Rafik Belhadj-Amara, un homme de la logistique du Groupe Bolloré, responsable « ligne fret » de Navimed qui gère Marseille-Tanger, agent maritime qui gère le fret, voit dans la route le seul concurrent. « Nous avons quatre atouts, plaide-t-il : « 1. Les fréquences : nous assurons deux rotations par semaine, le fret n’a pas à attendre longtemps. 2. Le transit time : la traversée dure 39 heures. En camion, il y a 34 heures de routes plus le passage très souvent embouteillé du détroit de Gibraltar. 3. La régularité : le trafic passager impose ses horaires fixes et annoncés qui deviennent un atout pour le client. 4. L’écologie : le transport maritime est évidemment moins polluant que la route via l’Espagne d’autant que la Méridionale agit depuis 10 ans pour prévenir les risques et réduire ses impacts sur l’environnement. »
Un bras de fer avec les habitudes
Reste le prix : « A un euro le kilomètre, nous sommes moins cher de quai à quai, plaide Rafik Belhadj-Amara. Le chauffeur peut être seul à bord, il peut se reposer pendant le transit. Mais il y a des pratiques douteuses non concurrentielles comme l’habitude d’avoir un double réservoir que l’on remplit avec du gas-oil marocain évidemment peu cher. Mais les plus ancrées sont les habitudes : le transporteur routier aime manger du goudron ! Et n’a pas coutume de prendre la mer ou de dormir pendant un transit ». Éric Brioist rappelle que pour une remorque qui traverse le sud de l’Europe, il faut un double pilotage, des heures de repos et traverser des autoroutes saturées.
Côté passager, La Méridionale a revisité son offre qu’elle présente comme « le prolongement idéal des axes autoroutiers de la vallée du Rhône et une alternative aux heures de trajets automobiles pour rejoindre les ports situés à l’est (Italie) et à l’ouest (Espagne, Sète) de la cité phocéenne ». « Nos services mettent en avant la culture marocaine. Nous proposons une restauration de qualité, des cabines confortables, un salon de 50 fauteuils et un lieu de culte aménagé en tenant compte des conseils de l’Association culturelle des musulmans de Marseille. Nos navires sont également conçus pour accueillir les personnes à mobilité réduite », indique Nadira Birèche, responsable de l’animation commerciale.
Comme pour la Corse, la traversée se veut « croisière » avec, ce fut un débat interne, télévision dans chaque chambre. Mais Éric Brioist ne cherche pas la clientèle touristique de court séjour. « Personne ne sacrifiera deux fois 39 heures de trajet pour une semaine au Maroc, l’avion gardera sa primauté. Mais il existe une clientèle touristique automobile qui ne veut pas faire les 1 600 km sur route et préfère le confort de la croisière. »
La Méridionale va chercher un marché de niche. Les trafics et leurs tarifs feront la sélection. Si la compagnie se refuse à donner un prix ou un panier moyen, on constate en souscrivant un billet pour Tanger sur la plateforme en décembre, qu’il en coûtera une centaine d’euros comme simple passager. Mais avec une voiture, les deux parents et deux enfants, il dépassera les 1 000 euros pour l’aller-retour.