C’était une séance attendue. Le conseil municipal d’Aix-en-Provence s’est réuni ce mercredi 24 novembre dans la salle des États généraux de la ville. Une assemblée qui intervient quatre jour après la démission spectaculaire de la maire d’Aix Sophie Joissains (UDI) de sa vice-présidence métropolitaine. Alors que la rupture entre Martine Vassal (LR), présidente de la Métropole d’Aix-Marseille Provence, et Sophie Joissains est consommée, l’économiste Gérard Bramoullé (LR), fidèle bras droit et premier adjoint, conserve quant à lui sa vice-présidence métropolitaine. « Un pied dehors, un pied dedans », pour reprendre les mots de Marc Pena (PS), le « positionnement ambigu » de la majorité Joissains interroge l’opposition municipale. Le débat apaisé sur la politique générale promis par Sophie Joissains lors de la dernière séance laisse rapidement place à de vifs échanges. La place d’Aix-en-Provence dans la réforme métropolitaine engagée est notamment au cœur des discussions entre majorité et opposition.
Dès les premières minutes, la députée Anne-Laurence Petel (LREM) s’adresse à Sophie Joissains, et allume la mèche. « Votre désertion ne change rien ! », tonne l’élue d’opposition, qualifiant cet acte d’aveu de faiblesse. « Les maires du Pays d’Aix se sont réunis et ne vous ont manifesté aucun soutien, appuie-t-elle sous les huées de la majorité municipale, et de poursuivre : vous avez choisi de fuir plutôt que d’agir ». Anne-Laurence Petel rappelle que la loi 3DS sur la décentralisation des compétences sera examinée à l’Assemblée début décembre. La députée en profite pour asséner un dernier coup à Sophie Joissains :« pendant que vous reculez, la Métropole avance, et je ne veux pas qu’elle avance sans Aix-en-Provence ».
Je ne regrette rien.
Sophie Joissains
Attaquée, l’édile aixoise maintient sa ligne. « Je ne retire rien de ce que j’ai dit vendredi », répond Sophie Joissains. Comme elle l’a mentionné lors de la dernière séance du conseil métropolitain, l’élue regrette la « destruction totale des conseils de territoires » en 2022. Elle se demande comment les communes vont survivre avec la baisse annoncée des attributions de compensation (AC). L’ex-VP métropolitaine assume sa démission. « C’est très important qu’Aix-en-Provence montre son indépendance », ajoute Sophie Joissains. Une émancipation toute relative cependant. Même si elle ne fait plus partie de l’exécutif, la maire d’Aix est toujours élue à la Métropole. De plus, Gérard Bramoullé, premier adjoint aixois, demeure premier VP métropolitain délégué à la stratégie budgétaire. « C’est salvateur pour cette métropole », considère Sophie Joissains.
Mais le socialiste Marc Pena n’est pas du même avis. Il dénonce « un positionnement ambigu, une attitude schizophrène » de la majorité aixoise. L’élu d’opposition estime que Gérard Bramoullé a défendu vendredi les orientations budgétaires de la Métropole, et qu’il est un allié de Martine Vassal, au même titre que Sophie Joissains. « Ce n’est même plus une affaire métropolitaine, c’est une querelle interne à la droite », lance Marc Pena. Alors que la loi 3DS est encore à l’étude, il craint que ce débat n’ait des conséquences négatives pour Aix-en-Provence, et appelle à la clarté.
L’ombre de Maryse Joissains plane toujours sur le conseil d’Aix
Philippe Klein (LREM)
Dans le dernier numéro du magazine communal Aix le Mag, une tribune de deux pages est accordée à Maryse Joissains, mère de Sophie Joissains et ancienne maire d’Aix-en-Provence. L’édile démissionnaire, condamnée par la justice, s’attaque aux magistrats et dénonce « une idéologie gauchiste, un esprit de corps et une rare incompétence » concernant sa condamnation. « Le pouvoir des juges est l’ouverture à la dictature », conclut-elle. Une déclaration qui interpelle l’opposition aixoise.
Juriste de profession, Philippe Klein (LREM) rappelle à Sophie Joissains qu’en sa qualité de maire, elle est directrice des publications de ce journal d’action communale, financé par des fonds publics. Par conséquent, si poursuites il devait y avoir, elle serait considérée comme l’auteur de ces propos. Maryse Joissains n’étant qu’une rédactrice complice. Philippe Klein s’interroge sur le rôle de ce magazine, et sur le contrôle qu’exerce Sophie Joissains sur la publication.
La maire d’Aix répond à cette polémique. « Je ne censurerai jamais personne (…) on parle quand même d’un maire qui a exercé pendant vingt ans », rappelle Sophie Joissains. Une justification qui ne convainc pas Marc Pena (PS), qui craint une nouvelle condamnation judiciaire pour le clan Joissains. « Même dans ses rêves les plus fous, Jean-Marie Le Pen n’aurait pas osé dire cela », estime le socialiste.
Maryse Joissains, qui n’est plus élue au conseil municipal, a été remplacée numériquement ce mercredi 24 novembre. Malgré l’abstention de la majorité présidentielle et de la gauche, la jeune Kayané Bianco, jusqu’alors déléguée au plan vélo, est élue adjointe à la maire d’Aix-en-Provence (35 voix pour, trois votes blanc et un nul). La liste des adjoints n’est donc plus incomplète ; elle passe de sept à huit.
Bramoullé accuse Macron de vouloir « tuer les communes »
L’économiste Gérard Bramoullé, qui pourrait bien devenir le prochain président du Pays d’Aix (CT2), fustige la proposition du gouvernement. Il qualifie l’article 56 de la loi 3DS de « catastrophe morale (…) On appelle ça de la simonie ». Selon Gérard Bramoullé, la méthode Macron, c’est de « tuer les communes ». Avec la disparition des conseils de territoire, l’élu craint que les villes de la métropole ne puissent plus s’appuyer sur les AC. Concernant Aix, « la chambre régionale des comptes voudrait retirer 23 millions d’euros de notre budget de fonctionnement (…) et 30 millions à terme », peste Gérard Bramoullé. L’économiste explique que la ville sera dans l’obligation d’augmenter sa taxe foncière de 40% pour compenser ce trou dans le porte-monnaie municipal.
Mais la députée Anne-Laurence Petel défend sa majorité présidentielle. « Tout ce que vous dites est factuellement faux ! », s’exclame l’élue d’opposition, coupant de facto la parole à Gérard Bramoullé. Anne-Laurence Petel rappelle qu’une conférence financière aura lieu au deuxième semestre 2022 – comme l’avait annoncée Martine Vassal fin octobre suite à sa rencontre avec Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires. Gérard Bramoullé explique s’appuyer sur le rapport public de la CRC pour tirer de telles conclusions fiscales.
La séance du conseil municipal d’Aix en vidéo
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