Odysséo est l’une des promesses du plan Marseille en Grand d’Emmanuel Macron. Si la date d’ouverture est fixée à 2026, le directeur général du projet Cyprien Fonvielle, cofondateur de l’association Neede, explique ses attentes et ses projections. Comme son nom en réfère à la mythologie grecque, Odysséo sera une fondation reconnue d’utilité publique aux multiples missions : un espace d’information sur la Méditerranée (musée), un établissement de formation sur les impacts et les solutions à mettre en oeuvre face au réchauffement climatique et un incubateur de start-up. Gomet’ a rencontré Cyprien Fonvielle lors du Forum des mondes méditerranéens le 8 février.
Pouvez-vous nous rappeler le rôle d’Odysséo pour la Méditerranée ?
Cyprien Fonvielle : C’est d’abord la création de lieux sur le bassin méditerranéen, des lieux de vie et d’expérimentation qui permettront à chacun de comprendre la Méditerranée et l’impact du dérèglement climatique sur ce territoire. Ces lieux sont co-construits avec « Marsa », le projet d’Ora-Ito, qui est partie prenante d’Odysséo. Le designer travaille avec nous sur la formation et l’innovation qui se concrétisera par la création d’un incubateur d’entreprises lié à la transition écologique. Un espace sera dédié à la formation pour les métiers qui n’existent pas ou qui ont du mal à recruter, que se soit dans le domaine de l’énergie, de la gestion de l’eau ou de l’alimentation. C’est une demande du gouvernement dès le départ : que ce lieu puisse former de bac – 3 à un diplôme d’ingénieur.
Emmanuel Macron annonce une ouverture du lieu à horizon 2026. Où sera-t-il installé à Marseille ?
C. F : Le président de la République a arrêté l’emplacement dans le centre-ville à Marseille. Il devait l’annoncer après la concertation avec les collectivités locales. Cette concertation est faite. Le lieu est déterminé et c’est maintenant au président de l’annoncer. (Ndlr : plusieurs sites sont explorés mais celui que souhaite le président est sur les quais entre le J4 et le J1, même si la direction du port aimerait une autre vocation)
L’État semble proactif sur ce dossier. Combien de personnes travaillent au quotidien avec vous ?
C. F : Oui totalement, et la Région Sud aussi. Renaud Muselier est notre plus fort soutien depuis deux ans. Le ministère de l’Éducation nationale a détaché deux professeurs de sciences et vie de la terre à mi-temps pour Odysséo et le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche nous a mis à disposition un ingénieur. Par ailleurs, une personne va arriver du ministère de la Mer. A terme, ce n’est qu’une estimation, 50 personnes travailleront sur le projet dont des professionnels de différents pays méditerranéens.
Combien coûte un projet de cette envergure ?
C. F :Actuellement, les frais de fonctionnement de l’association Neede qui porte le projet Odysséo sont de 600 000 euros à l’année. Pour la fondation, la dotation minimale prévue par le Conseil d’État est de 1,5 million euros de fonds privés. Mais la particularité de notre approche est que l’on ne cherche pas des bailleurs de fonds. Nous recherchons des entreprises qui vont co-construire ce projet avec nous. A terme, les frais de fonctionnement s’établiront aux environs de cinq millions d’euros. Nous recherchons des typologies de métiers associés, notamment le transport maritime, on discute avec des entreprises dans le domaine de l’énergie, de la banque ou de l’assurance… beaucoup de partenariats sont en cours.
Odysséo sera une fondation reconnue d’utilité publique. Pourquoi ce choix ?
C. F : Le statut de fondation permet de construire des projets sur d’autres territoires. Nous pouvons également associer des acteurs issus d’autres pays que la France dans le conseil d’administration, ce qui était essentiel pour nous. Les dotations publiques doivent représenter moins de 50% des dotations totales, il faut donc qu’une majorité des ressources soient issues d’activités propres à la fondation et de soutiens privés. Si Odysséo était devenu un établissement public national, comme nous l’avions envisagé au tout début, nous aurions donné l’impression que la France voulait porter son projet à l’étranger alors que ce n’est pas l’objectif. C’est un projet commun aux pays méditerranéens.
Avec quels acteurs économiques avez-vous commencé à travailler ?
C. F : La seule entreprise qui s’est officiellement positionnée est la CMA CGM (Ndlr : le troisième armateur mondial fondé et basé à Marseille). Il nous accompagne dans la construction du projet et d’autres, comme Ecorecept dans le Var, nous guident sur les programmes de formation. La CMA CGM est membre fondateur d’Odysséo, puisqu’il contribue à la dotation pour la construction de la future fondation et qu’il accompagne financièrement le fonctionnement de la structure. Par ailleurs, nous avons déjà commencé à travailler avec des acteurs institutionnels et associatifs comme la Tour du Valat, le conservatoire du littoral, Smilo, le Parc national de Port-Cros… Et « le Domaine du possible » (Ndlr : co-fondé par l’ancienne ministre de la Culture Françoise Nyssen) est engagé depuis longtemps, car Françoise Nyssen est la présidente d’Odysséo. Nous avons également un partenariat avec l’Université Aix Marseille (AMU) pour la formation.
Avez-vous une méthodologie de concertation avec les différents acteurs méditerranéens ?
C. F : Nous avons commencé par les réseaux d’acteurs qui se sont naturellement tournés vers nous. Parmi eux, beaucoup agissent dans le domaine de l’éducation, de la formation ou la recherche. Ainsi, nous avons tissé des partenariats avec 15 pays méditerranéens dont l’Algérie, le Maroc, la Tunisie, le Liban, le Grèce, Malte ou Chypre… sur 23 pays du bassin. Notre méthodologie est d’identifier des pistes d’actions, de lancer une expérimentation dans le pays et de venir l’adapter à ses besoins.
Les autres lieux de ce type, construits en Méditerranée, se nommeront aussi « Odysséo » ?
C. F : L’idée pour nous serait d’avoir un ensemble cohérent. Ce serait comme une marque méditerranéenne, qui donnerait l’esprit « réseau » recherché.
Vous vous êtes exprimés lors du Forum des mondes méditerranéens. Que pensez-vous de cette initiative ?
C. F. : L’initiative permet de rassembler et de faciliter la construction de partenariats. Nous avons échangé plusieurs cartes de visites notamment avec un représentant de l’Égypte, un pays avec lequel nous ne sommes pas encore partenaire pour Odysséo. C’est aussi une façon de mettre un coup de projecteur sur les problèmes liés à la Méditerranée, car l’urgence est ici, en Méditerranée. Ce territoire sera le plus impacté par le réchauffement climatique, après les pôles Sud et Nord.
Liens utiles :
> Neede Mediterranée : un grand projet de cité de la transition arrive à Aix-Marseille
> Emmanuel Macron annonce un fonds de 100 millions d’euros pour entreprendre au Maghreb
> Cyprien Fonvielle dans les archives de Gomet’
> [Document source] Les 22 pages du discours « Marseille en grand » d’Emmanuel Macron