Des navettes maritimes, des stations de vélo, des bus… Les transports publics mis en place en direction des Goudes ne suffisent toujours pas. La route en entrée du parc des calanques, directement connectée aux quartiers sud de Marseille, est régulièrement engorgée par le trafic routier et ses conséquences : bouchons, parking anarchiques, danger pour les visiteurs et résidents, obstacles pour les secours.
« Notre quartier des Goudes enclavé subit une sur-fréquentation flagrante avec une saturation de la route qui met en danger les habitants comme les visiteurs dénoncent de longue date les habitants (…) Aujourd’hui encore, faute d’une bonne desserte de transports en commun, les familles sont obligées d’avoir plusieurs voitures et les visiteurs de venir en voiture » dénonce un tract de collectifs d’habitants. Deux pétitions ont été lancées au cours des dernières années. La dernière en date en mars 2024 a recueilli plus de 3 000 signatures. Pour les pétitionnaires la solution est multiple. Ils demandent plus de bus (plus grand, plus d’amplitude horaire et toute l’année), plus de navettes maritimes (dont des directes Vieux-Port ou Mucem matin et soir), et surtout moins de voitures via la mise en place d’une “ZTL”, zone à trafic limité.
« La légende urbaine, comme quoi les habitants des Goudes étaient partagés (50/50) sur l’intérêt d’un régulation de la circulation est infondée, ou a en tous cas énormément évoluée, puisqu’à date, 90-95% les habitants sont pour une ZTL, idem pour les habitants de Samena. D’où l’intérêt d’envisager la ZTL dès Samena, d’autant plus que Samena est la porte d’entrée du parc national des calanques » observe une habitante du quartier des Goudes contactée par Gomet’.
Qu’est-ce qu’une ZTL ?
C’est en Italie que les zones à trafic limité sont les plus développées. On en compte plus de 300. Elles sont aussi présentes dans une moindre mesure en Espagne et six sont implantées en France (Nantes, Grenoble, Rennes, Bordeaux, Paris et Lyon). Le principe a fait ses preuves de son intérêt pour tous, en tous cas de la majorité qui ne souhaite plus subir le tout voiture souligne l’habitante des Goudes contactée par Gomet’ qui travaille le sujet depuis cinq ans.
La ZTL à l’italienne permet de limiter les accès à une zone délimitée afin d’y réduire la circulation automobile. Et donc, moins de véhicules = plus de stationnements disponibles. Comment ? Les modalités sont très flexibles car gérées à distance et éventuellement adaptables en fonction des besoins et contraintes. Une ZTL peut être activée en permanence, 24h/24, 365j/an ou ponctuellement, pour journée, la nuit, ou tout le temps avec une tranche horaire pour les livraisons (par exemple de 7h à 10h). Une ZTL à l’italienne ne nécessite pas d’aire de retournement. Elle est annoncée à plusieurs reprises, suffisamment en amont de façon à dissuader les visiteurs d’y accéder s’ils n’ont pas fait enregistrer leur plaque d’ayant droit pour une raison valable.
Une ZTL à l’italienne ne nécessite pas de personnel ou de forces de l’ordre puisque tout se fait automatiquement via une lecture automatique des plaques d’immatriculation des véhicules en entrée et sortie de zone. Si la plaque est enregistrée, rien ne se passe (un feu vert peut-être rajouté pour apporter une validation visuelle de l’accès) si le plaque n’est pas enregistrée (le feu s’affiche en rouge) et le propriétaire reçoit un PV (et cela est bien sûr spécifié et répété en amont tout le long du trajet d’accès à la ZTL).
Les ZTL installées depuis dix ans en Italie : de multiples bénéfices
Le dispositif existe en Italie depuis plus de 10 ans. Là-bas, tous les ans de nouvelles zones sur-fréquentées ou fragiles rejoignent ce dispositif. Il y notamment des zones similaires à la nôtre : côte amalfitaine, Cinque Terre, ou même les grandes villes comme Rome, Milan, Naples, Turin, etc. Les dispositifs sont très bien acceptés par la population italienne car les bénéfices sont multiples et pour tous : sécurité routière car tous les véhicules qui entrent dans la zone sont identifiés donc plus de rodéos, plus de pression automobile, voie publique apaisée, moins de bruit, moins de pollution, moins de tension. La sécurité des biens et des personnes profite aussi du dispositif car on a rarement vu des cambrioleurs venir en bus ou vélo.
Les bénéfices concernent aussi la propreté car les visiteurs venant en bus ou vélo transportent moins de choses et donc laissent moins de déchets derrière eux. Et s’ils transportent moins, ils consomment plus sur place, à l’épicerie, aux restaurants et au pub (et en profitent pour utiliser leurs sanitaires plutôt que les jardins ou la mer…) Le retour du calme au niveau sonore, la baisse de la pollution atmosphérique et le niveau de l’ambiance générale engendrent un espace public plus apaisé et bienveillant. Pour les restaurateurs, cet environnement plus apaisé, permet de mieux profiter de leur terrasse, et surtout cela apporte à leurs clients une facilité et fluidité d’accès tout comme la garantie d’avoir une place de stationnement. Les sites visités gagnent en attractivité avec des arrivées ponctuelles et pas d’annulations de dernière minute pour cause de bouchons ou impossibilité de trouver une place.
Face à ces retombées, les contraintes de mise en place comme le besoin d’un accès ou d’une aide aux outils numériques puisque les enregistrements des plaques se font en ligne ou le nécessaire temps d’adaptation semblent bien modestes.
Mobilisation aux Goudes mercredi 7 mai
Mercredi 7 mai, plusieurs associations – Santé Littoral Sud, collectif Vélos en ville, collectif Pointe sud, Vivre aux Goudes, L’Anse des Phocéens – ont décidé de se mobiliser à l’occasion d’une visite de quartier de Martine Vassal, présidente de la Métropole Aix-Marseille Provence, qui dispose de la compétence en matière de voierie. En amont du déplacement un texte rédigé par des habitants lassés de la politique des petits pas a été envoyé aux résidents du quartier (environ 400 personnes à l’année), au CIQ des Goudes et à la mairie du 6-8 qui avait répondu favorablement à la ZTL en 2021 (voir le courrier en bas d’article).
Le document que Gomet’ a pu se procurer explique pourquoi la ZTL est « une solution possible et souhaitable pour résoudre la plupart des problèmes des Goudes, et plus largement du Littoral Sud si cela était appliqué plus en amont, dès la Pointe Rouge. » Nous publions ci-dessous de larges extraits :
Document source : Comment une ZTL pourrait fonctionner aux Goudes ?
« Préambule, deux points de très importants :
1/ L’idée n’est absolument pas de privatiser les Goudes, mais de réduire l’accès des voitures afin que la circulation devienne normale pour que les habitants et les secours (pour les habitants, mais aussi les visiteurs qui se blessent en randonnant ou autre) puissent accéder facilement (sans avoir à adapter leurs horaires de départ et d’arrivée en fonction de la météo (qui conditionne l’affluence). Mais aussi afin que les visiteurs ne soient plus pris au piège des bouchons et qui en plus découvrent, une fois enfin arrivés, que tous les stationnements sont déjà saturés et donc repartent bredouilles ou avec un PV pour mauvais stationnement. Une fois la ZTL en place, la circulation se normalisant, elle rendra l’usage du bus enfin attractif pour les visiteurs comme les habitants.
2/ Tout le monde est bienvenu aux Goudes mais les visiteurs (non handicapés) devront venir autrement qu’en voiture. Pour permettre l’accès à tous, fin mai, la capacité du bus passera 15 à 40 places, sa fréquence et son amplitude seront augmentés. Si le stationnement sur Delabre (rue principale où passe le bus, ndlr) est respecté, sa vitesse/régularité de desserte sera aussi améliorée (et espérons son amplitude horaire et dans l’année aussi !!).
En complément, pendant les trois mois d’été il y a aussi la navette maritime. Mais cette desserte maritime mérite d’être étendue dans l’année avec aussi une liaison directe au Vieux Port ou Mucem (Parking). A noter, cette navette est chère (8€ le trajet, Goudes/Pointe-Rouge/Vieux-Port, donc 20€ l’aller retour, MAIS cet accès est inclus dans les abonnements RTM à partir de 7 jours à 15,50€ (-> bon plan : un À/R bateau finance donc le pass à la semaine !!), https://www.rtm.fr/les-navettes-maritimes-reprennent-la-mer),
Et bien sûr, pour ceux qui le peuvent, l’accès en mobilités douces : vélo, trottinette ou à pied. Même si, dans l’idéal, il faudrait une piste/chemin séparé de la route déjà très étroite/dangereuse par endroits (pour obtenir plus de moyens pour en créer une “suspendue” au dessus des rochers sur le côté de la route.
(A noter que les signataires du document invitent à remplir l’étude nationale de la Fédération des usagers de la bicyclette (Fub) sur la cyclabilité des villes actuellement en cours. On peut y indiquer les points dangereux à améliorer, ndlr).
La Ville et l’office du tourisme communiquent sur les conditions d’accès au site en indiquant les moyens alternatifs de visite (bus, navettes maritimes, taxis, vélos, etc..). La situation en cul de sac du littoral sud est particulièrement adaptée et rend le dispositif peu onéreux et facilement instalable et contrôlable car il n’y a qu’une unique et identique route d’accès et de sortie et donc besoin que d’un seul point de contrôle.
La ZTL peut s’appliquer à tous les véhicules immatriculés, 4 roues comme 2 roues, si souhaité. Les plaques sont enregistrées via une plateforme en ligne et/ou une application. Les habitants et ayants droits ont différents niveaux d’accès et de possibilités en fonction de leur statut :
– les habitants (propriétaires et locataires) peuvent enregistrer un certain nombre de plaques permanentes, en général en fonction de la superficie de leur habitation. Ils peuvent aussi générer un certain nombre de plaques temporaires à la journée/semaine pour leurs visiteurs (famille, amis, aides à domicile, livraison, mais aussi locataires de leur location touristique/Airbnb).
– les restaurateurs enregistrent les plaques de leur personnel à l’année/temporaire et pour leurs clients, à chaque réservation (1 plaque par table de 1 à 4 personnes, 2 plaques par table de 5 à 8 personnes, etc…), même principe pour les hoteliers.
– les travailleurs au port bénéficient d’une plaque chacun et les usagers/plaisanciers du port bénéficient d’une plaque par bateau – les dirigeants/salariés des commerces bénéficient d’une plaque chacun
– les secours, soignants, bus, taxis, et véhicules techniques de la Ville et de la Métropole sont autorisés en permanence.
Idéalement dans la configuration des Goudes, une “ZTL à l’Italienne” devrait se faire en parallèle du passage au stationnement payant dans le village.
Pourquoi ? La ZTL à l’italienne permet de limiter les accès à une zone délimitée afin d’y réduire la circulation automobile. Et donc, moins de véhicules = plus de stationnements disponibles. Mais, comment faire pour que les habitants n’aient pas à aller se stationner sur le parking Napoléon car les jours de beau temps, entre les clients des restaurants et les usagers du port, cela fait quand même beaucoup de véhicules qui pourront venir aux Goudes et voudront s’y stationner, en plus des habitants.
Comme il est légalement impossible de réserver de l’espace publique pour une catégorie de personnes (en l’occurrence, nous, les habitants), la solution est de rendre le stationnement dans le village payant, mais de laisser le parking visiteurs (Napoléon) gratuit.
En utilisant la technique du nudge on affiche clairement la différence en mettant un prix horaire dissuasif pour les non-résidents (par exemple 5€/h dans le village) et de beaux panneaux fléchant “PARKING VISITEURS GRATUIT” vers le parking Napoléon (sur la route qui mène à Callelongue, au-dessus du village des Goudes, ndlr). Ainsi, ceux qui partiront pour la journée en bateau ou qui viendront déjeuner au restaurant profiteront d’avoir la chance d’avoir l’accès voiture aux Goudes pour y rester toute la journée, iront naturellement se garer gratuitement au parking visiteurs/Napoléon (125 places), plutot que de payer 5€ de l’heure dans le village, idem pour les locataires Airbnb.
Cela n’empêchant pas la dépose-minute de la glacière et autres objets/personnes au port, la dépose minute des personnes agées/fragiles devant les restaurants, ou encore des bagages/courses pour les Airbnb.
Le tout biensûr avec une meilleure sécurité des véhicules à Napoléon grâce à la vidéo surveillance du parking (déjà effective) ET l’effet filtre de la ZTL.
Cela devant néanmoins être complété par la création d’un accès/escalier direct et eclairé du parking visiteurs/Napoleon vers le village pour une meilleure sécurité, notamment la nuit après le resto (avec une seconde caméra en fond de parking). Ainsi, avec ce dispositif, les habitants bénéficieraient d’une carte de stationnement résidentiel à 130€/l’année (= seulement 30 centimes/jour !) et seraient assurés d’avoir (presque) toujours des places disponibles à proximité immédiate de chez eux.
Comment ? Les modalités sont très flexibles car gérées à distance et éventuellement adaptables en fonction des besoins et contraintes. Une ZTL peut être activée en permanence, 24h/24, 365j/an ou ponctuellement, ou seulement en journée, ou seulement la nuit, tout le temps, ou tout le temps avec une tranche horaire pour les livraisons (par exemple de 7h à 10h).
Les questions à régler :
– A quel endroit faire démarrer la ZTL ? Pointe-Rouge ? Place Engalière ? Legré Mente ? Samena ? Les Goudes ?
– Quel niveau de réduction d’accès est souhaitable ? Toute l’année ? Seulement pendant les vacances ? 24h/24 ? Seulement le jour ?
– Combien de plaques permanentes pour combien de m2 d’habitation ou d’habitants/famille ? »
Une mise en place le plus vite possible : travaux en perspectives sur la route des Goudes
Le document transmis aux habitants demande une mise en place le plus vite possible de la ZTL : « On n’a plus le temps de tergiverser, d’attendre après les élections pour X ou Y raison. Nous sommes en danger et les habitants sont à bout. Déjà avec les tensions actuelles, cela peut dégénérer très vite. Surtout que la situation ne va pas s’arranger. Nous le savons et nous l’avons tous constaté, cette saison débute encore plus fort que les précédentes. A cela viendront bientôt s’ajouter les travaux de dépollution du littoral, donc de nombreux, très gros et larges camions qui traverseront tous les noyaux villageois jusqu’à la Pointe-Rouge. »
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Et de poursuivre : « Au niveau des lieux des chantiers, la plupart en bord de route, des voies réduites, voir des circulations alternées seront nécessaires. Même si les travaux seront interrompus pendant l’été. Nous savons tous que dorénavant, l’affluence, la sur-fréquentation c’est toute l’année à partir du moment où le soleil est présent. Alors les travaux commençant en septembre ou octobre 2025 à Samena, c’est maintenant qu’il faut lancer ce projet ! »
Lors de sa visite Martine Vassal, accompagnée de plusieurs élus dont Solange Biaggi (en charge du commerce à la Métropole), Ludovic Perney de la Région Sud mais aussi Catherine Pila, la présidente de la RTM, a écouté la cinquantaine d’habitants réunis dans le petit port des Goudes. Face aux inquiétudes des habitants et professionnels à l’approche de la haute saison, la présidente a, selon nos confrères de La Marseillaise, promis de plancher sur des solutions, même provisoires d’ici l’été. Et elle s’est même dite, selon des témoignages recueillis sur place, favorable à l’installation progressive d’une ZTL. Un habitant cité par La Marseillaise, hésite, entre lassitude et impatience, à se réjouir : « Tant que l’on ne pensera pas à une stratégie globale, rien ne changera.»
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