À l’heure de la réindustrialisation du pays, l’acceptabilité est devenu un paramètre crucial dans l’aboutissement de nouveaux projets usiniers. Et pour cause, malgré la volonté de quelques groupes historiques de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, malgré les années onéreuses de R&D opérées par les nouveaux investisseurs, certaines initiatives de rupture, appelées à naître sur notre territoire, échouent aux portes de l’exploitation. Il n’est en effet plus rare de voir de grands industriels renoncer à s’implanter sur le bassin de Marseille-Fos, face à l’hostilité des populations locales dont la tolérance s’effrite. On pense notamment au projet de Satys, à Marignane, rejeté par la population et les pouvoirs publics locaux, puis avorté en 2021. Mais également à la levée de boucliers symbolique que connaît aujourd’hui le projet de raffinerie à « biocarburants » Hynovera, à Gardanne, contesté par plusieurs associations et collectifs de riverains, devenus méfiants au fil des années. Pourtant le département des Bouches-du-Rhône abrite cinq des 50 sites les plus polluants de France, soit 17% des gaz à effet de serre de l’Hexagone, et doit réformer son industrie.
D’après Jean-Michel Diaz, le président du groupement maritime et industriel de Fos (GMIF), « environ 6 milliards d’euros d’investissements sont prévus dans les dix ans sur ce bassin ». Celui qui est également le délégué régional de TotalEnergies refuse que ce développement industriel échappe au territoire.
Si on ne crée pas d’outils, il n’y aura pas de réindustrialisation sur ce territoire.
Régis Passerieux
Dans ce contexte de transition écolo-énergétique, et face à l’urgence d’une mutation à grande échelle de l’industrie tricolore, l’État veut reprendre les choses en main pour ne pas rater le coche. En plus des quatre milliards fléchés sur la dépollution du top 50 des émetteurs dans le cadre de France 2030, il souhaite agir à tous les étages avec un seul mot d’ordre : co-construction. Au cœur de cette ambition, la décarbonation de Fos-Berre est un dossier prioritaire. Sollicité par Jean-Michel Diaz, le président du groupement maritime et industriel de Fos (GMIF), le sous-préfet de l’arrondissement d’Istres, Régis Passerieux, s’est penché sur le dossier. Il veut lancer dans le bassin industrialo-portuaire, en mars 2023, une version alpha du « lab territorial ». Une démarche collaborative « claire et sincère » qui invitera citoyens, monde économique, syndicats et associations à se mettre autour de la table. Avec cet outil de lisibilité, l’État souhaite ouvrir la concertation, et favoriser la compréhension de tous les acteurs à Fos-Berre, puis à Gardanne dans un second temps. Et ce, « le plus en amont possible » de chaque projet d’implantation. Le lab territorial s’inspirera du dispositif « Réponses », dédié au partage de données sur la qualité de l’air et la santé.
Lab territorial : un pilote pour Fos Berre d’ici mars 2023
Dans les faits, le lab territorial de Fos-Berre ne sera pas une structure décisionnelle, ni un espace d’expertise. Mais il doit permettre de multiplier les échanges entre les acteurs, de diffuser des indicateurs précis, et de mettre en place des ateliers de co-construction au sein d’un premier tiers-lieu à l’Afpa Istres. Une manière de renforcer la culture des enjeux industriels, mais aussi d’accentuer la prise en compte de l’impact social et environnemental des projets. L’occasion également pour les parties prenantes d’entamer un dialogue avec les riverains, en toute transparence, avant que le projet ne passe entre les mains de la Commission nationale du débat public (CNDP). Une étape fatale à environ 4% des implantations industrielles en France, mais qui permet aussi d’ajuster près de 60% des dossiers. Le dispositif Lab territorial sera accompagné par la création d’un comité d’élus, présidé par le maire d’Istres, François Bernardini, et d’un comité scientifique. En cas de succès, cette méthode pilote, vouée à définir la soutenabilité des grands projets industriels, pourrait se propager à l’échelle nationale.
Régis Passerieux : « Eviter une situation absurde de blocage »
[Industrie] La rédaction de @Gometmedia est mobilisée à #Martigues pour suivre le salon #Petrochymia / Ici le sous-prefet d’@villeistres Régis Passerieux explique la démarche du #Labterritorial pour accompagner la transformation industrielle de #Fos pic.twitter.com/OGVqbweyum
— Gomet’ (@Gometmedia) November 24, 2022
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