studios du pôle média ont une grande valeur sur le marché.
Laurent Lhardit, adjoint à l’économie de la Ville de Marseille
Ainsi, l’installation de Provence Studios (Martigues) dans 4,5 hectares de l’ancienne usine de Saint-Louis Sucre en 2026 ne remettrait pas en cause le rôle des studios du pôle média selon Laurent Lhardit : « Ils ont toute leur place car le marché est en train d’exploser ». Rappelons que l’État s’est engagé à financer sept millions d’euros de travaux pour remettre les studios du pôle médiaaux normes, une garantie du plan Marseille en grand, et que les résultats de l’appel à projets « la fabrique de l’image » de 350 millions d’euros du Centre national du cinéma (CNC) devraient également tomber d’ici quelques semaines pour financer des projets de studios dans le Sud.
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