Le cargo à voile « Canopée » transportera des tronçons de la fusée Ariane à partir de l’automne prochain. Derrière ce navire révolutionnaire, l’entreprise Jifmar Offshore Services au positionnement original. Créée en 2005, elle emploie aujourd’hui 160 personnes en France et autant à l’étranger. La PME aixoise travaille pour les grands comptes du pétrole, des travaux publics, des énergies marines renouvelables, de l’aquaculture et de la défense.
Dans l’univers des start-ups, rares sont celles qui deviendront des belles PME industrielles. À Aix-en-Provence, Jifmar Offshore Services fait partie de celles-ci. Entreprise discrète, créée ex-nihilo en 2005, elle emploie aujourd’hui 300 salariés (160 en France) pour un chiffre d’affaires consolidé d’environ 46 millions d’euros sur 2021, selon ses dirigeants. Avec un taux de marge d’Ebitda (résultat avant impôt, dotations aux amortissements, intérêts) supérieur au secteur du transport maritime, Jifmar Offshore Services a un positionnement original.
Nouvelle vision des services maritimes
Derrière cette société, Jean-Michel Berud et Foad Zahedi ont longtemps travaillé dans l’univers des plateformes pétrolières et des câbles sous-marins chez Louis Dreyfus et Thales où ils se sont rencontrés à la fin des années 90. De là est née l’idée de Jifmar. « Dans les services maritimes à l’industrie, il n’y avait pas d’armateurs de qualité en France. Les bateaux étaient vieux, les équipages non-formés. C’était le far-west ! », se souvient Jean-Michel Berud. Avec son associé, ils vont imposer une nouvelle vision héritée des pays nordiques et anglo-saxons. « On est parti du principe qu’un bateau technique devait être polyvalent ».
Ils investissent dans une flotte de navires hollandais rectangulaires et sans étraves, armés de grues et de treuils, autant capables d’opérer la maintenance d’un terminal pétrolier que d’intervenir dans les travaux publics maritimes, avec du personnel à bord. Objectif : répondre à une problématique maritime de A à Z, avec un ensemble complet de services allant de l’ingénierie jusqu’à la fourniture d’un navire, en passant par l’intervention sous-marine avec robots ou plongeurs.
« Total nous a mis le pied à l’étrier »
« Notre positionnement est très différent de celui de Bourbon, qui fait un peu de la voiture avec chauffeur. Nos bateaux, plus petits, interviennent plus près des côtes pour du service maritime industriel », explique Jean-Michel Berud. Au centre de ce modèle économique, des ingénieurs chargés d’assurer l’interface entre l’équipage et le client. Ce positionnement « clef en main » a séduit Total dès la création de la société. « Ils nous ont mis le pied à l’étrier ». Les deux associés ont ensuite enchaîné les contrats avec BP, la direction générale de l’armement (DGA), Technip, Saipem, Vinci, Eiffage, EDF… Et se sont fortement diversifiés : un bon amortisseur de crise.
Tour de table imminent
Six ans après l’entrée au capital de Raise Investissement, un nouveau remaniement capitalistique doit bientôt intervenir. « Nous voulons nous donner une nouvelle vision capitalistique et renforcer les fonds propres pour aller chercher de nouveaux marchés et de nouvelles géographies ». Objectif de ce nouveau tour de table : financer de nouvelles opérations de croissance externe.
En 2017, Jifmar reprenait « VDC Offshore » pour se développer dans les travaux publics. En 2018 et 2019, ce sont deux sociétés écossaises « North West Marine » et « Delta Marine », spécialisées dans les énergies renouvelables et dans l’aquaculture, qui la rejoignaient.
Cargo à voile pour Ariane Group
Autre sujet d’actualité pour l’entreprise, la construction de « Canopée » chez Neptune Marine en Pologne. Ce cargo à voile de 121 mètres équipé d’un moteur Diesel/GNL et de quatre ailes rigides en composite sera mis à l’eau en mai. En 2019, Jifmar remportait l’appel d’offres d’Ariane Group avec la joint-venture Alizé, pour un contrat de 15 ans. Pour ce navire révolutionnaire, la filiale Jifmar Guyane a investi 40 millions d’euros. A partir de l’automne, Canopée exploitera les alizés pour transporter les éléments de fusées entre les ports européens et Kourou. L’utilisation des ailes conçues par Ayro (VPLP Design), cabinet d’architecture breton spécialisé dans la course au large doit économiser au moins 15 % de carburant à vitesse constante, soit 3,5 tonnes par jour. Jifmar teste ainsi les solutions technologiques émergentes pour une croissance verte : « Nous espérons développer notre service industriel dans le transport de colis lourds avec d’autres navires comme celui-ci, ou tout aussi innovants », avance Jean-Michel Bérud.
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