Comment les institutions peuvent-elles se relever de l’abstention ?
Les partis deviennent des entreprises de marketing.
Raphaël Liogier
R.L: Les institutions ne sont rien sans les hommes qui les constituent. Seulement les hommes qui portent les institutions ne croient plus en eux-mêmes. Ils ne sont plus que des marketeurs, c’est ce qu’appelait Bourdieu, “l’habitus politique”. Cela n’est pas le cas de tous les pays européens. Par exemple, l’Allemagne ne voit pas autant d’abstention que la France. Cela se comprend, car Angela Merkel est sûre d’elle-même, et elle accepte l’impopularité. Même si elle vient de la droite conservatrice allemande, sa réforme pour l’immigration a été menée à bien. Elle est parvenue à laisser rentrer dans son pays un quota plus important d’immigrés. Elle l’a fait, car elle sait que si l’on ne l’aime pas, mais on peut voter contre elle. En France, Macron fait des vidéos avec les youtubeurs Mcfly et Carlito pour convaincre les jeunes. Mais cela est inutile, car les gens n’y croient plus, ce n’est que du marketing. Et tout le système est comme cela, les réactionnaires veulent être marketeurs de marque, les partis deviennent des entreprises de marketing. Il est donc possible de se relever, mais il faut que les politiciens comprennent qu’ils ne sont pas des marketeurs, qu’ils soient plus courageux et qu’ils prennent des risques.
Les élus peuvent-ils être encore légitimes ?
R.L: Oui, ils sont légitimes dans une version merkelienne ou gaullienne dans laquelle l’apparence ne fait pas tout. Les électeurs sont en quête de vérité : c’est ce qui a mené à l’élection de Trump. Bien sûr qu’il ne racontait que des mensonges, mais il faisait croire qu’il disait la vérité. Il a manipulé la foule pour gagner.
Comment faire pour faire revenir l’électorat au bureau de vote ?
R.L: Il faut que l’électorat arrête de regarder les sondages. Il faudrait aussi que les politiciens écoutent plus qualitativement, et non quantitativement.
Qui boycottent les élections ?
R.L: Ce n’est pas un boycott, car cela voudrait dire que le vote est important. Les électeurs ne veulent pas se faire remarquer, juste ils ont un désintérêt pour cela.
Que pensez-vous du vote électronique ? Doit-on faire évoluer les techniques de vote ?
R.L: Je suis pour, le progrès technique permet d’accroître nos capacités, mais il ne faut pas faire n’importe quoi. De plus, il ne doit pas remplacer le vote traditionnel pour pouvoir avoir une sociabilisation. Il doit y avoir donc les deux possibilités.
Dans les pays qui utilisent la proportionnelle, les débats sont plus vifs.
Raphaël Liogier
Quid de la prise en compte du vote blanc ? Et de l’adoption de plus de proportionnelle ?
R.L : Je suis pour la prise en compte du vote blanc et de la proportionnelle Je trouve que c’est l’un des défauts de la Ve République. Dans les pays qui pratiquent la proportionnelle, les débats sont plus vifs.