C’est l’un des plus grands et des plus beaux projets métropolitains. La Citadelle de Marseille développée par le Groupe SOS sur le site du Fort d’Entrecasteaux, dominant le Vieux-Port depuis la colline St-Victor, va devenir à partir de fin 2022 un lieu où l’on viendra se promener et apprendre. Interview grand format du directeur du projet, Cyprien Fonvielle. Aujourd’hui la 3e et dernière partie de notre entretien (lire ici la précédente).
Quelle est l’estimation globale du coût du projet et comment allez-vous le financer ?
Cyprien Fonvielle : On estime à 40 millions d’euros le total des investissements à réaliser sur le site. Une partie essentielle va être assurée dans le cadre des chantiers d’insertion que nous gérons nous-mêmes, ce qui permet de réduire significativement les coûts. On a déjà réussi à attirer des mécènes sur le projet. Ils viennent participer au financement d’investissements sur ce lieu. On peut citer par exemple les Fondations Velux qui participent au financement d’Acta Vista et au développement du projet Citadelle. Il y a aussi les fondations du Crédit Agricole et de Daher qui participent à la restauration du lieu. L’objectif est d’attirer davantage de mécènes privés. Nous aimerions atteindre 30% du budget total avec du mécénat. L’enjeu c’est aussi de mettre autour de la table des acteurs publics qui ne sont pas présents pour l’instant et qui financeraient le reste. Des discussions ont commencé avec les services de l’Etat et les collectivités territoriales pour qu’ils s’engagent dans la durée.
Et concernant le budget de fonctionnement ?
Cyprien Fonvielle : L’objectif est que l’on atteigne 55% des ressources propres grâce aux entrées, les 45% restants étant financées par les mécènes et les structures publiques.
Le lieu se prête aussi aux projections sur les façades et les murs d’enceinte. On a le soir la possibilité de faire de ce lieu un site d’exposition
Cyprien Fonvielle
Lors de la présentation du projet, il a été aussi question de ressources numériques et d’oeuvres d’art monumentales. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Cyprien Fonvielle : Le but est de s’appuyer sur la réalité virtuelle à la fois pour travailler toute la démarche pédagogique et historique mais aussi pour alimenter la programmation artistique. Nous voulons utiliser l’image en mouvement et le numérique pour les expositions par exemple. Nous avons des espaces qui se prêtent bien à l’immersion. Il y a beaucoup de galeries ou de salles souterraines plongées dans le noir. Tout cela est en cours de définition. On va affiner dans les prochains mois.
Cela fait penser aux expositions des Carrières de lumières aux Baux-de-Provence…
Cyprien Fonvielle : Ici le lieu se prête aussi aux projections sur les façades et les murs d’enceinte. On a le soir la possibilité de faire un site d’exposition pour tous les gens qui se trouvent en périphérie.
Vous avez aussi parlé d’art contemporain ?
Cyprien Fonvielle : On veut pouvoir réaliser ici, tout au long de l’année, après l’ouverture du site, des résidences d’artistes. Ils viendront dans le cadre d’approche participative, en associant les publics, pour créer des œuvres monumentales qui seront exposées sur place. Certaines seront visibles de l’extérieur du site, d’autres non. Objectif sous-jacent : que ces œuvres apportent une partie de l’énergie produite sur le site afin de renforcer son autonomie.
La question des énergies renouvelables est fondamentale pour nous. Nous voulons en effet nous rapprocher le plus possible de la logique d’autonomie qui existait à la création du site au 17e siècle
Cyprien Fonvielle
Justement, sur la ressource énergétique. Quelles sont vos idées ?
Cyprien Fonvielle : La question des énergies renouvelables est fondamentale pour nous. Nous voulons en effet nous rapprocher le plus possible de la logique d’autonomie qui existait à la création du site au 17e siècle. Nous avons fait des propositions aux ministères de la culture et de la transition pour expérimenter une nouvelle approche des ressources sur un bâtiment classé monument historique. Nous attendons leur réponse. Nous avons des partenaires comme Tenergie, DualSun et Engie qui sont prêts à nous accompagner pour voir comment trouver des solutions sur nos monuments. Il est évident que l’on ne va pas pouvoir poser des panneaux photovoltaïques ni mettre des éoliennes. C’est une certitude. Mais il y a peut-être des solutions intermédiaires. Aujourd’hui, nous n’avons pas de solutions mais on cherche. BAO, notre centre de formation est l’un des principaux formateurs de poseurs de panneaux photovoltaïques. On a donc une place particulière sur la filière solaire.
Concernant l’accès des visiteurs, comment souhaitez-vous l’organiser ?
Cyprien Fonvielle : Il n’y a pas de parking prévu car nous sommes dans l’hyper-centre et il y a déjà une offre importante. Nous travaillons avec la Métropole pour voir comment optimiser la desserte en transports en commun et les accès en mode doux. Sur cette partie du Vieux-Port, la réflexion n’est peut-être pas allée jusqu’au bout. Ce périmètre comprend aussi l’accès au Pharo. Concernant les plans de circulation au sein du site, il y a tout un travail qui est en train d’être réalisé par notre architecte du patrimoine. Dans un monument historique tout ne pas être accessible aux personnes à mobilité réduite, malheureusement. Nous allons travailler en revanche sur des pentes plus douces pour permettre un accès depuis le Vieux-Port. Nous imaginions également un accès par ascenseur du côté de la caserne d’Aurelle. Mais le projet immobilier qui existe sur le site, en parallèle du collège, nous empêche de réaliser l’accès qui devait rejoindre l’extérieur via une entrée dans le prolongement de la rue Sainte.
Il est essentiel que l’on mettre autour de la table tout ce qui ont envie de porter leur regard sur ce lieu
Cyprien Fonvielle
Enfin, une question plus personnelle. En quoi votre expérience au Camp des Milles peut vous servir pour la construction de la Citadelle de Marseille ?
Cyprien Fonvielle : Cela me nourrit parce que j’ai déjà l’expérience du travail avec les partenaires locaux et nationaux sur la question de la création d’un lieu d’éducation et de culture. C’est une expérience vécue puisque j’ai été recruté sur le Camp des milles en 2009 pour créer ce projet. J’ai vécu sur place des réussites et par moment des échecs. Le but est de profiter de cette expérience. Avec tous les partenariats qui ont pu être tissés au Camp des Milles, il s’agissait d’enrichir en permanence le projet en ouvrant la porte à des acteurs qui n’étaient pas forcément impliqués dans le travail historique. La plupart n’étaient pas des acteurs de la mémoire. Ils sont venus chacun avec leurs propres expériences et leurs propres regards. Ils ont éclairé l’utilité du lieu. Et c’est un peu la même démarche que nous entreprenons ici. Il est essentiel que l’on mettre autour de la table tout ce qui ont envie de porter leur regard sur ce lieu et qui ont envie d’apporter leur contribution pour pouvoir se nourrir de leur réflexion, tenter des expérimentations, faire murir et grandir ce projet.
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